N° 65, avril 2011

Bref aperçu de l’histoire de la province Markazi et de sa capitale, Arâk


Monireh Sadat Borhani


Situation géographique de la province Markazi

Ancien plan d’Arâk
Vue de la ville d’Arâk
Photos : Omid Jafarnejâd

La province Markazi, qui couvre une aire de 29 406 km², est limitrophe des départements de Téhéran et de Ghazvin au nord, d’Hamedân à l’ouest, du Lorestân et d’Ispahan au sud et de Qom à l’est. Ses villes principales sont Arâk, Sâveh, Mahallât, Khomeyn, Tafresh [1], Ashtiyân, Delidjân [2], Shâzand (Sarband), Komidjân [3] et Zarandieh [4]. Cette province se situe à l’est de l’intersection des chaînes de montagnes d’Alborz et de Zâgros. Son relief est essentiellement constitué d’une partie des montagnes du centre de l’Iran et des parties intérieures des montagnes de Zâgros.

Vue de la plaine Bâzeneh et du village Hafteh Emârat

Ses parties les moins élevées sont les plaines aux sud et à l’est de Sâveh qui se situent à 500-1000 m d’altitude, et son point culminant est le sommet de Râsvand qui culmine à 3 342 m. Il est situé dans la chaîne de montagne de Râsvand, au sud-ouest d’Arâk.

Maison ancienne appartenant à la famille Mohseni, Arâk

Le climat

Le climat de cette province est montagneux, semi-aride, tempéré et froid. Cette province est sous l’influence de la pression des courants de l’Océan Indien, de l’Océan Atlantique et des courants méditerranéens qui amènent humidité et pluie. Le sud, le sud-est et les régions du nord-ouest de la province (Khomeyn, Mahallât, Shâzand) ainsi que le nord et le nord-est de Sâveh bénéficient du climat tempéré montagneux du Zâgros oriental. D’autres villes comme Tafresh, Ashtiyân et le nord d’Arâk sont situées dans une région semi-aride.

Plafond Tchahâr Sough, bazar d’Arâk

Cette diversité climatique entraîne l’existence de divers taux d’humidité et de précipitations inégales dans les différentes villes de la province. Dans la zone montagneuse, il y a souvent des chutes de neige, tandis qu’il pleut régulièrement dans les zones situées à une altitude plus basse. Le nord de la province, c’est-à-dire essentiellement la région de Zarand, connaît les plus faibles précipitations tandis que Shâzand, située à une altitude plus élevée, connaît des précipitations abondantes. La meilleure période pour voyager dans cette province est d’avril à juin.

Femme en train de tisser un tapis à Sârough

Histoire et culture

Selon des sources historiques, l’ancienneté de cette province remonte aux Mèdes [5], au 1er millénaire av. J.-C. Cette province faisait alors partie de l’un des Etats de l’Empire mède. Durant l’ère des Séleucides [6], on retrouve dans cette région, et plus particulièrement dans sa partie nord (dont le village de Khorheh), des traces de la présence des Grecs. Pendant le règne du roi sassanide Khosrow Parviz, la Perse fut divisée en quatre parties : le nord, l’est, le sud, et l’ouest. La province Markazi actuelle était alors située à l’ouest. Durant la période islamique, le nom de cette région fut changé en "province de Djebâl" ou "de Ghohestan". L’ensemble de la région avec Hamedân, Rey et Ispahan était aussi appelée l’Irak-e-Ajam. Au IVe siècle de l’Hégire (XIe siècle), Khorheh devint l’une des villes célèbres de la province de Djebâl.

Le fatir

Un peu plus tard durant ce même siècle, Tafresh devint un centre urbain célèbre, puis à sa suite les villes de Khorheh et de Khomeyn. Ces villes connurent un essor encore plus important quelques siècles plus tard, durant la période safavide. Sous la dynastie qâdjâre, la ville d’Arâk commença à se développer.

Grappes de raisin accrochées au mur afin de les faire sécher et obtenir ainsi des raisins secs
Photo : Hossein Abolhassani

Au cours du XXe siècle, grâce à l’expansion du chemin de fer, la construction de plusieurs usines et d’importantes unités de production, l’industrie de cette ville se développa considérablement. En raison des nouvelles divisions administratives du pays et de la formation de la province de Téhéran, le nom de cette province fut changé en province "Markazi" ("centrale"), et Arâk devint sa capitale.

Sarâ-ye Nozari, bazar d’Arâk

De nombreuses personnalités scientifiques, culturelles, des poètes ainsi que des politiciens sont originaires de la province Markazi. On peut ainsi citer les noms de Fakhr-od-Din Arâghi, Adib-ol Mamâlek Farahâni, Mirzâ Abol Ghâsem Ghâem Maghâm Farahâni, Abbâs Eghbâl Ashtiyâni, Mirza Taghi Khân Amir Kabir, le professeur Mahmoud Hessâbi, Mohammad Mehdi Foulâdvand, l’Imâm Khomeyni, l’Ayatollâh Arâki, l’Ayatollâh Nour-ed-Din Hosseini,…

Statue de Hallâj et de ses contemporains, Musée de Hammâm-e Tchahâr Fasl

Arâk [7]

Située à 284 kilomètres au sud-ouest de Téhéran et à une altitude de 1830 mètres au-dessus de niveau de la mer dans la plaine de Farâhân, sur le bord du massif de Zâgros, Arâk compte environ 521 166 habitants [8].

L’école historique de Sepahdâri

A l’origine, Arâk était un petit village appelé Dastgerdeh ou Dastdjerdeh. Au début de la dynastie Zand [9], plusieurs villages et forteresses furent construits dans cette région (au sud d’Arâk actuel). En 1223 de l’Hégire (1808), Mohammad Youssef Khân Gordji construisit un château à proximité de ces villages, sur une base régulière avec de nombreuses tours, qui fut notamment utilisé comme base d’entraînement et de modernisation de l’armée perse.

Maison de Hassanpour

La ville de Arâk se développa pendant le règne de Fath’ali Shâh Qâdjâr et s’appelait alors « Soltân Abâd ». En 1837, elle fut rebaptisée "Arâk". On donne plusieurs significations différentes au nom Arâk, notamment "les jardins" ou encore "les bosquets".

Skier dans la montagne d’Astâneh

Jusqu’en 1891, Arâk fut essentiellement une ville militaire servant de base pour des généraux. Cependant, durant le règne de Mirzâ Hassan Khân, cette ville perdit graduellement son statut militaire pour devenir une ville commerciale et industrielle.

Fête du nouvel an (Norouz) à Arak, 2010

Lors de la Première Guerre mondiale et à la suite du déclin de la dynastie qâdjâre, Sâveh, Soltân Abâd, et les régions voisines furent occupées par les forces russes. Après cela, Arâk connut d’importantes transformations tout au long du XXe siècle. Elle bénéficia notamment de l’arrivée du chemin de fer et de la ligne Ahvâz-Téhéran qui passe par la ville. En 1977, Arâk fut choisie comme capitale de la province Markazi, statut qui attira l’implantation de nombreuses entreprises.

Montagne de Mowdar

La vieille ville d’Arâk comptait quatre portes : la porte de Shahrjerd à l’est, la porte de Râzân au nord, la porte de Hâj Alinaghi à l’ouest et la porte de Ghebleh au sud. Selon les statistiques du livre Iranshahr [10], Arâk avait une population de 51 000 personnes en 1942. A partir de cette époque, et comme d’autres villes de l’Iran, Arâk connut une période de paix et de stabilité qui favorisa son développement. Les murs de protection de la ville furent alors retirés. Son statut de ville-transit pour le transport des marchandises fut aussi l’un des facteurs importants du développement de cette ville, avec notamment la ligne de chemin de fer Téhéran-Khuzestân qui traverse la ville. Pendant les années de guerre, d’importants dépôts de carburant et d’eau y furent stockés.

Vallée de Gerdou, Arâk

Actuellement, après Tabriz et Ispahan, Arâk est l’une des principales villes industrielles de l’Iran, et compte de nombreuses entreprises ayant un rôle important dans l’industrie du pays telles que l’Entreprise d’aluminium d’Iran (IRALCO) [11], Vâgonpârs Co. [12], Mashin Sâzi-e Arâk [13], Azarâb [14], HEPCO [15], Pétrochimie d’Arâk [16], Navard-e Aluminium (laminage d’aluminium) [17] , etc.

Les produits de l’agriculture les plus importants dans cette ville sont le blé, l’orge, le raisin, les légumes et les noix.

Imâmzâdeh Shâhzdeh Mohammad Abed à Mashhad-e Meyghân, Arâk
Imâmzâdeh Zolfâbâd, Arâk

Artisanat et souvenirs

L’artisanat traditionnel de la province Markazi comprend essentiellement des tapis et des tapis fins. Les tapis les plus célèbres sont tissés à Sârough [18]. Le guélim (kilim), le djâdjîm (tapis de laine tissé de manière lâche) et le guiveh (type de chaussures tissées) font partie des autres produits de l’artisanat local. Parmi les souvenirs les plus caractéristiques figurent le fatir [19] le bâslogh [20], les raisins secs, le shireh (suc de raisin) et le savon local.

Imâmzâdeh Ahangarân, Arâk

Principaux monuments historiques d’Arâk

-Le château de Hadj Vakil fut l’un des bâtiments qui fut employé en tant qu’usine de tissage de tapis par la société suisse Zigler. Actuellement, seul un quart des parties résidentielles de cette construction est resté.

-Le Musée de Hammâm-e Tchahâr Fasl (hammâm des Quatre Saisons), date de la période qâdjâre et est devenu le musée anthropologique de la province. La structure du musée est très intéressante en ce qu’il est situé à quelques mètres au-dessous du niveau de la terre, comme tous les vieux hammams traditionnels qui utilisaient l’eau souterraine.

-De par son ancienneté, son architecture et sa structure unique, le bazar d’Arâk est considéré comme l’un des plus anciens monuments historiques de la ville. Sa construction, essentiellement en brique, a commencé à l’époque qâdjâre. Des tissus, tapis et objets artisanaux locaux y sont vendus.

-L’école historique de Sepahdâri date de la période qâdjâre et sa construction coïncide avec celle du bazar sur l’ordre de Sepahdâr A’zam. Son style est partiellement inspiré de la période safavide, tandis que ses tuiles sont plutôt de style qâdjâr. Ce bâtiment contient une mosquée, un réservoir d’eau contenant une bordure et un bassin en pierre au milieu de celui-ci. Cette école fut l’un des centres scientifique, culturel et religieux du pays. Certaines grandes personnalités telles que l’Imâm Khomeyni, l’Ayatollâh Golpaygâni, l’Ayatollâh Arâki et d’autres ont étudié les sciences religieuses dans cette école.

Mausolée de Nour-od-Din Erâghi, Arâk

En empruntant le premier passage (en persan : gozar) à gauche de l’école de Sepahdâri, après tchahâr sough [21] du bâzâr, on peut admirer Khâneh-ye Hassanpour (la maison de Hassanpour), vielle maison dotée d’une belle architecture.

-L’école de Samsâmi Bayât qui a instruit des générations de jeunes étudiants d’Arâk et d’autres régions de l’Iran.

Arâk compte également plusieurs monuments religieux tels que le mausolée de Aghâ Nour-ed-Din Arâghi, l’Imâmzâdeh Zolfâbad, l’Imâmzâdeh Ahangarân, le mausolée de Shâhzâdeh Mohammad Adeb à Mashhad-e Meyghân, l’Imâmzadeh Haftâdo-do-tan, l’Imâmzâdeh Ja’far ebn ’Ali et le mausolée de Pir-e Morâd.

Imâmzâdeh Ja’far ebn ’Ali et Fazl ebn Ja’far, Arâk

Loisirs à Arâk

En hiver, on peut passer quelques heures à la montagne Sorkheh située à Shahrak-e Gerdou (Cité de Gerdou), ainsi qu’à la montagne Modar pour les sports d’hiver. Shahr-e Bâzi Lâleh (parc d’attraction de Lâleh), Sofreh khâneh-ye Kouhestân (la maison de café traditionnelle du Kouhestân), le parc d’Amir Kabir, le parc Djanguali, le parc zoologique et Sarâ-ye Mehr [22] (sérail du Soleil) font également partie des attractions de la ville d’Arâk.

Imâmzâdeh Haftâd-o-do tan, Arâk

Bibliographie :
- Dehgân, Ebrâhim, Târikh-e Arâk (Histoire d’Arâk), tome I, 1914.
- http://www.markazitourist.ir
- http://arak.ir
- http://markazidaily.com

Notes

[1La ville de Tafresh était auparavant connue sous le nom de « Tabres » et « Gabresh ». La ville de Farâhân, située à proximité de Tafresh, a une longue et riche histoire. Tafresh se situe au nord de la ville d’Arâk.

[2La ville de Delidjân a un long passé historique : elle fut une grande ville comprenant quatre portes et qui s’étendait jusqu’au village actuel de Khorheh.

[3Komidjân, l’une des villes de la province Markazi, se situe à 96 km de la ville d’Arâk. Le village de Vafs dépend de cette ville.

[4Zarandieh est l’une des villes les plus récentes de la province Markazi. Elle est située à proximité de Sâveh, au nord de la province. Elle a été considérée administrativement comme une ville indépendante en 2004.

[5Les Mèdes étaient un peuple de l’Iran ancien, voisin des Perses, qui vivaient dans le nord-ouest de l’actuel Iran, au sud de la mer Caspienne, au 1er millénaire av. J.-C.

[6Les Séleucides étaient une dynastie hellénistique et successeurs d’Alexandre le Grand qui régnèrent jusqu’au IIe siècle avant J.-C. sur Babylone et la Mésopotamie, dans la continuité des Achéménides.

[7Dehgân, Ebrâhim, Târikh-e Arâk (Histoire de Arâk), tome I, 1914.

[8Source : Statistique Arâk, Recensement de la population, 2006.

[9Les Zands régnèrent sur la Perse de 1750 à 1794.

[10Irânshahr est un livre encyclopédique qui traite notamment des aspects politiques, sociaux, culturels et économiques des villes d’Iran. En 1955, le projet de son écriture a été adopté durant la 62e session de la commission nationale de l’UNESCO. Il a ainsi été rédigé avec la coopération de l’Université de Téhéran et du Ministère des Affaires étrangères et de la Culture de l’Iran. Les auteurs avaient en vue d’examiner l’ensemble de l’histoire de l’Iran. Irânshahr est compilé en deux volumes.

[11IRALCO est la première usine de production de lingots d’aluminium en Iran.

[12Le plus grand fabricant de matériel roulant, Wagon Pars Co. tut fondé en 1974 et a commencé à fabriquer différents types de matériel roulant en 1984. L’usine est située dans une zone de 33 hectares aux alentours d’Arâk.

[13Cette usine, fondée en 1967, est l’un des grands producteurs de matériaux utilisés dans l’industrie du pétrole, de gaz, de pétrochimie, des mines…

[14Les activités de Azarâb Co. se composent essentiellement de la construction de centrales thermiques, d’usines de ciment, de pétrole, de gaz et de pétrochimie, de centrales électriques...

[15HEPCO s’occupe essentiellement de l’assemblage et de la production d’équipements pour la construction de routes. Avec ses filiales et en collaboration avec ses partenaires mondiaux, il est actif dans la production, l’approvisionnement et le soutien de l’exploitation minière ainsi que la construction de routes visant à la mise en place de projets industriels.

[16La Pétrochimie d’Arâk a été fondée en conformité avec les politiques générales adoptées pour le développement des industries pétrochimiques, à la fois pour répondre aux besoins nationaux du pays et exporter des produits.

[17Fondée en 1972, l’usine de laminage d’aluminium est située près d’Arâk. Elle produit notamment des rouleaux laminés à chaud, des tôles et feuillards laminés à froid, des produits laminés à chaud, des tubes d’irrigation etc.

[18Sârough, village situé à 50 kilomètres au nord d’Arâk, est le lieu de tissage d’un tapis d’un style unique en Iran reconnu au niveau national et international pour sa qualité.

[19Le fatir est une sorte de pâtisserie faite avec de la farine, du sucre, des œufs et d’autres ingrédients et qui se cuit au four.

[20Le bâslogh est une sorte de pâtisserie faite d’amidon, de sucre, de cardamome, d’eau de rose, de noix et de beurre.

[21Tchahâr sough, qui signifie "quatre allées", est un lieu situé au centre du bazar d’Arâk.

[22Sarâ-ye Mehr, un ancien caravansérail, est situé au sein du bazar d’Arâk en vue de faire connaître l’artisanat de la province au public.


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