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Située parmi les montagnes Zâgros et la plaine d’Ispahan, la région de Tchahâr Mahâl va Bakhtiâri se compose de deux parties : Tchahâr Mahâl, entourée de quatre districts, et Bakhtiâri, située dans une région montagneuse. Chacune des deux rassemble des peuplades distinctes dotées de leur propre culture et manière de vivre. Ce territoire est situé à une haute altitude et a de ce fait été surnommé "le toit de l’Iran" [1].
Du point de vue ethnologique, au moins deux tiers des villageois de ladite province sont des nomades de Zâgros, qui s’y sont établis au fur et à mesure du temps. Plus tard, ces villages se sont transformés en petites villes. Les habitants de Tchahâr Mahâl va Bakhtiâri ont donc de fortes racines nomades ainsi qu’une culture commune basée sur le nomadisme.
Cette région est riche en ressources naturelles et abrite tout un ensemble de montagnes, vallées, et de lieux escarpés difficiles à traverser. La beauté de la nature s’accroît au printemps où l’on peu admirer les tulipes des champs, les oiseaux migrateurs des étangs, le retour des nomades, les paysages verdoyants et la multiplication des ruisseaux qui se rejoignent ensuite pour alimenter deux grandes rivières iraniennes : le Zâyandeh Roud à Ispahan et Kârun dans le Khuzestân.
Ben est une petite ville située au Sud-Ouest de Shahrekord [2]. Dans les premiers temps, une troupe serait venue s’établir et cultiver les terres à Yoghoush [3], à une distance de sept kilomètres de Ben actuel. Après quelques temps, ce peuple se serait réfugié au pied d’un mont connu aujourd’hui comme étant le mont Ben pour se protéger du froid intense et des tourbillons. Ben a un climat froid : en hiver, il y souffle de forts vents venant du Nord-Ouest qui apportent des nuages de pluie et de neige, y rendant les conditions de vie difficiles.
La ville de Ben est dotée de grands vergers d’amandiers, de noyers, de pruniers ainsi que de mûriers et d’abricotiers. A l’Est de cette ville et au pied du mont Ben se trouve également un très bel étang.
La langue de cette région est le turc mélangé d’azéri, de ghashghaï, de divers dialectes locaux et de quelques mots farsis. Cette langue-mosaïque se parle avec un dialecte particulier propre aux Beniens.
L’un des précurseurs de la révolution de la prose persane et de la traduction, Mirzâ Habib Esfahâni, est également né à Ben. Il a réalisé des traductions telles que Hadji Bâbâ d’Ispahan, Gil Blas ou encore Le Misanthrope qui sont considérées comme des chefs-d’œuvre. Il est également le premier Iranien à avoir compilé la grammaire persane. Il l’a écrite en prose dans un langage simple, et a choisi le titre Dastour-e zabân ("grammaire" en persan) à la place de "sarf va nahv" qui est un terme arabe.
Après avoir effectué ses études primaires à Ben, il quitte la ville pour se rendre à Ispahan puis à Téhéran où il poursuivit ses études. Après un long séjour à Téhéran, il part en Allemagne. Il alla ensuite à Bagdad pour continuer ses études. Après quatre ans, il rentra à Téhéran. Dans sa jeunesse, il pratiqua la médecine et savait se servir des plantes médicinales pour guérir ses patients. En outre, on dit qu’il était habile en astrologie et savait prédire l’avenir. Homme de plume, il avait choisi le pseudonyme "Dastân" pour parafer ses poésies composées en langues turque et persane.
Libéral, il critiqua le régime de l’époque à plusieurs reprises et dut s’exiler en Turquie à cause d’un écrit satirique contre le premier ministre du gouvernement Qâdjâr qu’il avait écrit en collaboration avec Mirzâ Malkam Khân. Dans sa patrie d’exil, il participa activement aux assemblées réunissant les iraniens modernistes. Il décéda en 1897 et fut enterré à Boursey, en Turquie.
[1] Le point le plus élevé de cette province se situe dans les montagnes Zard Kouh, à 4536 mètres.
[2] Centre de la province.
[3] Mot local signifiant "pied de montagne".