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Quelques poèmes de Thierry Cabot

30 décembre 2019, 23:56, par Julien

Cher Guillaume, je crois qu’il faut savoir raison garder : tel dithyrambe est inconsidéré, et révèle, soit que vous êtes peu familier des plus grands poètes du XXe siècle, ou que vous percevez mal en quoi ils sont si grands et pourquoi la postérité les a consacrés.

Que Thierry Cabot soit un poète respectable de par ses vers de bonne tenue, son inclination à varier les formes, sa volonté de ne pas déshonorer la poésie et le travail que réclame composer dans les règles de l’art, c’est entendu. Pour autant, et quoique sa poésie soit en effet meilleure que les innombrables nullités publiées aujourd’hui dans cette catégorie, il est loin de posséder un talent comparable à Hugo, Baudelaire, Mallarmé, de Nerval, Lamartine, Verlaine, Rimbaud, Valéry et consorts. À vrai dire, il lui manque certaines des qualités les plus essentielles qui le classe même en dessous de poètes plus secondaires tels que Gautier, Banville, Vigny ou Leconte de Lisle ; à savoir le sens de l’analogie pertinente, la solidité logique, la puissance rhétorique, l’œil du peintre (soit la capacité à bien faire voir), en somme, l’esprit d’éloquence et la singularité de vue.
Si bien sûr on trouve deci-delà dans sa poésie de beaux vers ou quelque strophe mémorable, le fait est plutôt rare. Le plus souvent, dominent des assemblages impersonnels de jolis mots interchangeables, sans que jamais les objets convoqués ne soient vraiment circonscrits ni sublimés, laissant le lecteur avec des images incomplètes sans conséquence pour les sens et l’esprit, empli de vague et du sentiment que ça rime pour rimer, que ça rythme et chante localement sans concourir à l’harmonie d’une vision et d’une pensée riches et pénétrantes. Bref, des poèmes un peu fades et carencés qui ont justement beaucoup à envier à ceux des grands poètes du XIXe. Je ne suis pas le seul, parmi les lecteurs avertis, à penser cela... Même si, j’insiste là-dessus, j’ai mille fois plus de respect pour la démarche de Cabot que pour celle des centaines d’indécrottables jean-foutre qui inondent la toile de pathétiques incontinences.

Quant à Thomas Fallet, on croirait lire toujours le même poème tant il semble tourner en rond sur lui-même dans l’expression d’une noirceur et d’une amertume obsessionnelles qui frise le ridicule. Là aussi, la force rhétorique de bon aloi et le don de peintre font défaut. C’est terriblement lénifiant et assez faible techniquement (même la ponctuation est à revoir en bien des endroits) ; un habitué de Baudelaire et Mallarmé n’y verra que de mauvais pastiches. L’hermétisme n’a pas vocation à être indéchiffrable. Or, chez lui, on a beau lire et relire, l’énigme demeure entière. Pourquoi ? Parce qu’il n’y a pas de véritables images à la clé. Et comme j’arrive à plutôt bien comprendre la poésie d’un Valéry (réputé obscur et que je défends auprès des plus réfractaires), mais que je ne parviens à débrouiller celle de Thomas Fallet, j’en conclus que le second est défaillant.

J’invite chacun à rouvrir les recueils des grands poètes du XIXe. Si vous ne voyez pas le gouffre qualitatif qui les sépare de Thierry Cabot et de Thomas Fallet, eh bien ! je suis au regret de vous annoncer que vous ne savez pas lire la poésie et n’êtes pas apte à en juger.

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