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Rûmî est né à Balkh dans le grand Khorâssân iranien (l’antique Bactres de l’Empire achéménide, aujourd’hui en Afghanistan) en 1207 (604 de l’Hégire), mais il dut quitter sa ville natale avec sa famille à l’âge de 14 ans. Les raisons de ce départ, variant d’un hagiographe à l’autre, sont attribuées soit à la contestation des habitants de la ville à propos du titre de Sultan des savants donné à son père, le grand érudit Bahâ-ud-Dîn-Walad, théologien et prédicateur éminent, soit à un différend entre celui-ci et le philosophe attitré du roi, ou encore à la fuite devant le danger que représentait alors l’avancée des hordes mongoles parcourant la steppe, ou peut-être une accumulation de tous ces événements. De fait, la ville de Balkh fut détruite par Gengis Khan peu après que Rûmî l’eût quittée.
Après être passés par Neyshâbour (où Rûmî rencontre le grand poète mystique Attâr), La Mecque, Bagdad, ils s’installèrent à Konya, dans l’Empire ottoman, à l’invitation du sultan Key Ghobâd, comme de nombreux Persans fuyant les hordes mongoles. Son père meurt dans cette ville, alors que Rûmî n’a que 24 ans. Un an plus tard, il suit l’enseignement de Termazi, grand théoricien de Konya qui l’envoie étudier à Alep et à Damas afin d’y parfaire ses connaissances philosophiques et théologiques. C’est à Damas qu’il rencontrera pour la première fois le derviche Shams Tabrizi, qui transformera sa vie en faisant de lui un mystique extatique.
Le collège où Rûmî, docteur en théologie, enseigne jurisprudence et loi islamiques, est fréquenté par de nombreux disciples. A 36 ans, on commence à l’appeler Mowlânâ, notre maître. Son érudition attire à Konya les plus illustres savants du monde dit civilisé.
On rapporte que c’est au cours de sa retraite de quarante jours en compagnie de Shams Tabrizi à Konya qu’il se met à tournoyer à la manière des derviches tourneurs et apprend à jouer du luth. « Plusieurs voies mènent à Dieu, j’ai choisi celle de la musique et de la danse », écrira-t-il. C’est en tout cas après cet épisode décisif de sa vie qu’il fonda la tarîqa mawlawiya ou confrérie mevlevi.
Comme Rûmî l’avait souhaité, Hessâmeddin Tchalabi, son disciple dès l’adolescence, devient son successeur spirituel lorsqu’il décède en 1273. C’est Hessâmeddin qui écrira et mettra en forme le Masnavi, la grande œuvre de Rûmî, tandis que celui-ci lui en récitait les poèmes. Guidant la communauté fondée par son maître, Hessâmeddin fit en sorte qu’elle continue à respecter les idées et les principes du défunt. Quand Hessâmeddin meurt à son tour en 1284, Soltân Walad, fils aîné de Rûmî, devient le sheykh des Mevlevi : il organise ses disciples en un ordre soufi véritable avant que son propre fils, Aref Tchalabi, ne lui succède en 1312. Une chaîne de successions directes rattache le maître actuel de la Mawlawîya à ses prédécesseurs.
Après la mort de Rûmî, l’ordre des mevlevis connaît une ascension notable sous la protection des sultans seldjoukides et ottomans, se déployant jusque dans le monde arabe et les Balkans. Il cultive la poésie persane (Rûmî s’exprimait et écrivait en persan), la musique, la calligraphie, et codifie ses cérémonies, dont la danse, dans ses tekke - ou monastères derviches - des principales villes de l’empire.
La progression spirituelle du soufi mevlevi s’inscrit dans le cadre d’une retraite de mille et un jours consistant en périodes de silence, d’isolement en cellule, d’étude et de corvées domestiques. Ce temps de formation s’accomplit en grande partie dans la cuisine du monastère, lieu hautement initiatique, où le novice est lentement mené à maturité spirituelle. Il s’initie à la musique et à la danse, à la lecture du Masnavi, au zikhr (invocation répétitive des noms divins) et à la méditation. Cette initiation est clôturée par une cérémonie d’investiture qui fait du novice un sheikh. On lui remet alors deux attributs symboliques, le manteau (le souf) et la coiffe rituels. Il peut ensuite choisir entre une vie de célibataire au monastère ou une vie de famille à l’extérieur, tout en restant lié à sa communauté, cas d’exception dans l’histoire du soufisme.
Pour les Mevlevis comme pour un certain nombre de confréries soufies [1] au Proche et Moyen-Orient ainsi qu’au Maghreb, la musique et la danse constituent un rite majeur. Certains ordres préfèrent l’ascèse et le silence et se limitent à la lecture psalmodique à voix haute du Coran ou de poèmes ; d’autres, au contraire, ont créé de véritables rituels de musique, où les hymnes coraniques et les litanies mystiques alternent avec des méditations instrumentales. La plus originale des coutumes est la pratique du samâ’, danse circulaire au cours de laquelle le danseur tourne sur lui-même, l’âme étant la cause des mouvements du corps comme Dieu est le moteur de la danse des mondes. Ce rituel, codifié à l’origine par la confrérie mevlevi, a fait donner à ses membres le nom de derviches tourneurs.
Le samâ’ est considéré par les Mevlevis comme une danse d’amour et de mort qui arrache le soufi aux contingences du monde matériel pour l’attirer vers Dieu. Elle est aussi une leçon de cosmologie mystique, une danse des mystères qui enseigne comment suspendre la distance entre la créature et son Créateur, en voyageant et en remontant, sur le mode circulaire, le long des sphères du monde manifesté jusqu’au point de l’Unicité divine. C’est ce que la chorégraphie veut suggérer par ses cercles ascendants et descendants. L’accompagnement musical des flûtes, des percussions et des luths se veut un chant d’amour et de douleur [2]
Quand Rumî meurt, non seulement tous les habitants de Konya prennent le deuil mais, comme son fils Soltân Walad l’a rapporté, des individus de toutes confessions assistent à ses funérailles - Rûmî et ses disciples considéraient que la réalité profonde (haqiqat) des religions était unique.
Le mausolée édifié au-dessus du tombeau de Rûmî attire depuis cette époque d’innombrables visiteurs : des gens de toutes conditions – d’humbles hères aussi bien que des chefs d’Etat – viennent s’y recueillir, le dargâh (mausolée) adjacent de l’ordre mevlevi recevant d’importantes offrandes. Sous le règne de Soliman le Magnifique (1520-1566), un samâkhâneh (salle cérémonielle où les tournoiements sacrés sont exécutés) fut bâti à côté de ce mausolée abritant également les tombes du père de Rûmî et de ses successeurs immédiats ; puis des cellules pour derviches furent ajoutées à cette salle, de nouveaux dons permettant de fonder d’autres dargâh en Anatolie et ailleurs.
Cet édifice est devenu musée en 1925, année où Atatürk interdit aux ordres derviches turcs de poursuivre leurs activités. De nos jours, la confrérie mevlevi est toujours présente à Konya et participe à la gestion du musée. Elle organise les cérémonies annuelles à connotation religieuse mais édulcorées par un chapiteau touristique très fréquenté avec musique et samâ’. Des cérémonies de commémoration ont lieu chaque année autour du 17 décembre, date anniversaire de la mort de Rûmî, en présence des membres de la confrérie mevlevi ainsi que des officiels locaux et nationaux. Des commémorations ont lieu également à la même période de l’année à Istanbul.
La visite des cellules, de l’immense cuisine et de l’ancien samâkhâneh de ce musée permet de comprendre à quel point les novices soufis étaient soumis à un rude entraînement, s’exerçant à danser pendant les mille et un jours que durait leur noviciat, pour devenir membre à part entière de la confrérie mevlevi.
Le musée possède une très riche bibliothèque portant le nom d’Abdülbâkî Gِlpinarli (1900-1982), écrivain stambouliote, qui fut l’enseignant principal en titre de la doctrine consacrée auprès de la confrérie mevlevi. Abdülbâkî Gِlpinarli a légué à cette bibliothèque tous les précieux ouvrages qui lui appartenaient, ainsi que de magnifiques yazi (calligraphies enluminées) qu’il conservait dans son yali (maison traditionnelle en bois) située à ـsküdar, quartier d’Istanbul situé sur la rive asiatique du Bosphore, où son fils, Yüksel Murat Gِlpinarli, continue à superviser la réédition de l’ensemble des ouvrages de son père.
Après la dissolution des confréries soufies en Turquie en 1925, la tradition mevlevi se perdit. Des spectacles de danse sont autorisés en 1954, mais à titre de manifestation folklorique uniquement. Les danseurs qui se produisent aujourd’hui en Turquie et dans le monde entier incarnent davantage un art qu’une spiritualité, seule l’épreuve du noviciat des mille et un jours fait le soufi. Dorénavant, de nombreuses loges soufies, qu’elles soient turques, syriennes ou autres, s’adressent à un public plus large, mêlant volontiers cérémonial religieux et représentation artistique.
Lucile et Eric, amis français résidant en Turquie, ont assisté au printemps dernier à un rituel mevlevi dans le tekke (loge derviche) Karaba•-i Veli de Bursa, ville située sur la côte sud de la mer de Marmara. Voici leur témoignage, emblématique du regard ambivalent porté par le public contemporain sur ces cérémonies :
« Il existe à Bursa une loge de derviches tourneurs. Historiquement, les adeptes de la voie mevlevi étaient influents dans l’empire Ottoman. Ils devaient toutefois choisir entre une position dans l’administration officielle et un poste de responsable de l’organisation. L’ordre fut déclaré hors la loi en 1925 lors de la laïcisation de l’Etat turc malgré tout le respect qu’Atatürk pouvait avoir pour l’ordre, et ce afin de ne pas créer d’exception. Graduellement à partir de 1950, l’ordre put reprendre officiellement ses activités et racheter les bâtiments qui lui avaient été confisqués. La cérémonie de la Semâh (samâ’) a été classée au patrimoine culturel immatériel de l’humanité en Turquie, selon le classement de l’UNESCO.
Nous avons rejoint la Mevlevi khâneh bien avant le début de la cérémonie. Une foule de femmes avec enfants et quelques hommes étaient assemblés dans la bonne humeur, assis sur des chaises, les adultes buvant du thé, les enfants mangeant une glace. 30 minutes avant le début, les femmes se sont déplacées vers la salle située à l’étage, de façon à occuper les bonnes places. Les hommes sont arrivés entre 15 minutes avant jusqu’à 10 minutes après le début de la cérémonie. Ils ont occupé tout l’espace central ainsi que tous les podiums latéraux.
La cérémonie a débuté par une prière suivie de commentaires de points théologiques par le shaykh (sheikh ou maître spirituel) en réponse à des questions qui lui étaient adressées sur papier libre. Les thèmes traités concernaient la valeur de l’écoute et la qualité de l’islam dans la vie quotidienne. Malgré mon niveau limité en turc, les paroles cinglantes entendues, le silence révérencieux de l’assemblée lors du prêche et l’attitude contrite des fidèles montraient que le message était bien reçu.
Je n’étais pas très à l’aise, enfermé dans cette petite salle, entouré de plus d’une centaine de personnes avec qui je ne pouvais pas échanger, sentant la tension monter, les énergies se galvaniser au fur et à mesure que les décibels montaient. Aucun signe de cessation des hostilités ne pointait à l’horizon après 30 minutes de discours enflammé. Au détour d’une phrase bien sentie, le prêche s’est conclu par une prière puis la salle s’est vidée en très peu de temps pour laisser place à la cérémonie. La musique l’accompagnant était rythmée, scandée par des ténors accompagnés du ney, des tambours, clochettes, cithares et autres luths. Le contraste entre le prêche et la danse est si important que l’on sent l’esprit de la célébration.
La symbolique de la cérémonie est très forte. En tournant sur eux-mêmes, les derviches reproduisent le mouvement des électrons autour du noyau de l’atome, des planètes du système solaire et entrent en harmonie avec le cosmos donc Dieu lui-même. Le danseur tourne d’abord lentement puis très rapidement, jusqu’à ce qu’il atteigne une forme d’extase, durant laquelle il déploie les bras, la paume de la main gauche dirigée vers le ciel dans le but de recueillir la grâce d’Allah, celle de la main droite dirigée vers la terre pour l’y répandre.
D’un point de vue religieux, l’islam orthodoxe réfute catégoriquement les agissements des derviches, assimilés à des innovations religieuses. Leurs pratiques ne sont pas recommandées et plus ou moins tolérées. Ayant posé, le lendemain, la question à mes collègues turcs, j’ai vu que je touchais un point sensible parce que lié à la religion mais aussi parce qu’il n’est pas facile de se positionner par rapport à cela. Un collègue a essayé de m’expliquer poliment les choses en me précisant que l’acte de foi était sans doute important pour les pratiquants mais était considéré par la majorité de la population comme une « richesse culturelle », un peu comme le French Cancan dans l’image de la France : le touriste apprécie mais le local a du mal à résumer sa personne à cette seule image... Ce cérémonial soufi restera pour nous une expérience très émouvante, d’autant que nous étions les seuls étrangers parmi des centaines de personnes présentes en raison de leurs convictions religieuses.
A mon tour (Lucile) de prendre la plume pour vous raconter l’ambiance à l’étage supérieur, celui des femmes : Pour réussir à voir quelque chose, il faut être situé au premier rang, dans cette petite salle, ce qui explique pourquoi les femmes vont s’installer beaucoup plus tôt que les hommes (qui eux sont situés au rez-de-chaussée et qui voient bien, même s’ils ne sont pas au premier rang). Isabelle, Louise, Adélie et moi sommes parties nous installer alors que toutes les places du premier rang étaient déjà prises. Nous avons fait une première tentative pour nous asseoir mais nous ne nous sommes pas senties bien accueillies. Nous avons tout de suite changé d’emplacement, où l’accueil a été complètement différent. Dès que les dames ont su que nous étions étrangères, elles ont spontanément laissé passer les enfants devant et se sont démenées pour que mon amie Isabelle et moi ayons un tabouret pour nous asseoir (alors que nous leur expliquions que nous n’en avions pas besoin).
Ensuite, pendant la prière puis la cérémonie, l’ambiance fut beaucoup plus dissipée qu’à l’étage des hommes. Les portables sonnaient et les femmes répondaient, en essayant de parler discrètement, mais bon quand-même ! Une femme pleura pendant la prière. Ensuite une autre prit un film pendant toute la cérémonie, et avant la fin, elle avait filmé toutes les personnes autour d’elle, nous comprises, en demandant à chacune de sourire. A un moment, l’une des femmes s’est fortement penchée par-dessus le balcon pour regarder le religieux qui officiait. »
Dès leur origine, les cérémonies soufies ont inspiré et inspirent encore de nos jours un grand nombre d’artistes. Les peintres dits orientalistes n’ont pas manqué de représenter ce thème. Parmi d’autres, le Français Jean-Léon Gérôme a signé, à la fin du XIXe siècle, sa toile très remarquée, intitulée Derviche Tourneur. De belles séries de gravures, de miniatures et de peintures, anciennes ou contemporaines, représentant des derviches tourneurs, continuent d’être régulièrement exposées, en Turquie ou ailleurs, comme récemment dans l’enceinte de Sainte-Sophie à Istanbul, devenue successivement, au fil de l’Histoire, basilique, puis mosquée et enfin musée.
Ziya Azazi, danseur et chorégraphe turc, s’est consacré, depuis plusieurs années, à la danse traditionnelle soufie et a créé plusieurs œuvres en solo en s’inspirant de cette danse rituelle, recherchant une synthèse avec la danse contemporaine occidentale. Il a choisi la danse comme langage pour, dit-il, découvrir son centre, se déplacer dans le monde afin de trouver sa vérité, la vérité cachée qui se dévoile peu à peu à travers le mouvement, en suivant la lignée des mystiques d’Anatolie, transgressant les frontières de cette tradition ancestrale.
Le corps de Ziya Azazi parle un langage clair : l’homme cherche l’absolu, la vérité, le sens de l’être. Cependant il doit passer par plusieurs étapes comme la peur, la confusion, l’ignorance… Le chemin que Ziya Azazi a choisi est celui de la joie et de la répétition, du tournoiement jusqu’à l’extase. Son corps devient un médium pour déployer une magie, une pureté mais aussi une solitude profondément humaine.
Le 14 juillet 1989, le Français Jean-Paul Goude - que le Musée des Arts Décoratifs, qui présente actuellement à Paris une exposition sur son œuvre, qualifie d’un des plus brillants « faiseurs d’images » – fut le metteur en scène des célébrations du bicentenaire de la révolution française. Au cours du gigantesque défilé qu’il avait organisé à cette occasion, il a fait tournoyer sur toute la longueur des Champs-Elysées, à l’aide d’un mécanisme dissimulé sous leur jupe géante, une trentaine de femmes dont le costume noir et la coiffe gigantesques évoquaient ceux des derviches tourneurs. Le thème choisi pour le défilé étant la solidarité et la fraternité entre les peuples, chacune portait un enfant d’un pays différent, le faisant « valser » avec elle.
Même si toutes ces traductions artistiques semblent rejeter au second plan la spiritualité qui était le moteur même des derviches du XIIIe siècle, elles constituent, par leur beauté plastique et leur modernité, un bel hommage à l’ordre créé par Rûmî voici huit siècles, montrant avec force son appartenance au patrimoine de l’humanité et illustrant l’universalité et l’esprit de tolérance de la philosophie de Rûmî.
Bibliographie :
Eva de Vitray-Meyerovitch, Mystique et poésie en Islam - Djalâl-ud-Dîn Rûmî et l’Ordre des Derviches tourneurs, Ed. Desclée Debrouwer, 1972.
John Baldock, L’essence du soufisme, Ed. Pocket, 2008.
Nahal Tajadod, Roumi le Brûlé, Ed. J.C. Lattès, 2004.
Patrick Ringgenberg, Guide culturel de l’Iran, Rowzâneh Publications, 2006.
Thierry Zarcone, Le soufisme, Voie mystique de l’islam, Découvertes Gallimard religion, 2009.
Je remercie mes amis :
*Lucile et Eric Nosjean pour leur description du rituel mevlevi de Bursa,
*André Denos, grand connaisseur de la Turquie, et Yüksel Murat Gِlpinarli pour les documents et les informations qu’ils m’ont généreusement communiqués.
Sans oublier les auteurs mentionnés dans la bibliographie ci-dessus.
[1] Pour la définition du soufisme et du mysticisme, voir l’article de Râheleh Morakkabi « La dimension mystique de la poésie classique persane » in La Revue de Téhéran – n° 56 de juillet 2010.
[2] Pour le déroulement et la symbolique du Samâ’, voir l’article d’Amélie Neuve-Eglise : « L’oratorio spirituel ou le samâ : une liturgie du souvenir entre ciel et terre » in La Revue de Téhéran – n° 21 d’août 2007.