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Toujours muni de sa plume,
le patient héros continue
de découvrir pas après pas,
toute la sublime création.
De la bordure,
il voit les portes ;
celles qui ouvrent
chaque quadrillage
et celles qui indiquent
chaque point cardinal.
La bordure est droite ;
elle trace sa route
sur le pourtour ;
elle est l’enceinte
du jardin clos,
la fenêtre étroite
sur le monde.
Elle donne l’équilibre
à toute la création
et permet de joindre
toutes les cours.
De peupliers et de mûriers,
elle est surmontée.
De grenadiers et de genévriers,
elle est embaumée.
De bas-reliefs, elle est bordée
et de lambris vernissés, encadrée.
L’astucieux tisserand
sur l’ouvrage plié,
joue avec les losanges
et les arabesques fines
et souvent serpentines
pour que tout soit lié.
Dans l’encadrement
se suivent les gazelles
et les sveltes chèvres.
Sur elles, repose
la charge de séparer
le profane du sacré.
Veillent aussi les coqs,
garance et safran,
toujours chantant
à intervalles réguliers.
C’est en manifestant.
l’ombre dense
ou le soleil levant
qu’ils sont reliés.
Rostam assiste alors
à une scène incroyable
qui jaillit hors des cadres ;
il voit un rêve, un mirage.
Il aperçoit dans un nuage
Iskander qui se recueille
devant le tombeau d’Istara
puis qui passe une à une
les sept hautes enceintes
d’Ecbatane-la-Grande
dont la dernière muraille
est d’or pur irradiant,
tel le soleil resplendissant.
Chirine, toute douceur,
passe alors, fluide et agile,
sous les arceaux d’églantine
et va se baigner avec Bethsabé
nageant dans le lit du fleuve,
ou flottant sans aucune peur.
Des tambourins de bois
résonnent en cadence,
tremblent les peupliers
et les saules argentés.
Iskander est touché ;
le sortilège de la volupté
l’a atteint ; il est charmé.
Il va alors errer dans le désert
et sculpter sa bien-aimée,
sans répit sur les rochers
pendant de longues années.