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Arg-é Bam est le nom persan de la citadelle de la cité historique de Bam, qui fut l’un des plus beaux exemples d’édifice urbain de l’Iran préislamique, à l’instar de Persépolis. Vieille de près de deux mille ans, la forteresse de Bam constituait un riche témoignage de la vie des iraniens sous différentes époques de l’histoire, chacune de ses briques en reflétant les divers événements. En décembre 2003, un tremblement de terre ravagea cette merveille historique, détruisant ce vaste champ de rêves et de gloires passées. Ainsi, il y a deux mille ans, les iraniens construisirent ce diamant au coeur du désert iranien de Dasht e-Kavir. Arg-é Bam ressemblait jusqu’alors à un colosse sur lequel le temps n’aurait eu aucun effet. Des siècles passèrent en effet sans affecter ce chef d’œuvre, jusqu’au tremblement de terre.
Après avoir traversé des régions arides et pauvres, le voyageur pouvait s’étonner de trouver cette ville splendide et florissante en plein cœur du désert. Plus précisément, Bam est située à la lisière sud du haut plateau iranien, dans la province de Kermân. Les origines de Bam remontent à la période achéménide (VIe au IVe siècle avant J.-C.). La ville a longtemps constitué une étape majeure sur le sud de la Route de la Soie, mais perdit ce statut avec l’essor du transport mécanisé au début du XXe siècle. Elle s’est développée dans une oasis créée essentiellement grâce à un ancien système de gestion des eaux souterraines (qanât), qui demeure toujours en fonction. Le paysage culturel de Bam est un exemple typique de développement d’un peuple marchand où se marient diverses influences dans l’environnement désertique de l’Asie centrale1.
Le terme Arg signifie "citadelle imprenable ". On attribue la construction d’Arg à Bahman. Certains historiens affirment ainsi que le mot Bam vient du nom Bahman. Cependant, une autre école avance la thèse selon laquelle Bam signifierait " La hauteur".
Arg-é Bam est la citadelle qui protégeait la ville historique de Bam. D’une superficie de 200 km2, cette fortification est située à l’intérieur de l’ancienne ville et est accolée à la nouvelle qui porte le même nom. La citadelle d’Arg-é Bam, patrimoine culturel de l’Iran, est la plus grande construction en pisé au monde. Elle est le meilleur exemple des constructions urbaines de l’Iran préislamique. Son histoire remonte à plus de 2000 ans, c’est-à-dire à la période parthe. Cible de nombreux sièges et invasions, la citadelle a été détruite puis reconstruite à plusieurs reprises. La dernière fois fut à l’époque safavide (XVIe-XVllle siècle). La citadelle fut abandonnée par ses habitants une première fois en 1722, à la suite d’une invasion afghane puis de nouveau en 1810, lors de son pillage par des guerriers provenant de Chirâz. Jusqu’à environ il y a 200 ans, elle fut considérée comme la demeure et l’abri des citoyens de Bam. Depuis une soixantaine d’années, on avait même installé la préfecture de la ville dans sa caserne.
Dans les années trente, le gouvernement iranien fit restaurer la citadelle pour en permettre la visite. Chaque année, des milliers de passionnés d’histoire venant de tout l’Iran et du monde entier avaient pour coutume de visiter ce chef d’oeuvre de l’architecture persane. Le silence sourd qui régnait alors sur la citadelle rendait perceptible le bruit qui agitait la ville abritant pourtant près de 8000 personnes.
En entrant dans la citadelle, le visiteur se retrouvait plongé dans une ambiance tout à fait insolite : l’atmosphère était celle des temps anciens, aucune trace de modernité n’étant perceptible. Arg-é Bam ressemblait à une grande forteresse médiévale de style européen. Sa particularité première résidait dans le fait qu’elle fut bâtie de brique et non de pierre. La citadelle possédait deux grandes tours espacées de presque 40 mètres, construites il y a environ cinq siècles. Elle était entourée, dans sa partie sud, par quatre murailles. L’une d’entre elles avait une hauteur de 18 mètres, et était destinée à protéger les habitants des bandits de grands chemins2. En pénétrant dans la citadelle, les ruines du quartier urbain nous apparaissaient dans un premier temps : le bazar, une centaine de maisons, le Takiyé (place où s’effectue la commémoration de l’Imam Hossein), la grande mosquée, l’école de Mirza Naeem, le caravansérail, les bains publics, le Zourkhâneh (maison de sport). Chaque partie de ce quartier nous indiquait les moeurs et coutumes de la population urbaine. Lorsque l’on gravissait les marches vers la partie haute de la citadelle, on arrivait au quartier des gouverneurs. On y trouvait alors plusieurs annexes militaires, le palais des quatre saisons (Tchahâr Fasl) et la Maison des Seigneurs, où logeaient les gouverneurs. Le toit de la citadelle offrait une splendide vue sur des paysages de désert qui ravissaient autrefois tant les gouverneurs et souverains de la ville. Les ruelles étroites de la citadelle préservaient ses habitants de la chaleur extérieure. Des pièces avaient été construites de manière à pouvoir conserver la neige tombée en hiver à l’utiliser au moment voulu sous forme d’eau potable pour les habitants de la ville. Un profond et large fossé entourait la citadelle. En temps de guerre, celui-ci était rempli d’eau de façon à barrer la route de la forteresse aux ennemis.
Le 26 décembre 2003, à 5 heures du matin, la terre trembla durant 12 secondes avec une extrême violence. Le séisme qui toucha Bam et ses environs fit 40 000 victimes et laissa 75 000 personnes sans abri. Son épicentre se trouvait exactement sur le site de la citadelle de Bam qui, en quelques instants, fut réduite en un amas de poussière et de ruines. La vieille ville d’Arg-é Bam fut entièrement dévastée. Cette citadelle historique, joyau national considérée comme la plus vieille construction en brique d’argile existant au monde, n’existe dorénavant plus. C’est toute une histoire qui disparaît et des coutumes qui ne seront plus retranscrites…
Aujourd’hui, beaucoup de personnes se mobilisent pour sauver Arg-é Bam de l’oubli. Malgré les décombres et le spectacle de désolation provoqués par le tremblement de terre, la cité millénaire commence à envisager sa reconstruction.
Sources :
1. Tohidi, Mahmood, Arg-nameh, Editions Markaz-é Kermânshénasi, Kermân, 2002. 2. Razavi Nik- khoo, Nosrat-al-sadat, Asr-é chour angiz-é Bam, Editions Markaz-é Kermânshénasi, Kermân, 2003. |