N° 97, décembre 2013

Les trésors des photographies anciennes


Mohammad Rezâ Tahmâsbpour
Traduit par :

Babak Ershadi


Les photographies anciennes nous apprennent beaucoup sur l’histoire des évolutions de l’art photographique en Iran, mais elles sont aussi de précieux instruments dans les recherches en sciences humaines et sociales. Depuis l’entrée de la technique de la prise d’images par l’action de la lumière sur une surface sensible il y plus de 160 ans, des collections très riches et variées de photographies historiques ont été rassemblées en Iran. Malgré leur grande valeur, ces collections n’ont guère fait l’objet d’une documentation générale ou d’une étude appliquée permettant aux chercheurs de différentes disciplines de s’en servir facilement. Pire, ces anciens documents photographiques sont souvent gardés dans de mauvaises conditions où l’état de conservation semble aléatoire.

Groupe de théâtre de ta’zieh à Téhéran, en vêtements de ta’zieh

Depuis son arrivée en Iran sous la dynastie des Qâdjârs, la photographie a connu d’importantes évolutions en Iran. Des trésors de photographies anciennes ont été constitués au fur et à mesure par des collectionneurs ou dans des familles, mais il s’avère aujourd’hui plus nécessaire que jamais qu’un organe public se charge, sous la direction des responsables de la protection du patrimoine culturel et historique, de l’élaboration et de l’application des mesures qui s’imposent pour conserver ces trésors photographiques.

Les albums du Palais du Golestân

Les albums du Palais du Golestân à Téhéran constituent sans doute la plus grande collection de photographies anciennes en Iran. Cette collection, qui réunit une série exceptionnelle de documents sur l’histoire de la photographie et du cinéma iraniens, compte plus de mille albums et rassemble près de 40 000 photos. Les collections du Palais du Golestân permettent de connaître les évolutions de la photographie en Iran depuis le début du règne de Nâssereddin Shâh (1831-1896) jusqu’au début du règne des Pahlavis. Depuis quelques années, les conservateurs du musée du Palais du Golestân établissent des catalogues des œuvres photographiques du palais, et leur travail a déjà permis aux chercheurs de mieux connaître les origines de l’art photographique en Iran. Cette opération de conservation se réalise en deux étapes.

La première étape est celle de l’identification de plus de 7500 plaques de verre qui doivent être comparées avec les clichés existant dans les albums. Les premiers inventaires sont à établir selon l’ordre numérique des albums, les noms des photographes, l’état physique des pièces et le taux des dommages subis par les plaques. À cette étape, les spécialistes développent une copie des clichés. L’opération comprend plusieurs tâches :

- la réorganisation des négatifs copiés des photographies existantes ;

- le tirage des microfilms et des microfiches de tous les albums ;

- la préparation des catalogues des albums pour faciliter le travail des chercheurs et empêcher les contacts physiques avec les originaux ;

- l’établissement d’un album des copies d’épreuves sélectionnées par les conservateurs du musée ;

- le changement de la numérotation des albums anciens en fonction de la dimension des épreuves ;

- l’identification des albums fortement endommagés ;

L’identification de plus de 2000 plaques de verre sans numéro pour établir leur inventaire ;

- le tirage des diapositives en 135 mm des photographies sélectionnées.

La deuxième étape de l’opération consiste à établir la documentation générale des albums de photographie du Palais du Golestân :

-le tirage des négatifs de toutes les pièces ;

- le tirage des diapositives d’une sélection de photographies ;

- le tirage des microfiches de toutes les épreuves ;

- l’établissement d’une collection numérisée de toutes les photographies pour faciliter le travail des chercheurs ;

- la classification, l’archivage des pièces et l’établissement de catalogues.

En attendant la fin des opérations, le Palais du Golestân n’offre que des services limités aux chercheurs, et leur remet une copie des clichés si nécessaire. Les publications du musée du Palais du Golestân ont édité certaines photos sous forme de carte postale. Jusqu’à présent, trois livres, consacrés aux débuts de l’art photographique en Iran, ont été publiés pour présenter les collections photographiques du palais. Le Palais du Golestân organise à diverses occasions des expositions saisonnières de ses archives photographiques.

Premier atterrissage d’une montgolfière sur la place Mashgh à Téhéran, époque qâdjâre

Les archives de la Documentation nationale

Les archives de l’organisation de la Documentation nationale constituent la deuxième grande collection de photographies historiques d’Iran. Ces archives, fondées en 1970, comptent aujourd’hui plus de 100 000 clichés de photographies historiques de l’époque du règne de la dynastie des Qâdjârs jusqu’à nos jours ; les clichés de l’époque des Qâdjârs représentant naturellement une partie limitée de ces archives.

Une partie de ces archives a été constituée grâce au don de photos par des personnalités ou des particuliers. Ces collections privées sont conservées au nom des donateurs. Dans certains cas, la Documentation nationale achète les collections privées. La plus grande collection achetée par cette organisation est celle de la famille Nobakht. Il s’agit d’une série de photographies de personnalités politiques et culturelles contemporaines. L’écrivain Mohammad Ali Jamâlzâdeh a fait don, lui aussi, d’une collection composée de clichés très intéressants. Rahmatollah Pâkzâd, lui, a fait don d’une collection remarquable de photographies datant de l’époque de la dynastie des Pahlavis. En outre, plusieurs photographes professionnels ont donné à la Documentation nationale une copie ou l’original de leurs archives personnelles. Les clichés catalogués des archives de la Documentation nationale dépassent le nombre de 41 000, dont 13 000 sont à la disposition des chercheurs. Les archives photographiques de la Documentation nationale sont classifiées d’après leur importance historique : A) documents classifiés « très importants », B) documents classifiés « importants », C) documents classifiés « ordinaires ».

La classification des documents photographiques est confiée à un groupe d’experts de la Documentation nationale. Cette organisation est équipée de laboratoires spécialisés pour conserver les documents photographiques dans un bon état, et restaurer les clichés endommagés. Pour identifier les facteurs biochimiques qui abîment les clichés, il faut d’abord procéder à la culture de ces facteurs en laboratoire, pour connaître ensuite leurs propriétés chimiques, afin de choisir les méthodes appropriées pour les éliminer.

Photographie prise par le roi qâdjâr Nâssereddin Shâh, lors d’une tournée nationale, dont on dit qu’il rapporta 33 photographies.

Depuis plusieurs années, les experts de la Documentation nationale préparent les catalogues des documents photographiques de leurs archives, qui remontent à l’époque de la dynastie qâdjâre. Dans ce cadre, plusieurs projets de recherches et thèses universitaires ont été consacrés à ces collections.

Les archives du Centre de documentation de l’Université de Téhéran

Depuis de longues années, la bibliothèque centrale de l’Université de Téhéran a établi des archives de documents photographiques dont une partie est une copie des albums anciens du Palais du Golestân. Le professeur Iraj Afshâr a publié Gandjineh-e aks-hâyeirân (Le trésor de la photographie iranienne) pour cataloguer et commenter ces copies. Mais cette collection comprend aussi des originaux achetés, il y a longtemps, aux grandes familles ou aux antiquaires de Téhéran et de la province :

- les photographies anciennes de plusieurs villes dont Kermân, Ispahan, Yazd, Hamedân et Téhéran ;

- une collection de paysages et de sites naturels ;

- une collection de 4 000 clichés de personnalités politiques et culturelles ;

- une collection de 5 000 clichés de différentes cérémonies à l’Université de Téhéran ;

Une collection de 2 000 clichés de la famille de Sardâr Assad Bakhtiyâri, qui représentent les divers aspects de la vie des tribus nomades Bakhtiyâri, et les images de leurs grands hommes depuis la Révolution constitutionnelle et la prise de Téhéran au début du XXe siècle. Les archives photographiques du Centre de documentation de l’Université de Téhéran ont fait l’objet de plusieurs livres et de catalogues, mais malheureusement, ces archives se trouvent actuellement dans un mauvais état en raison de leur mode de conservation traditionnelle.

Mozzafareddin Shâh Qâdjâr en 1901 dans sa première automobile achetée en Belgique en 1900

Les archives de l’Institut de recherche de l’Histoire contemporaine

Les archives photographiques de l’Institut de recherche de l’Histoire contemporaine ont commencé leurs activités en 1986. Ces archives comptent des documents photographiques de l’époque qâdjâre jusqu’à nos jours. Elles conservent aussi de nombreuses photographies exceptionnelles de la famille Pahlavi. Une grande partie de ces archives est constituée par des photographies collectées après la révolution islamique, dans les maisons et les bureaux des personnalités de l’ancien régime. La documentation méthodique de ces archives a commencé en 1988, et des catalogues thématiques ont été élaborés en plusieurs catégories historique, sociale, politique, culturelle,…

Les catalogues précisent le numéro de chaque photo, sa date et son thème. La documentation informatique et l’existence des copies numérisées de toutes les photos facilitent le travail des chercheurs. La conservation des archives photographiques de l’Institut de recherche de l’Histoire contemporaine ne comprend que des précautions physiques, et ce centre ne dispose pas encore de laboratoire équipé pour éviter l’endommagement des documents par des facteurs biochimiques ou pour restaurer les photographies endommagées.

Les révolutionnaires constitutionnalistes à Tabriz, début XXe siècle. Sur cette photographie, on voit notamment Sattâr Khân et Bâgher Khân, deux des chefs de la Révolution.

Sources :
- "Ashenâ’i bâ vâhed-e tasviri-e mo’asseseh-i motâle’ât-e târikh-e mo’âser-e irân" (Découverte de l’unité des documents visuels de l’Institut de recherche de l’histoire contemporaine iranienne), in : Faslnâmeh-ye Târikh-e mo’âser-e Irân (Revue de l’histoire contemporaine de l’Iran), 2e année, n° 2, été 1997.
- Sâfi, Ghâssem, Aks-hâye qadimi-e irân (Les anciennes photographies iraniennes), Téhéran, Éditions de l’Université de Téhéran, rééd. 1991.

- Afshâr, Iraj, Gandjineh-i aks-hâye irân (Le trésor de la photographie iranienne), Téhéran, Éd. Nashr Farhang Iran, 1989.


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