N° 122, janvier 2016

Nouvelles sacrées (XXV)
Khorramshahr,
de l’occupation à la libération
(2ème partie)


Khadidjeh Nâderi Beni


Le 22 octobre 1980, en réaction à la lenteur de la prise de la ville, le bataillon 112 de l’armée irakienne est expédié dans la région pour appuyer les unités opérationnelles. Le lendemain, l’Irak y envoie également des forces de la Garde Frontalière afin de surveiller les terres conquises. Le 24 octobre, le plan de l’attaque finale visant à l’occupation totale de Khorramshahr est mis en œuvre. Une quarantaine de défenseurs iraniens se hâtent donc vers la rue Arash, où se concentre l’attaque, pour bloquer la percée irakienne, mais après 48 heures d’affrontements violents, leur manque d’équipements et de munitions les force à rompre le combat. Beaucoup sont alors tombés et les survivants se voient contraints de se replier.

A minuit, le commandant Mohammad Djahân Arâ [1] expédie un groupe de combattants dans la rue Arash en vue de ralentir l’avancée de l’ennemi qui se rapproche du bâtiment de la préfecture. Cette résistance ne se prolonge que pour quatre heures en raison du manque cruel d’équipements auquel s’ajoute l’épuisement des défenseurs. Peu après, la division blindée irakienne franchit la rue Arash et atteint l’édifice de la préfecture.

Commandant Mohammad Djahân Arâ

Avec la conquête de cet édifice, l’occupation irakienne de Khorramshahr est totale. Sur les autres fronts, l’armée d’occupation impose également sa supériorité militaire. Le pont de Khorramshahr est également complètement détruit par des bombardements irakiens.

Le 25 octobre, de violents combats éclatent autour de la Mosquée Djâme’. Face à la gravité de la situation, les chefs de la résistance ordonnent aux résistants iraniens d’évacuer la ville noyée sous d’intenses bombardements de l’aviation irakienne. Suite à l’évacuation de la ville, les Irakiens prennent finalement le contrôle de Khorramshahr. A partir de cette période, la ville est rebaptisée Khouninshahr par les Iraniens, ce qui signifie « la ville de sang ». Il est à ajouter que suite à cette victoire, l’armée irakienne arrive à affirmer sa supériorité militaire dans d’autres villes de la province du Khouzestân dont Abâdân, Dezfoul, ou encore Suse.

Deux mois plus tard, l’Iran tente de lancer des contre-offensives en vue de repousser les Irakiens hors du sud de l’Iran, mais ces tentatives restent sans succès en raison du manque d’équipements. Parmi d’autres contre-offensives, on peut citer l’opération Nasr (la victoire) déclenchée le 1er janvier 1981 à l’ouest de Dezfoul ou encore celle de Tavakkol (Confiance en Dieu), déclenchée le 3 janvier 1981 au nord-est d’Abâdân.

Cependant, avec le temps, l’Iran parvient à restaurer sa puissance militaire et élaborer des stratégies pour la reprise de son territoire occupé. Ainsi, dès fin septembre 1981, l’Iran lance une série d’opérations victorieuses qui s’achèvent par la libération d’une partie du sud de l’Iran, dont la majeure partie du territoire du Khouzestân. Ces opérations se déroulent selon l’ordre chronologique suivant : 1)24-27 septembre : Sâmen-ol-A’emmeh [2] (le huitième Imâm) qui met fin au siège d’Abâdân ; 2) 29 novembre-7 décembre : Tarigh-ol-Ghods [3] (la voie de Jérusalem) qui aboutit à la libération de Bostân et Soussanguerd ; 3) 22-28 mars 1982 : Fath-ol-Mobin (la victoire indéniable) qui s’achève par la libération de Dezfoul et de Suse ; 4) 24 avril-22 mai : l’opération Bayt-ol-Moghaddas (Jérusalem) qui s’achève par la libération complète de Khorramshahr.

Photos : ville de Khorramshahr pendant l’occupation

Suite à la victoire décisive des combattants iraniens lors de l’opération Fath-ol-Mobin, la plupart des experts militaires irakiens redoutent une autre opération iranienne d’envergure destinée à reprendre Khorramshahr et de ce fait, l’armée irakienne fortifie hâtivement ses bases installées dans cette ville. Les experts irakiens ne se sont pas trompés et le projet iranien se concrétise le 24 avril, avec le lancement de l’une des plus vastes opérations de toute l’histoire de la Défense sacrée : celle de Bayt-ol-Moghaddas. Cette opération terrestre se déroule pendant près d’un mois, en quatre phases.

-Première phase : quelques jours avant le commencement de l’opération, les commandants vérifient l’ensemble des préparatifs : plus de 70 000 hommes sont positionnés aux points prévus et restent en état d’alerte jusqu’au lancement de l’opération. Selon le plan de l’opération, les combattants des bases Nasr, Fath et Ghods sont mobilisés. Le 29 avril à une heure du matin, les attaques sont lancées de façon synchronisée à partir de plusieurs axes. Dès le début des attaques, les unités opérationnelles de la base de Fath arrivent à prendre le contrôle de la route Ahvâz-Khorramshahr. Au sud du fleuve Karkheh, les combattants de la base Ghods brisent les lignes défensives de l’ennemi pour s’emparer de cette région. A l’ouest du fleuve Kâroun, les forces de la base Nasr et les troupes irakiennes positionnées sont engagées dans de violents combats qui mènent à la libération par les Iraniens de plus de 800 km2 des terres occupées. Suite à cette vaste offensive iranienne visant à rompre l’encerclement de Khorramshahr, l’armée d’occupation se voit obligée de se positionner défensivement.

À suivre…

Source :
- Amiriân, Mohammad, Seyri dar târikh-e djang-e Irân-Arâgh (Aperçu sur l’Histoire de la guerre Iran-Irak), 5 vol., Centre des études et recherches de la Guerre, Téhéran, 1367/1988.

Notes

[1Né en 1954 à Khorramshahr, Djahân Arâ fut l’un des premiers et des grands noms du Sepâh qui tomba en martyre lors d’un crash d’avion le 29 septembre 1981.

[2Voir notre article « La fin du siège d’Abâdân », n° 104, juillet 2014, consultable sur : http://www.teheran.ir/spip.php?article1918

[3Voir notre article « L’opération Tarigh-ol-Ghods », n° 111, février 2015, consultable sur : http://www.teheran.ir/spip.php?article2019


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