N° 94, septembre 2013

La prise en charge et le traitement des enfants atteints par le cancer en Iran
présentation de la fondation Mahak
à Téhéran


Entretien avec Arâsb Ahmadiân*
réalisé par

Mireille Ferreira


Quand la fondation Mahak a-t-elle été créée ?

La société pour soutenir les enfants atteints de cancer, aussi également appelée Mahak, a commencé ses activités en 1991 à Téhéran en tant qu’organisation non gouvernementale à but non lucratif dans le but de soutenir les enfants atteints de cancer ainsi que leurs familles. Durant ses deux décennies d’activité, en sensibilisant le public et avec l’aide de citoyens bénévoles et de volontaires, Mahak a obtenu des succès non négligeables dans les domaines des services médicaux et de la recherche, devenant un pôle important en la matière dans le Moyen-Orient. A titre d’exemple, Mahak a réussi à réduire le taux de mortalité infantile par cancer à moins de 15 % tout en contribuant de façon constante à l’augmentation de leur survie grâce aux dons, au travail de ses employés et bénévoles, ainsi que par l’utilisation de méthodes scientifiques standards afin de fournir la meilleure qualité de soins possible.

Le nom "Mahak" est une abréviation des différents domaines d’activité de cette institution, à savoir le soutien aux enfants atteints de cancer, et son logo représente une feuille, qui est un symbole de vie, avec un enfant et sa famille qui s’y tiennent debout en regardant avec espoir vers l’avenir.

Quelle est l’étendue du domaine d’activité de Mahak ?

Au milieu de l’année 2013, Mahak fournissait une couverture de soins complète à plus de 19 000 enfants atteints de cancer. Elle a élargi géographiquement son domaine d’action en fournissant des services à plus de 90% de sa population cible et en développant ses services de soutien à 27 hôpitaux publics à travers l’Iran.

Photos : Fondation Mahak à Téhéran

Quels sont les différents acteurs qui ont porté, à l’origine, le projet de la Fondation Mahak ?

En 1991, Mme Saideh Ghods, dont la fille avait guéri d’un cancer et qui avait donc une conscience profonde des souffrances et problèmes générés par cette maladie, a fondé Mahak en tant qu’institution de charité visant à aider les enfants pauvres atteints de cancer ainsi que leurs familles. Ces aides incluaient la fourniture d’aide et d’informations, ainsi qu’un soutien multiforme durant le processus de traitement dans les hôpitaux publics et universitaires. L’institution est gérée par des organismes et personnes privées. Tout d’abord, au sommet, le conseil d’administration formé d’experts dans les domaines de l’industrie, de l’économie et de la médecine a pour rôle de permettre à Mahak de devenir une organisation importante dans la région au travers d’une politique d’action créative et efficace. Il se réunit en moyenne deux fois par an. Ses membres décident des orientations fondamentales de l’organisation. Le conseil de direction, comprenant 7 membres, se réunit sur une base hebdomadaire et est composé d’un groupe d’experts bénévoles. Ils sont notamment chargés de la mise en application des plans prévus, de l’élaboration des règlements de l’organisation ainsi que de la répartition de son budget… La direction de Mahak est assurée par le directeur général choisi par les membres du conseil de direction (ou des personnes qui lui sont extérieures) pour une période de deux ans. Depuis 2007, cette fonction est assurée par Arâsb Ahmadiân.

Quels sont les profils des membres du personnel médical intervenant à Mahak ?

Les membres du personnel médical sont en grande majorité des hématologues pédiatriques et des médecins spécialistes oncologues, parmi desquels nous pouvons citer Azim Mehrvar, directeur de l’hôpital Mahak, Amir Abbâs Hedâyati Asl, responsable de la section de greffe de moelle à partir de cellules souches, Maryam Tashvighi, MD hématologue pédiatrique, Mohammad Farânoush…

Après deux décennies d’existence, quelles sont les infrastructures médicales dont dispose Mahak ?

Mahak a toujours cherché à étendre son soutien à travers le pays, et elle offre actuellement ses services à 27 hôpitaux publics dans 16 villes à travers l’Iran. Mahak a également mis en place 16 bureaux de collecte de fonds dans Téhéran et sa banlieue. Etant donné que l’Iran est un grand pays avec une population de près de 80 millions où il y a toujours beaucoup de besoins, nous avons toujours souhaité aider à la mise en place d’autres organisations communautaires. Nous avons fourni des conseils dans ce domaine et partagé des connaissances et expériences acquises dans le cadre national dans plusieurs villes de province comme Kermân, Zanjân, Sanandaj et Oroumieh, et ce dans le but de renforcer les capacités et les infrastructures d’autres ONG conformément aux normes internationales.

Quelles sont les méthodes thérapeutiques contre le cancer utilisées à Mahak ? Pouvez-vous nous parler plus particulièrement du service de radiothérapie mis en place par Mithrâ Ghâlibâfiân ?

Selon les normes internationales et sur la base des méthodes thérapeutiques les plus récentes, Mahak a recours aux trois principales méthodes utilisées : la chimiothérapie, la chirurgie, la radiothérapie et la greffe de cellules souches médullaires. L’unité de radiothérapie de Mahak est équipée d’un nouvel accélérateur appelée ONCOR offerte par l’une des bénévoles soutenant Mahak. Cette technique offre un traitement plus précis et une meilleure protection des tissus sains du corps du patient, et donc une récupération plus efficace pour les enfants atteints de cancer. Selon le docteur Mithrâ Ghâlibâfiân, directrice du département de radiothéraphie de l’hôpital Mahak, cette machine est équipée d’un collimateur multilames. Elle permet donc de libérer des rayons de façon plus adéquate sur la tumeur. Cette machine est également équipée d’un dispositif EPID qui, avant chaque session, contrôle et garantit la précision de la zone traitée.

L’unité de radiothérapie, qui est ouverte douze heures par jour, a été mise en place en 2007 à l’hôpital de Mahak. Les patients adultes y sont également acceptés de façon périodique. Tous les patients sont traités avec des techniques précises. Bien que ce traitement soit indolore, l’enfant est obligé de rester immobile dans la salle de radiothérapie. Dans ces cas, l’anesthésie est souvent nécessaire pour les jeunes enfants. Il existe donc une coopération étroite entre ce service et le département d’anesthésiologie.

Au moment de l’ouverture du service de radiothérapie, en 2007, Odile Oberlin, médecin à l’Institut Gustave Roussy, partenaire français de la Fondation Mahak, écrivait : « Il y a malheureusement des problèmes presque insurmontables d’appareils de radiothérapie qui ne fonctionnent pas et qui attendent désespérément des pièces détachées et l’aide de techniciens venant d’Europe ». Qu’en est-il de ces problèmes aujourd’hui, ont-ils été réglés ou subsistent-ils encore en partie ?

Il y a actuellement deux machines utilisées dans l’unité de radiothérapie de Mahak. L’une a été installée en 2007, et l’autre en 2012. La préparation et la maintenance de ces équipements de radiothérapie nécessitent beaucoup de temps. Mais le fait que ces machines doivent continuer à être opérationnelles en toutes circonstances incite Mahak à une constante recherche de solution pour les faire fonctionner.

Combien d’enfants sont traités actuellement à l’hôpital chaque année ?

De mars 2012 à mars 2013, 5470 enfants étaient pris en charge par Mahak dans 27 hôpitaux publics et 16 villes à travers l’Iran.

Quelle est l’origine géographique des enfants traités. En plus des Iraniens, y a-t-il des enfants réfugiés d’Afghanistan et d’Irak, par exemple ?

Au cours des deux dernières décennies, l’organisation a réussi à fournir un soutien complet à plus de 19 000 enfants atteints de cancer de toutes nationalités, religions et groupes ethniques, tout cela ayant été financé exclusivement par les contributions généreuses de bienfaiteurs individuels ainsi que par des programmes de mécénat. Les enfants atteints de cancer dans d’autres pays tels que l’Azerbaïdjan, l’Afghanistan, l’Irak, la région du Kurdistan d’Irak, et certains pays africains ont accès à des soins et services aux patients similaires.

Quelle est la nature de l’aide matérielle (hébergement, transport…) et psychologique apportée aux enfants traités et à leur famille, qui viennent parfois de très loin à Téhéran ?

La section du travail social est l’une des subdivisions du département des services de soutien de Mahak qui, avec ses employés sociaux et ses 120 bénévoles, s’efforce de fournir un soutien matériel et moral aux enfants ainsi qu’à leurs familles. Leur rôle est notamment de fournir des conseils, une orientation et un soutien général lorsque les familles apprennent que leur enfant est atteint de cancer. Parmi ces aides, nous pouvons citer la fourniture d’informations et de sources médicales, des conseils et un soutien général aux familles tout au long des étapes de diagnostic et de traitement, l’information de la famille sur les particularités de la maladie de l’enfant et les méthodes de soins les plus efficaces, une aide aux familles ne parlant pas le persan, en leur fournissant un interprète de façon gratuite et des services de traduction, l’organisation régulière de programmes d’activités ludiques, l’ouverture d’une école et d’une bibliothèque pour les enfants hospitalisés, la mise en place d’une coopération avec des psychologues spécialisés dans le domaine du cancer pédiatrique, l’aide à la mise en place et au maintien d’une communication efficace entre l’équipe médicale et la famille du patient, le suivi des formes de traitement du patient, la facilitation des mécanismes de paiement pour les dépenses de soutien médical et non médical, l’aide aux familles en vue d’obtenir les aides publiques existantes dans des circonstances particulières telles que le chômage, la toxicomanie, etc., l’information des familles au sujet des services d’assurance et de couverture sociale, la fourniture des éléments nécessaires à la santé physique globale des patients comme la nourriture, un réfrigérateur, des vêtements d’hiver, etc., l’offre d’un lieu de séjour pour les familles des patients des régions rurales et provinciales, l’offre de services d’ambulance pour les enfants pendant le traitement…

Quels sont les partenaires de la Fondation ? De quelle manière ces partenaires interviennent-ils ?

Au cours des dernières années, Mahak a coopéré avec des organisations internationales spécialisées dans la question du cancer pédiatrique en vue d’adhérer aux normes internationales dans ce domaine, d’échanger des informations sur les meilleures pratiques, de mettre à jour le matériel médical… Dans ce but, Mahak est membre de l’Union for International Cancer Control (UICC), de l’International Confederation of Childhood Cancer Parent Organization (ICCCPO), de l’International network for cancer treatment and research (INCTR), de l’Institut Gustave Roussy (IGR), du Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, et a un statut consultatif au Conseil économique et social des Nations Unies.

Quels sont les projets pour l’avenir de la Fondation ?

Mahak projette actuellement de créer une unité de traitement de la douleur, de construire un deuxième bâtiment, de planifier et lancer une campagne de sensibilisation globale, notamment concernant la détection précoce du cancer, ou encore d’étendre le réseau de ses bureaux de soutien au niveau national. L’organisme a également pour projet de mettre en place un programme global de développement d’activités dans les pays voisins, incluant des services de traitement, de soutien, ainsi que de formations de spécialistes dans ces pays.

* Médecin et directeur général de Mahak


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