N° 117, août 2015

Nouvelles sacrées (XX)
Combat à l’est du Tigre


Khadidjeh Nâderi Beni


Suite aux victoires iraniennes lors de l’opération Kheybar [1] et la domination militaire de l’Iran sur les îles Madjnoun, l’armée irakienne monte plusieurs bases militaires suréquipées à l’est du Tigre (connu également sous le nom de la rivière de Dedjleh) pour empêcher toute attaque éventuelle contre les terres stratégiques du nord de Bassora, ainsi que sur la route Bassora-Al-Amâreh. En outre, cette région, qui fait partie d’une vaste étendue connue sous le nom de Hour, est fortement gardée par les obstacles défensifs déployés par les forces irakiennes. Ces positions défensives sont étendues sur une superficie de plus de 800 km2 et composées entre autres de digues, de remblais et canaux, de champs de mines, de pièges explosifs, de casemates, etc.

Les militaires iraniens planifient, eux, une opération visant à s’emparer de l’intégralité de la région Hour et de confirmer ainsi la domination iranienne à l’est du Tigre. Il s’agit de l’opération Badr planifiée et menée conjointement par l’armée et le Sepâh iraniens. En outre, cette opération a pour but de prendre le contrôle de la route stratégique Bassora-Al-Amâreh pour enfin pouvoir menacer les lignes de communication ravitaillant l’armée irakienne. On vise par ailleurs à briser quelques ponts irakiens dont le pont en béton Djobayr qui facilite l’accès des Irakiens à la route Bassora-Al-Amâreh. Les expériences acquises par les militaires iraniens lors de l’opération Kheybar leur permettent de prendre les mesures nécessaires pour cette nouvelle opération. D’ailleurs, la prise des îles de Madjnoun facilite l’avancée iranienne vers les objectifs prévus. La zone opérationnelle se situe à l’est du Tigre dans une vaste étendue (près de 1000 km2) s’étendant de Torâbeh au nord jusqu’à Al-Ghorneh au sud. La région abrite de riches ressources pétrolières et jouit de ce fait d’une importance économique pour le gouvernement irakien.

Selon la carte de l’opération, les attaques sont lancées depuis deux axes distincts : l’axe nord-est confié à la base de Nadjaf, tandis que la base de Karbalâ s’occupe de l’axe sud. Il est à souligner que l’Iran subit alors des sanctions militaires et financières et qu’il manque donc d’équipements nécessaires pour appuyer l’opération ; quant à l’armée irakienne, elle dispose d’excellents équipements militaires et jouit d’une grande puissance à la fois offensive et défensive.

Opération Badr

L’opération débute le 10 mars 1985. Durant les premières heures de l’opération, les troupes 8 et 31 de la base de Karbalâ parviennent à pénétrer les lignes défensives de l’ennemi et après avoir franchi le deuxième obstacle défensif composé d’un vaste champ de mines, elles avancent vers les côtes est du Tigre. La brigade 44 enfonce de son côté la première ligne et arrive à faire exploser le pont Djobayr à 2 h du matin.

Quant à l’axe nord, les succès ne sont pas aussi importants : les combattants de la base de Nadjaf tombent dans plusieurs embuscades tendues par l’armée ennemie et cela rend difficile l’avancée des Iraniens vers les objectifs prévus. De ce fait, les troupes 5, 7 et 14 de cette base se concentrent uniquement sur les obstacles et à 3 h, elles arrivent à franchir les lignes défensives pour enfin pouvoir avancer vers les objectifs. La troupe 25, qui n’arrive pas à franchir les lignes avant le lever du soleil, est contrainte de se replier.

Le lendemain, dès l’aube, l’armée irakienne lance des contre-offensives qui aboutissent à la reprise de certaines régions occupées dont Al-Hoveydâ. La deuxième nuit, les unités d’infanterie de la base de Nadjaf pénètrent les troupes ennemies installées dans la région de Khandagh. En même temps, les unités de la base de Karbalâ s’avancent vers le sud de Djobayr et s’approchent de plus en plus du Tigre. Le deuxième jour, l’artillerie, les forces aériennes et les divisions blindées de l’Irak s’engagent afin de lancer une vaste contre-offensive. Au sud de la zone opérationnelle, l’armée irakienne arrive à reprendre la région d’Al-Hâleh, mais elle n’y demeure que quelques heures, confrontée à une résistance farouche des combattants iraniens.

Sur l’axe nord, les chasseurs irakiens bombardent certaines unités de la base de Nadjaf mais n’arrivent pas à percer les lignes iraniennes installées dans cette zone. Durant les troisième et quatrième jours, la troupe de Karbalâ arrive à percer les lignes irakiennes de l’est du Tigre ; après avoir détruit le pont Abou’arân, elle prend position dans cette région et renforce sa défense face aux contre-attaques irakiennes. Les combattants iraniens parviennent par ailleurs à prendre le contrôle de tous les villages de la région Hour, y compris Torâbeh, Nahravân, Khandagh, etc.

Dès son arrivée, l’Iran installe une base militaire à l’est du Tigre, au voisinage de la route Bassora-Al-Amâreh, afin de remettre en cause la sécurité de cette route stratégique. Les combattants iraniens parviennent également à conquérir la forteresse Bârlou où ils font plus de 3000 prisonniers. Dans l’ensemble, 500 km2 de terres irakiennes sont occupées lors de cette opération. Enfin, l’armée irakienne cède et abandonne la zone opérationnelle. Durant cette opération, l’Irak subit d’importantes pertes : près de 14 000 soldats irakiens sont tués, blessés et capturés ; en outre, 250 chars, près de 100 obusiers, 200 véhicules, 6 avions du type Mig, et 4 hélicoptères sont anéantis.

C’est durant cette opération que Mehdi Bâkeri [2], l’un des commandants du Sepâh, tombe en martyre.

Source :
- Amiriân, Mohammad, Seyri dar târikh-e djang-e Irân-Arâgh (Aperçu sur l’Histoire de la guerre Iran-Irak), 5 vol., Téhéran, Centre des études et recherches de la Guerre, 1367/1988.

Notes

[1Voir notre article « L’opération Kheybar » publié in La Revue de Téhéran, n° 102, mai 2014, consultable sur : http://www.teheran.ir/spip.php?article1893

[2Voir notre article « Les frères Bâkeri » publié in La Revue de Téhéran, n° 112, mars 2015, consultable sur :http://www.teheran.ir/spip.php?article2038


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