N° 174, hiver 2021

La grande inscription de Shâpour Ier à Naqsh-e Rostam


Parham Ebrahimi


Le site Naqsh-e Rostam : la « Kaaba de Zoroastre » (à gauche) se situe devant les tombeaux rupestres des grands rois achéménides.

Shâpour Ier (Sapor Ier, en latin) est le deuxième roi des rois de la dynastie des Sassanides (224-651 apr. J.-C.) et régna de 240 à 270 sur l’empire fondé en 224 par son père Ardashir Ier

En 262 de notre ère, à la vingtième année de son règne et après la troisième campagne qu’il mena contre les armées romaines, Shâpour Ier donna l’ordre qu’un document en trois langues soit gravé sur un monument de pierre datant de l’époque de la première dynastie perse de l’histoire de l’Iran, celle des Achéménides (559-330 av. J.-C.). 

Ce document, appelé la « Grande inscription de Shâpour Ier », offre un compte-rendu, à la première personne, des actions et des exploits du plus grand roi de la dynastie des Sassanides dès le début de son propre règne, en 242 (de 240 à 242, il partagea le trône avec son père Ardashir Ier) jusqu’à la date de la rédaction des inscriptions en 260. C’est la raison pour laquelle les auteurs européens mentionnent ce document sassanide sous le nom des « Res Gestæ divi Saporis » (Hauts faits du divin Shâpour) par analogie aux « Res Gestæ Divi Augusti », constituant le testament politique de l’empereur romain Auguste (27 av. J.-C.-14 apr. J.-C.).

Version en pahlavi parthe de la Grande inscription de Shâpour Ier (Res Gestæ divi Saporis) sur le mur de la « Kaaba de Zoroastre » à Naqsh-e Rostam.

La « Grande inscription de Shâpour Ier » compte en réalité trois inscriptions en trois écritures : pahlavi parthe, pahlavi sassanide (moyen persan), et grec. Les trois textes furent gravés sur deux murs d’une structure de pierre quadrangulaire située à Naqsh-e Rostam, une ancienne nécropole royale achéménide se trouvant au nord-ouest de Persépolis (dans la province actuelle du Fârs).

La « Kaaba de Zoroastre » pendant les fouilles archéologiques de 1970.

 

La Kaaba de Zoroastre

 

Le monument achéménide, appelé tardivement la « Kaaba de Zoroastre » (par analogie avec la Qibla des musulmans), est une tour en pierre qui faisait partie à l’origine d’un ensemble plus vaste en brique crue aujourd’hui disparu.

Cette structure en pierre quadrangulaire fait partie du complexe historique de Naqsh-e Rostam qui inclut des monuments commémoratifs et des tombes royales des Achéménides, mais comprend aussi des éléments plus anciens (des Élamites) et plus récents (des Sassanides).

La Kaaba de Zoroastre se situe à 46 mètres du rocher sacré de Naqsh-e Rostam et se trouve exactement en face du mausolée du neuvième empereur de la dynastie achéménide, Darius II (424-404 av. J.-C.). Le monument a une forme rectangulaire et ne compte qu’une seule entrée. Le matériau unique de la structure est le calcaire blanc. Il mesure environ 12 mètres de haut - 14 mètres si l’on inclut le triple escalier de base. Chaque côté de sa base mesure environ 7,30 mètres de long. La porte d’entrée mène, par un escalier en pierre de trente marches, à une chambre. Les morceaux de pierre, rectangulaires et simplement placés les uns sur les autres, sans utilisation de mortier, sont reliés les uns aux autres par des joints en queue d’aronde. La structure fut construite à l’époque achéménide au IVe ou au Ve siècle avant notre ère, ce qui veut dire que lorsque les inscriptions de Shâpour Ier y furent gravées, le monument était déjà vieux de sept ou huit siècles. Il n’existe aucune information sur le nom d’origine de la structure à cette époque achéménide. Nous savons pourtant qu’elle s’appelait Bon-Khânak (Maison de fondation) à l’époque sassanide. L’un des textes de Shâpour Ier indique : « Cette Maison de fondation vous appartiendra. Agissez de la meilleure manière pour gagner la satisfaction de nos dieux et servir notre but. » Le monument fut appelé tardivement la « Kaaba de Zoroastre » à l’époque islamique. Ce nom est utilisé depuis le XIVe siècle de notre ère.

Le complexe de Naqsh-e Rostam situé à six kilomètres de Persépolis (photographié en 1953).

Divers points de vue et interprétations ont été proposés concernant la fonction et l’utilité de la chambre de la Kaaba de Zoroastre, mais aucun d’entre eux ne peut être accepté avec certitude. Certains chercheurs considèrent la tour comme un temple du feu et une cheminée, et pensent qu’elle fut utilisée pour y allumer le feu sacré. D’autres spécialistes rejettent ce point de vue et le considèrent comme le mausolée d’un roi ou d’un prince achéménide, en raison de sa similitude avec le tombeau du fondateur de la dynastie des Achéménides, Cyrus le Grand (559-530 av. J.-C.), et certains mausolées des villes antiques de Lycie et de Carie au sud de l’Asie Mineure (faisant partie des possessions de la dynastie achéménide). D’autres érudits pensent que la chambre en pierre était le dépôt des documents royaux de premier ordre ou des livres religieux les plus importants de la cour achéménide. Cependant, la chambre de la Kaaba de Zoroastre semble être trop petite pour une telle fonction.

La Kaaba de Zoroastre fut sans doute construite aux débuts de l’ère achéménide : l’utilisation de la pierre noire était l’une des caractéristiques de l’architecture pasargadienne. Les points en queue d’aronde étaient utilisés principalement sous le règne de Darius Ier (522-486 av. J.-C.) et de Xerxès Ier (486-465 av. J.-C.), tout comme l’alignement des pierres dans les structures les plus anciennes de Persépolis. La porte et l’entrée de la structure sont similaires à celles des mausolées des empereurs achéménides, qui prirent tous pour modèle le mausolée de Darius Ier. Dans le complexe de Naqsh-e Rostam, la maçonnerie et l’absence de mortier ressemblent aux premiers édifices de Persépolis dont la construction commença sous le règne de Darius Ier

Un bas-relief élamite à Naqsh-e Rostam. Le site inclut des monuments commémoratifs et des tombes royales des Achéménides, mais comprend aussi des éléments plus anciens des Élamites.

Les premières illustrations de la Kaaba de Zoroastre furent réalisées au XVIIe siècle par des voyageurs européens comme le Français Jean Chardin (1643-1713), l’Allemand Engelbert Kaempfer (1651-1716) et le Néerlandais Cornelis de Bruijn (1652-1727) dans leurs récits de voyage. Le complexe de Naqsh-e Rostam, situé à six kilomètres de Persépolis, fut étudié et fouillé pour la première fois en 1923 par l’archéologue et iranologue allemand Ernst Herzfeld (1879-1948).

Naqsh-e Rostam vue par le voyageur français Jean Chardin lors de son voyage en Perse en 1723.

Mais pour la première description scientifique et les rapports de fouille, il fallut attendre jusqu’au XXe siècle lorsque l’archéologue allemand naturalisé américain, Erich Friedrich Schmidt (1897-1964), dirigea les fouilles de Persépolis de 1934 à 1939 pour la mission de l’Oriental Institute de l’université de Chicago. Les travaux importants de la mission de l’université de Chicago permirent aux experts d’effectuer des pas importants pour la compréhension de la grande inscription de Shâpour Ier, gravée sur la paroi de la Kaaba de Zoroastre.

 

La « Kaaba de Zoroastre » se situe juste en face du tombeau rupestre du neuvième empereur de la dynastie achéménide, Darius II (424-404 av. J.-C.).

Les inscriptions sassanides de Naqsh-e Rostam

 

Le 1er juin 1936, le département des fouilles archéologiques de l’Oriental Institute de l’université de Chicago annonça dans un rapport la découverte d’inscriptions antiques sur les murs de la Kaaba de Zoroastre à Naqsh-e Rostam. Le rapport précisait que les inscriptions appartenaient à l’empereur sassanide Shâpour Ier et à Kirtir, le « mobed mobedân » (prêtre suprême) zoroastrien du IIIe siècle de notre ère, contemporain de Shâpour Ier.

Les inscriptions de Shâpour Ier sont gravées sur pierre en trois langues : grecque (70 lignes), pahlavi parthe (30 lignes) et pahlavi sassanide (35 lignes) et sur trois côtés de la Kaaba de Zoroastre. L’inscription du grand mobed Kartir, qui compte 19 lignes, est en pahlavi sassanide (moyen persan) et se trouve en dessous de l’une des inscriptions de Shâpour Ier.

Le Zendan-e Soleiman (« prison de Salomon ») est un bâtiment dont la fonction reste discutée à Pasargades, site achéménide qui se trouve à quelque 70 kilomètres de route au nord-est de Naqsh-e Rostam. Selon des recherches archéologiques, le plan initial de la « Prison de Salomon » ressemblerait à celui de la « Kaaba de Zoroastre » à Naqsh-e Rostam.

Dans l’inscription de Shâpour Ier que certains historiens considèrent comme un manifeste de la « Révolution sassanide contre les Parthes arsacides », le texte commence par une présentation de Shâpour lui-même. Il s’agit d’une description généalogique assez détaillée : « Moi, Shâpour, adorateur de Mazda, roi des rois de Perse et d’ailleurs, descendant des dieux, fils d’Ardashir, lui aussi adorateur de Mazda, roi des rois de Perse et descendant des dieux, neveu du roi Bapak, je suis le seigneur de l’Iran-Shahr. »

Par la suite, Shâpour Ier mentionne les régions qu’il gouvernait :

« Et je possède ces pays : Perse [province du Fars], Pahlav [province du Lorestan], Khûzistân, Mishan [embouchure du Tigre et de l’Euphrate sur le golfe Persique], Assuristan [Mésopotamie], Nod-Ardakhshiragan [Mésopotamie], Arbayestan [Arabie], Adurbadagan [province d’Azerbaïdjan], Armen [Arménie], Virozan [Géorgie], Segan [Géorgie], Arran [Caucase], Balasagan [Caucase] jusqu’à la Porte des Alains [« Passe de Darial » entre la Géorgie et la Russie] ; mais aussi toutes les montagnes de Padishkwargar (provinces du Guilan et du Mazandéran), Mad [Médie], Gorgan [province du Golestan], Marv [Mari, Turkménistan], Harey [Hérat, Afghanistan], et tout Abarshahr [toutes les régions centrales de l’Iran] comme Kerman, Sakastan [province du Sistan], Turan [Asie centrale], Makran (province du Baloutchistan], Pardan [Parthie], Hind [vallée de l’Indus], Kushanshahr [Afghanistan], jusqu’à Pashkibur [Peshawar, Pakistan] et aux confins de Kashgaria [Kachgar, XInjinag], la Sogdiane [Ouzbékistan, Tadjikistan] et Chach [Tachkent, Ouzbékistan], et de l’autre côté de la mer jusqu’aux rivages de Mazonshahr [Bahreïn, Qatar, Émirats arabes unis, nord d’Oman]. J’ai donné le nom de Shâpour à une ville dont le nom est Pirouz-Shâpour [Victoire de Shâpour], comme mon père avait fait avec Ormisda-Ardashir. Sur toutes ces terres, souverains et gouverneurs me sont redevables du tribut et sont mes sujets. »

Le texte présente ensuite les trois campagnes victorieuses du grand empereur sassanide contre l’Empire romain.

Reconstruction du plan du Zendan-e Soleiman (« prison de Salomon ») à Pasargades.

 

Première victoire sur les Romains

 

Le fondateur de l’Empire sassanide, Ardashir Ier avait, vers la fin de son règne, renouvelé la guerre contre l’Empire romain. Son fils, Shâpour Ier, conquit à son tour les forteresses mésopotamiennes de Nisibe et de Carrhes (Turquie) et s’avança vers la Syrie romaine. En 242, les Romains, alors sous le règne de l’empereur Gordien III (238-244), se lancèrent contre les Sassanides avec « une énorme armée et une grande quantité d’or » (selon un document sassanide). Les Romains réussirent à envahir la Mésopotamie orientale, mais firent face à la résistance acharnée de Shâpour. L’empereur Gordien III nomma Philippe l’Arabe (futur empereur) à la tête de son armée. En 243, le jeune empereur fut tué sur le champ de bataille (ou assassiné par les Romains après sa défaite face aux Sassanides).

Reconstruction du plan de la « Kaaba de Zoroastre » à Naqsh-e Rostam.

Les Romains choisirent alors Philippe l’Arabe comme empereur. Philippe ne voulait pas répéter les erreurs militaires de Gordien III et devait retourner aussitôt à Rome pour pousser le Sénat à confirmer sa nomination en tant qu’empereur. Il conclut la paix avec Shâpour Ier en 244. Il accepta que l’Arménie soit dans la sphère d’influence de la Perse et paya une énorme indemnité aux Perses.

Shâpour mentionne cette victoire dans la grande inscription de la Kaaba de Zoroastre : « Quand, dans un premier temps, je montai sur mon trône et initiai mon règne, le César Gordien enrôla par-delà tout son empire une force composée de Goths, de Germains, et vint envahir toute l’Assyrie, marchant vers la Babylonie, contre le royaume des Parthes et contre nous. À la frontière de l’Assyrie, à Misiche [Falloujah, à 40 km de Bagdad] eut lieu une grande bataille rangée. Le César Gordien fut tué et les armées romaines furent détruites. Les Romains choisirent alors un nouveau César, un certain Philippe, qui vint à nous pour établir les termes de la paix, et pour obtenir la vie sauve des prisonniers. Il nous versa une somme de 500. 000 deniers et devint notre tributaire. Pour cette raison, j’ai décidé de renommer la ville de Misiche en Pirouz-Shâpour [Victoire de Shâpour]. »

 

Deuxième victoire sur les Romains

 

Shâpour Ier envahit la Mésopotamie en 250 et reprit l’invasion des territoires romains. Il anéantit une force romaine de 60 000 hommes à la bataille de Barbalissos en 252 (Syrie) et reconquit l’Arménie. Avec la conquête de la Géorgie et de l’Arménie, les frontières des Sassanides au nord furent ainsi sécurisées.

Un bas-relief sassanide de Naqsh-e Rostam représentant Shâpour Ier à cheval capturant l’empereur romain Valérien, et recevant l’hommage de l’empereur Gallien à genoux devant le souverain.

Lors de l’invasion de la Syrie par Shâpour, il prit d’importantes villes romaines comme Antioche. Shâpour Ier décrit cette deuxième victoire sur les Romains dans son inscription à Naqsh-e Rostam : « Mais César mentit à nouveau et fit du tort à l’Arménie. Puis, nous attaquâmes encore l’Empire romain et détruisîmes une force de 60 000 soldats à Barbalissos, tandis que nous ravagions la Syrie en brûlant et détruisant tout sur notre passage, prenant tout. Au cours de cette campagne, nous conquîmes de nombreuses forteresses et villes romaines : la ville d’Anatha [Anah, Irak] et ses alentours, Birtha [Tikrit, Irak], Sura [Irak], Barbalissos [Syrie], Hiérapolis [Manbij, Irak], Béroée, Chalcis [Qinnasrin, Syrie], Apamée [Turquie], Rhépania, Zeugma [Turquie], Ourima, Gindaros [Jindires, Syrie], Armenaza [Syrie], Séleucie [Turquie], Antioche [Turquie], Cyrrhus [Syrie], Alexandrette [Turquie], Nicopolis [Turquie], Sinzara, Chamath [Hama, Syrie], Ariste, Dichor [Syrie], Doliche [Dülük, Turquie], Doura Europos [Syrie], Circesium [Busayrah, Syrie], Germanicia [Kahramanmaraş, Turquie], Batnae [Suruç, Turquie], Chanar [Turquie], et en Cappadoce [Kapadokya, Turquie], Satala [Turquie], Domana, Artangil, Souisa, Phreata, pour un total de 37 villes et leurs faubourgs. »

Version en grec (détail) de la Grande inscription de Shâpour Ier (Res Gestæ divi Saporis) sur le mur de la « Kaaba de Zoroastre » à Naqsh-e Rostam.

 

Troisième victoire sur les Romains

 

L’empereur romain Valérien (253-260) marcha contre Shâpour en 257 et envahit Antioche et remit la province de Syrie sous le contrôle des Romains. La retraite rapide des troupes de Shâpour Ier conduisit Valérien à poursuivre les Perses à Édesse (Şanliurfa, Turquie), mais Valérien fut vaincu par les Perses et ce qui restait de l’armée romaine fut capturé par Shâpour. L’empereur fut envoyé à Pars pour y être emprisonné dans un palais à Bishâpour. Par la suite, Shâpour avança en Asie Mineure et réussit à capturer Césarée (Katseri, Turquie), déportant 400 000 de ses habitants vers les provinces du sud de l’Empire sassanide. Shâpour pilla les frontières orientales de la Syrie et retourna dans sa capitale Ctésiphon, vers la fin de 260.

La victoire sur Valérien est présentée dans un bas-relief à Naqsh-e Rostam, où Shâpour est représenté à cheval portant une armure royale et une couronne. Devant lui, un homme en habit romain s’agenouille et demande grâce : il s’agit de Valérien, empereur des Romains. Selon la tradition chrétienne, le païen Valérien, tristement célèbre pour la persécution des chrétiens, fut humilié, torturé et brutalement tué sur ordre de Shâpour.

La localisation des inscriptions de Shâpour Ier sur les murs de la « Kaaba de Zoroastre ».

La grande inscription de Shâpour Ier à Naqsh-e Rostam décrit en ces termes la troisième victoire de l’empereur sassanide sur les Romains : « Durant la troisième invasion, nous marchâmes contre Édesse [Şanliurfa, Turquie] et Carrhes, et nous les assiégeâmes, tant et si bien que le César Valérien fut obligé de marcher contre nous. Il avait avec lui une force de 70 000 hommes comprenant les nations de Germanie, Rhétie [Suisse et Autriche], Norique [nord du Danube], Dacie [Roumanie], Pannonie [Hongrie], Mésie [Balkans], Thrace [Balkans], Bithynie [Asie Mineure], Asie [Asie Mineure], Pamphylie, Isaurie, Lycanie, Galatie, Lycie, Cilicie, Cappadoce, Phrygie [Asie Mineure], Syrie, Phénicie [Liban], Judée [Palestine], Arabie [Jordanie], Maurétanie [Algérie], Lydie [Asie Mineure], Mésopotamie. Une grande bataille fut livrée entre Carrhes et Édesse entre nous et Valérien, et nous le capturâmes, faisant de lui notre prisonnier de nos propres mains avec d’autres généraux de l’armée de Rome, notamment son préfet du prétoire, des sénateurs et autres officiels. Tous ceux-là, nous les fîmes prisonniers et nous les déportâmes en Perse [province du Fars]. En outre, nous brûlâmes, dévastâmes, et saccageâmes la Syrie, la Cilicie et la Cappadoce. Au cours de cette troisième campagne, nous primes à l’Empire romain les villes de Samosate [Turquie] et ses alentours, la cité d’Alexandrie [Asie Mineure] et ses alentours, Katabolon, Aigeai [Yumurtalik, Turquie], Mopsuestia [Yakapinar, Turquie], Mallos [Kiziltahta, Turquie], Adana [Turquie], Tarse [Turquie], Zéphyrion [Turquie], Sébastè, Corycos, Agrippiada, Castabala, Néronias, Flavias, Nicopolis, Célendéris, Anémurium, Sélinus, Myonpolis, Antioche, Séleucie, Calycadnum, Domitiopolis, Tyana, Césarée, Comana , Cybistre, Sébastia, Birtha, Rhakoundia, Laranda, Iconium [Asie Mineure]. Toutes ces villes et leurs alentours sont au nombre de trente-six. »

La « Kaaba de Zoroastre ».

Colonies des prisonniers romains

 

Après avoir décrit ses trois victoires successives sur les armées romaines, Shâpour Ier explique le sort des prisonniers militaires et civils de ces guerres. Ces individus furent transférés en différents endroits de l’Empire sassanide et installés dans des colonies. Shâpour souligne ensuite que ses trois victoires sur les Romains n’étaient qu’une partie de ses exploits et grandes actions dont beaucoup ne sont pas relatés dans cette inscription :

« Les hommes venus des terres des Romains furent conduits comme prises de guerre en Perse, Parthie, Khûzistân, Assuristan [Mésopotamie] et dans d’autres terres où des colonies avaient été établies par moi, par mon père et par mes ancêtres. Par moi, bien d’autres terres furent prises, de nombreux actes de renommée et de bravoure furent accomplis, qui ne sont pas relatés ici. Ces hauts faits écrits ici le furent pour que tout un chacun se rappelle la gloire et la bravoure de mon règne. » 

Plan général de Naqsh-e Rostam : Les tombeaux rupestres achéménides marqués I-V, et les bas-reliefs sassanides marqués 1-8.

 

Les fondations religieuses et la noblesse

 

Dans la partie suivante de la grande inscription gravée sur la Kaaba de Zoroastre, Shâpour Ier énumère longuement les sacrifices et les dons qu’il accorda aux fondations religieuses, ainsi que la liste des temples de feu qu’il établit à son nom, au nom de ses proches et au nom de ses ancêtres. 

Il évoque ensuite une longue liste de la noblesse et des notables sassanides de l’époque de son grand-père Bâbak, de son père Ardashir (fondateur de la dynastie) et de son propre règne. Ces deux listes d’œuvres pieuses et de la noblesse du début du règne de la dynastie des Sassanides offrent de très précieuses informations aux historiens dans divers domaines. 

Conclusion

 

La conclusion de l’inscription de Shâpour Ier est un texte plus ou moins testamentaire. Il souligne que pendant son règne, il se soumit aux dieux en politique et religion en se qualifiant de « main au service des dieux » (dastgerd des dieux). Il demande ensuite à ses successeurs d’appliquer la même politique et la même pratique religieuse pour que les dieux fassent aussi d’eux leurs « dastgerds ». Le texte mentionne à la fin le nom du scribe : « À ce jour, je m’applique dans les affaires et dans les choses religieuses pour les dieux, et je suis le dastgerd des dieux, et j’ai acquis et possédé avec l’aide des dieux ces si nombreux territoires et acquis gloire et bravoure, et que quiconque viendra après moi devra s’appliquer lui-même à son tour dans les affaires religieuses pour les dieux, pour que les dieux lui viennent en aide et fassent de lui leur dastgerd. Ceci fut écrit de ma main par Hormezd le scribe, fils de Silag le scribe. »


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