N° 20, juillet 2007

Mohtasham Kâshâni


Zahra Boveyri
Traduit par

Helena Anguizi


Shams-ol-shoarâ Kamâleddin Mohtasham Kâshâni, descendant direct de Khâjeh Mir Ahmad, est né dans une famille aisée de Kâshân. Tout comme son contemporain, le célèbre Khâjeh Sanâï, Mohtasham était un fils de commerçant qui, durant son jeune âge, exerça le métier de son père qu’il quitta par la suite pour se consacrer essentiellement à sa grande passion : la poésie.

Il est surtout connu pour ses odes. Longtemps, à travers ses vers, il fit l’éloge de grands monarques tels que le roi Safavide Tahmâssb et sa descendance, c’est-à-dire Esmaïl Mirzâ et Hamzeh Mirzâ, ses deux fils, ainsi que sa fille, la princesse Pari Khân Khânom. Quant aux ghassidehs qu’il composa, ils concernaient également des gens célèbres comme Ghiasseddin Mir Mirân, le gouverneur de Yazd et bien d’autres personnalités de l’époque. Parmi les plus célèbres ghassidehs de ce genre, on peut évoquer un recueil de poèmes, sorte de masnavi composé de distiques à rimes plates et chantant les louanges des Khâns de l’Inde.

Mais c’est surtout sa poésie religieuse et notamment ses éloges funèbres à la famille du Prophète Mahomet qui l’ont distingué des autres poètes de son temps. Il faut souligner qu’à son époque, Mohtasham Kâshâni comptait parmi les poètes reconnus et était très admiré de son entourage.

Avant sa mort, il avait mentionné dans son testament qu’il souhaitait que ses œuvres soient compilées par son élève, Mir Tâghioddin Mohammad Hosseini Kâshâni. Sa volonté fut respectée et ce dernier rassembla l’œuvre complète de son maître en cinq livres de poèmes et deux autres livres comprenant des écrits divers dont Sabaïeh, Shabâbieh (composé durant sa jeunesse), Shabieh (composé alors qu’il avait atteint un âge avancé), Jalâlieh, Récits amoureux, Zarouriat, ou encore Moamiat.

Jalâlieh et les Récits amoureux ont été écrits alors que Kâshâni était troublé par le sentiment amoureux qu’il ressentait pour de jeunes filles, et explique le lyrisme amoureux qui y est omniprésent.

En poésie comme en prose, Mohtasham Kâshâni suivit la voie tracée par les anciens et notamment des poètes ayant vécu avant le VIIIe siècle, et composa la majorité de ses œuvres poétiques sous forme de ghassidehs. Il a également composé des poèmes narratifs qui ont rencontrés un réel succès, notamment son "Davâzdah Band", élégie funèbre de l’Imam Hossein racontant l’événement de Kerbalâ et que l’on peut encore entendre aujourd’hui lors des cérémonies de deuil de l’Ashourâ.

Mohtasham Kâshâni décéda en 996 et fut enterré à Kâshân.


Celui qui donna à la fleur le moyen de vivre et de respirer

Donna par sagesse à chacun ce qu’il mérite

Ainsi plaça-il les cieux en hauteur et le tapis sous nos pas

A Lui seul revient de juger bon l’emplacement de chaque chose

Deux navires identiques voguant sur l’onde

A l’un Il fera regagner la terre et l’autre non

Deux épris poursuivant le même chemin

Il fera parvenir l’un au but et l’autre non

Célèbre poème strophique de Mohtasham Kashânî, en mémoire à la mort de l’Imam Hossein et de ses compagnons à Karbalâ


Quel est ce soulèvement qui une nouvelle fois a bouleversé le cours des événements ?

Que sont donc ce chant funèbre, ce deuil et ces lamentations qui ont envahi la terre entière ?

D’où vient donc ce grand bouleversement et quel est ce chaos qui fait écho jusqu’aux cieux, avant même que l’on ait soufflé dans la trompette de la résurrection ?

Pourquoi cette matinée est-elle aussi sombre

Et pourquoi le monde est-il sans dessus dessous ?

En voyant la part de tristesse que porte en soi le moindre atome,

C’est à croire que ce matin

Le soleil s’est levé à l’Ouest.

Ce n’est pas exagérer que de nommer l’Apocalypse

Ce moment tragique que l’on appelle Moharram.

Au ciel, où mélancolie et tristesse n’ont pas de place,

Tous sont pourtant abattus par le chagrin

Les anges et les Djins accompagnent les humains dans leurs chants funèbres et pleurent la perte de l’une des plus nobles créations divine : Hossein ; cette lumière de l’Orient et de l’Occident, ce soleil, cette terre et ce ciel élevé dans les bras même du prophète

Silence Mohtasham !

Ta parole fait fondre le cœur de la pierre

Cette pénible nouvelle épuise les cœurs, les oiseaux et les poissons de mers, tous impuissants face à ce chagrin immense

Silence Mohtasham !

Ce poème sanglant a fait verser les larmes de n’importe quel auditeur

Silence Mohtasham !

Le ciel a tant pleuré que la surface des eaux des mers est devenue un véritable champ de bulles ensanglantées.

Silence Mohtasham !

Par ta parole et par les lamentations des endeuillés qu’elle suscite

Le soleil est devenu aussi froid que la lune

Silence Mohtasham !

En souvenir de la perte de Hossein,

Gabriel n’ose plus se présenter au prophète

Car depuis la nuit des temps

Une telle erreur ne s’était jamais produite.


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