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Selon les données statistiques, durant les huit années de la guerre, près de 7000 femmes et jeunes filles iraniennes ont été tuées. Les scènes de martyre de femmes ne se déroulent pas forcément comme on l’imagine, dans les champs de bataille : un grand nombre d’entre elles ont été tuées lors des attaques aériennes contre les villes et villages. Le 5 juin 1984, une foule de femmes qui s’est rassemblée dans le parc de la ville de Bâneh [1] pour commémorer les martyrs de la Révolte du 5 juin 1963 [2] est la cible d’un massif bombardement irakien, et un grand nombre d’entre elles tombent en martyre. En outre, le nombre des femmes blessées qui souffrent encore des effets de la guerre est évalué à plus de 5000.
Durant les huit années de la guerre Iran-Irak, plusieurs écoles et lycées de filles sont bombardés et complètement détruits par les avions ennemis. C’est le cas du lycée Zeinabieh à Miâneh [3] qui, le 11 février 1986, est la cible des bombardiers irakiens ; lors de cet assaut massif, les 90 lycéennes sur place sont tuées. Il faut ajouter qu’un certain nombre de femmes et filles aussi bien que leurs familles sont capturées et transférées dans des camps irakiens. Certaines d’entre elles sont mises en prison par les forces irakiennes présentes dans les régions frontalières ; à l’époque, seule la capture de cinq femmes est officiellement reconnue par l’Etat irakien : Ma’soumeh Abâd, jeune fille d’originaire d’Abâdân est faite prisonnière avec trois autres jeunes filles nommées Maryam (Shamsi) Bahrâmi, Halimeh Azmoudeh et Fâtemeh Nâhid qui l’accompagnaient lors de son retour de Shirâz [4]. Elles sont enfermées dans une petite cellule de la prison sécurisée de Bagdad. Elles décident d’y entamer une grève de la faim afin de pouvoir être autorisées à s’inscrire sur la liste des prisonniers de la Croix-Rouge. Grâce à cette résistance, les quatre jeunes filles sont transférées au camp des captifs d’Irak et deux mois plus tard, elles sont libérées et renvoyées dans leur foyer. Khadidjeh Mirshekâr est une autre combattante qui subit, pendant plusieurs années, les prisons irakiennes.
En plein milieu de la guerre, un certain nombre de femmes sont tuées par les membres du groupuscule des Monâfeghins. Parmi ces figures féminines, on peut citer les noms de Seyyedeh Tâhereh Hâshemi [5], Nasrin Afzal [6], et Nâhid Fâtehi [7] ; de plus, certaines autres combattantes tombent en martyre sur les lignes du front, parmi lesquelles Maryam Farhâniân, Fouzieh Shirdel ou encore Shahnâz Shâhosseini.
L’une des activités principales des femmes au cours de la Défense sacrée est de porter secours aux blessés et sinistrés de la guerre. Il s’agit de forces professionnelles et volontaires qui, dès le début des assauts irakiens, viennent en aide aux blessés et aux victimes. Les données statistiques montrent que près de 24 000 femmes volontaires dont 2000 médecins rejoignent le mouvement national pour apporter des soins médicaux et secours d’urgence aux personnes blessées. Le nombre des sinistrées augmentant, les services de santé et les secours médicaux du pays ont besoin de plus d’aide de la part de la population pour intervenir. Avec le temps, les responsables parviennent à mobiliser un grand nombre de secouristes et de personnel qualifié, dont des infirmières et des médecins.
Une autre activité féminine pendant la guerre est la rédaction de rapports ou d’articles sur la situation militaire et son évolution. Ces rapports, qui nécessitent une présence physique directe sur les lignes de front et dans les zones de conflit, sont illustrés par des photos de scènes de guerre prises sur le vif. Parmi ces journalistes et photographes, on peut citer les noms de Fâtemeh Navvâb Safavi et Maryam Kâzemzâdeh. Ces femmes journalistes et photographes nous ont laissé un nombre de photos important donnant une image précise de la guerre.
Outre la présence des femmes au sein des forces armées s’engageant au front, on peut voir leur participation nombreuse à l’effort de guerre au travers de menues activités contribuant à aider les combattants et les réfugiés. En outre, un bon nombre de femmes vivant dans des zones directement touchées décident de rester chez elles pour protéger leur famille et leur demeure ainsi que pour préparer des munitions, des repas, des médicaments, etc. De façon générale, les femmes iraniennes contribuent activement et de façon décisive à l’effort de guerre, et jouent un rôle crucial, autant matériel que moral, dans la résistance iranienne.
A suivre…
Source :
Amiriân, Mohammad, Seyri dar târikh-e djang-e Irân-Arâgh (Aperçu sur l’Histoire de la guerre Iran-Irak), 5 vol., Centre des études et recherches de la Guerre, Téhéran, 1367/1988.
[1] Ville de la province du Kurdistan située à 270 km du nord-ouest de Sanandaj.
[2] Il s’agit de grandes manifestations spontanées de la population iranienne pour protester contre les lois dictées par l’Etat américain.
[3] Petite ville située au sud-est de la province de l’Azerbaïdjan de l’est.
[4] Pour en savoir plus, voir notre article « Je suis vivante », publié in n° 109, décembre 2014, consultable sur : http://www.teheran.ir/spip.php?article1991
[5] Jeune fille de 14 ans d’originaire d’Amol, au nord du pays.
[6] Née en 1959 à Shirâz, Nasrin s’engage à 18 ans dans les activités révolutionnaires. Avec la victoire de la Révolution islamique, elle se rend à Mahâbâd où elle entame ses activités culturelles pour y propager la pensée islamique. En 1982, elle tombe en martyre sous le coup d’éléments antirévolutionnaires.
[7] Née en 1965 à Sanandaj, elle est en 1981 membre de la branche féminine du Sepâh et joue un rôle actif dans le combat du Sepâh contre les sabotages du Kurdistan. L’année suivante, elle est emprisonnée par le groupe de Komoleh (le Comité des révolutionnaires du Kurdistan d’Iran) et décède sous la torture.