N° 163, juin 2019

L’impact de la Révolution iranienne de 1979 sur la genèse du Mouvement islamique du Nigeria


Saeid Khânâbâdi


"Tout a commencé par un exemplaire du Saint Coran que l’Imâm Khomeiny m’a offert personnellement en 1979. Ce jour-là, après notre rencontre, le cher Imâm m’a demandé de rentrer dans mon propre pays en vue d’appeler les Nigérians à ce Coran." [1]

Ibrâhim Yaghub Zakzaky (né à Zaria en 1953) entendit pour la première fois le nom de l’Imâm Khomeiny à l’Université Ahmadu Bello où il étudiait l’économie. ہ partir de ce jour-là, quand son professeur comparait le soft power de l’Imâm basé sur la volonté du peuple avec le pouvoir tyrannique du Shah issu de la force armée, le grand nom de Rouhollah Khomeiny ne cessait de retentir dans l’esprit de ce jeune musulman nigérian en quête de vérité et de justice. Il était à l’époque vice-président des affaires internationales d’une importante association islamique d’étudiants nigérians appelée Muslim Students Society (MSS). En tant que militant politique dans le cadre de ces activités estudiantines, il avait déjà adopté des engagements pro-islamiques. Zakzaky a eu un rôle de premier plan dans l’organisation des grandes manifestations de 1978 et 1979 des musulmans nigérians qui réclamaient la prise en compte de la loi islamique dans la nouvelle Constitution du pays le plus peuplé d’Afrique. Dans le chaos idéologique des années 1970 et 1980 et alors que le monde était déchiré par le conflit entre communisme soviétique et libéralisme occidental, Ibrahim Zakzaky et les jeunes musulmans nigérians de son entourage trouvent un troisième chemin qui leur paraît être la démarche alternative et la voie de la droiture. Cette voie est ouverte aux nations opprimées du monde entier par la Révolution islamique d’Iran qui, en 1979, présente l’islam comme un moyen de résistance ainsi qu’une école politique mieux adaptée pour guider l’humanité au seuil du troisième millénaire.

Ces jeunes dirigés par Ibrahim Zakzaky fondent le Mouvement islamique du Nigeria en 1980, presque un an après la Révolution iranienne. Mais à l’origine, ce mouvement s’enracine dans la longue tradition des revendications inspirées par l’islam en Afrique. Ce mouvement montre, par plusieurs facteurs, de grandes ressemblances formelles, existentielles et fonctionnelles avec les pensées, les prises de position et les méthodes de la Révolution islamique d’Iran. Le présent article s’intéresse à mettre en exergue ces points de convergence.

Sheikh Ibrahim Zakzaky

Historiquement parlant, le Mouvement islamique du Nigeria est-il un résultat de la politique d’exportation de la Révolution, très à la mode dans les années 1980 ? Ou s’agit-il d’une simple coïncidence historique ? La création de ce mouvement est-elle comparable à la genèse du Parti de la résistance islamique du Hezbollah au Liban ? Il faut certes éviter de tomber dans les pièges des clichés diffusés par les médias occidentaux qui veulent transmettre une interprétation iranophobe des mouvements islamiques au Moyen-Orient et en Afrique. Il ne faut pas réduire le Mouvement islamique du Nigeria à un parti chiite confessionnaliste, car c’est exactement ce que les médias ennemis sont en train de propager. Ces médias, en vue de dévier les revendications purement islamiques de ce mouvement, argumentent ainsi que les chiites du Nigeria ne sont qu’une minorité au sein de la communauté des musulmans nigérians, et qu’ils ne sont donc pas légitimes pour mener des activités politiques d’une telle ampleur. Rappelons que lorsqu’ils parlent des revendications de la majorité chiite au Bahreïn, ces mêmes médias préfèrent prendre parti pour le clan absolument minoritaire des Khalifah ! En traitant des aspirations sociales des musulmans nigérians, ces médias annoncent que le Sheikh Zakzaky, chef de la minorité chiite, envisage de fonder une république islamique sur le modèle de celle d’Iran. Et malheureusement, même en Iran, certains experts viennent inconsciemment renforcer le camp des ennemis du Mouvement islamique du Nigeria en répétant les mêmes fantasmes médiatiques. Comme toujours, les presses écrites et les médias audiovisuels du camp impérialiste cherchent à semer le grain de la division au cœur de la communauté des musulmans. La vérité est que les leaders du Mouvement islamique du Nigeria n’ont jamais revendiqué une telle cause confessionnelle. Les proches du Sheikh Zakzaky et même ses ennemis approuvent son fort patriotisme à l’égard de sa chère patrie, le Nigeria. La vérité est que ce mouvement, contrairement aux orientations extrémistes et salafistes de certains groupes nigérians comme Boko Haram et Izala Society [2], a pour priorité l’unité de la communauté musulmane du Nigeria et aspire essentiellement à demeurer la voix des couches sans voix de la grande nation nigériane. Et c’est pour cette raison que le Mouvement islamique du Nigeria est d’une part, victime des hostilités des militants hérétiques et wahhabites, et d’autre part, la cible des attaques du régime nigérian influencé par les puissances extérieures, surtout par les Américains. Le mouvement fondé par le Sheikh Ibrahim Zakzaky est de nature islamique et non pas uniquement chiite. Le Sheikh et ses adeptes prient dans les mosquées malékites ainsi que dans celles des autres branches de l’islam au Nigeria. Usman Dan Fodio [3], le héros historique dont l’héritage politico-culturel est tant admiré par le Mouvement islamique, n’était pas un leader chiite mais un musulman sunnite. Le mouvement guidé par le Sheikh Zakzaky chérit à tel point le souvenir de ce leader sunnite nigérian qu’il a même baptisé du nom d’Usman Dan Fodio ses écoles religieuses appelées Fudiyyah. [4] Même le titre du Mouvement islamique du Nigeria insiste sur son caractère islamique plutôt que chiite. Il nous paraît important de mentionner qu’en général en Afrique, l’islam est compris comme une religion très monolithe. Les musulmans africains ne reconnaissent pas réellement les divisions entre les différents courants et sectes de l’islam si classifiées chez les musulmans du Proche et du Moyen-Orient. Limité toujours par le christianisme comme la religion des colonisateurs, l’islam africain fut ainsi obligé de garder son unité afin de survivre aux menaces externes [5]. En vue de mieux éclairer les principes philosophiques et religieux du Mouvement islamique du Nigeria, nous traiterons brièvement de l’histoire des aspirations politiques des musulmans nigérians.

Partie I L’Histoire des mouvements islamiques au Nigeria

L’islam est entré sur le continent africain dès le VIIe siècle, c’est-à-dire dès le premier siècle ayant suivi la révélation du Saint Coran. Cette religion se répand alors au nord de l’Afrique dès les premières décennies du califat islamique de Médine. En ce qui concerne l’Afrique subsaharienne, ce sont surtout les commerçants musulmans qui ont initié le peuple africain de ces régions à la foi islamique. L’islam entre ainsi au Nigeria dirigé à l’époque par des royaumes locaux et tribaux. Durant cette période, l’islam a pu coexister pacifiquement avec les religions traditionnelles d’Afrique. Mais à partir du XVe siècle et avec le début des interventions colonialistes des Européens et plus directement à partir de 1851 [6] et l’occupation officielle de Lagos par la Marine britannique, les colonialistes imposent leur religion au peuple nigérian et sèment le grain des conflits interreligieux et interconfessionnels au Nigeria. Pourtant, au XIXe siècle, Usman Dan Fodio, un leader spirituel musulman, a pu instaurer, au nord du Nigeria, un califat islamique très populaire. Ce gouvernement islamique dont les lois s’appliquaient sur la base du Saint Coran et les Hadiths du prophète Mohammad a survécu à travers les fils et petits-fils d’Usman Dan Fadio jusqu’en 1905, date à laquelle il fut renversé par les forces du royaume britannique. Cette époque est considérée comme l’âge d’or de l’islam au Nigeria qui, après la colonisation anglaise, n’a jamais pu revivre cette ère de prospérité. Les colonisateurs divisent le pays en deux parties administratives et géo-religieuses, entre le nord, peuplé plutôt par les Musulmans, et le sud où les chrétiens sont alors majoritaires. Durant la colonisation britannique, nous distinguons déjà que les villes australes et limitrophes profitent d’un développement industriel et économique beaucoup plus avancé que celles du nord. Cette politique injuste et discriminatoire est poursuivie, même après l’indépendance du Nigeria, par les gouvernements occidentalisés et militaristes. Même le déplacement de la capitale politique vers Abuja, au centre du pays, en 1991, n’a rien changé. Les musulmans nigérians dotés de moyens financiers et ayant des capacités d’investissement préfèrent baser leurs activités commerciales et industrielles dans le sud chrétien (surtout au port de Lagos) en vue de mieux profiter des facilités étatiques. Ces types d’injustices socio-économiques et ce favoritisme des gouvernements nigérians avant et après l’indépendance sont considérés par les politologues comme l’une des raisons de l’apparition de mouvements extrémistes voire terroristes comme celui de Boko Haram à l’extrémité nord du Nigeria. Ces groupes fanatiques sont surtout alimentés financièrement et logistiquement par certains pays étrangers qui ne veulent pas que le Nigeria, ce grand exportateur pétrolier avec ses larges potentialités économiques et minières, se stabilise et prospère. Dans de telles conditions conflictuelles, le Mouvement islamique du Nigeria est fondé en 1980 dans la ville de Zaria dans l’état de Kaduna au nord du pays. ہ cette époque, les idées marxistes parfois teintées de militarisme étaient considérées comme le seul moyen de résister aux injustices socio-économiques du système capitaliste. Le Sheikh Ibrahim Zakzaky et ses partisans, en suivant la démarche pacifique et démocratique de l’Imâm Khomeiny, se lancent ainsi dans des activités éducatives et humanitaires en vue d’améliorer le mode de vie des habitants du nord du Nigeria. ہ l’instar de l’Imâm Khomeiny qui, lors de son exil à Paris, offre des cadeaux à ses voisins français pour la fête chrétienne de Noël, le Sheikh Zakzaky établit des relations amicales et réciproques avec l’ةglise nigériane. Comme l’Imâm Khomeiny qui œuvre au rapprochement des différentes écoles religieuses de l’islam (qui en réalité ne diffèrent qu’à quelques détails près en matière de jurisprudence), le Sheikh Zakzaky respecte également les disciples des autres branches islamiques et condamne les actes terroristes des groupuscules terroristes qui menacent la cohésion de la communauté monolithique des musulmans nigérians.

Les activités du Mouvement islamique du Nigeria se déroulaient essentiellement à la Hosseyniyeh Baghiyatollah, avant que ce centre religieux ne soit démoli par l’armée nigériane en décembre 2015. C’est dans cette Hosseyniyeh que le Sheikh Zakzaky donnait ses prêches hebdomadaires sur l’éthique islamique. Dans ce centre islamique, le Sheikh donnait des cours sur l’exégèse coranique ainsi que sur le commentaire du Nahj-ol-Balaghah, ouvrage contenant les paroles de l’Imâm Ali, le premier Imâm des chiites. Tous ces discours étaient en hausa, la langue autochtone parlée par les musulmans africains dans plusieurs pays de cette région sahélienne. ہ noter que le Sheikh Zakzaky parle aussi l’arabe, langue qu’il a apprise à l’ةcole des études arabes de Kano. La Hosseyniyeh Baghiyatollah était de même la base de l’organisation des cérémonies de la commémoration du martyre de l’Imâm Hossein, le troisième Imâm chiite (tombé en martyre en octobre 680). Le Mouvement islamique du Nigeria crée aussi un large réseau d’écoles islamiques nommées « écoles Fudiyyah ». Ces écoles ne donnent pas seulement des leçons théologiques ; elles forment parallèlement les jeunes filles et garçons du Nigeria dans les sciences appliquées et théoriques, en pleine conformité avec les programmes de l’éducation nationale de ce pays. Ce mouvement a aussi un journal informatif en langue hausa appelé Al-Mizân. [7] Les activités du Mouvement islamique du Nigeria ne se réduisent pas aux domaines religieux ou éducatifs. Dans le domaine des activités humanitaires et bénévoles également, ce mouvement offre des services médicaux aux couches défavorisées de la société nigériane. Il s’intéresse aussi aux activités artistiques et cinématographiques et gère une cité de tournage appelée Film Village. Ce centre est dirigé par Madame Zeynab Ibrâhim, l’épouse du Sheikh Zakzaky. Le leader du Mouvement islamique du Nigeria envisage de produire des films et des séries historiques sur l’époque où le territoire du nord du Nigeria, dirigé par un gouvernement islamique, rayonnait fièrement et rassemblait une grande partie de la communauté musulmane du continent africain.

Photos : Le mouvement islamique du Nigeria

Partie IILes points de convergence entre la Révolution islamique et le Mouvement islamique du Nigeria

Avant d’aborder ces points de convergence, rappelons que le Mouvement islamique du Nigeria est une organisation indépendante nigériane qui fonctionne tout en respectant les lois fédérales et les différentes dispositions de la Constitution nigériane. Les leaders de ce mouvement expriment toujours leur ferme attachement à la cause nationale du peuple nigérian. Le Mouvement islamique du Nigeria a toujours dit non à toute ingérence étrangère dans les affaires intérieures du pays souverain du Nigeria. ہ l’inverse, nous observons que les camps hostiles au Mouvement islamique, comme le groupe wahhabite d’Izala Society, sont soutenus financièrement, avec des appuis logistiques, par certains pays étrangers.

Le chiisme, le mot-clé de l’interaction irano-nigériane

Après sa rencontre avec l’Imâm Khomeiny en 1979 à Téhéran, le Sheikh Zakzaky se convertit au chiisme et grâce à lui, des centaines de milliers de Nigérians se convertissent aussi au chiisme tout en respectant les autres branches de l’Islam présentes sur le sol nigérian [8]. Bien que le Mouvement créé par le Sheikh Zakzaky ait tout un programme pour soutenir l’ensemble de la communauté musulmane du Nigeria sans distinction entre les différentes écoles islamiques, l’aspect chiite du Mouvement islamique du Nigeria est un élément clé dans la formation de l’amitié irano-nigériane entre les disciples du Sheikh et le peuple iranien. Au cours des manifestations pro- Zakzaky à partir de 2015, le peuple iranien a été le pionnier dans la campagne soutenant les chiites opprimés du Nigeria. Les chiites libanais d’Afrique aussi firent preuve d’une grande sympathie pour le Mouvement islamique du Nigeria. Le Sheikh lui-même a plusieurs fois voyagé en Iran et au Liban. [9] Le chiisme duodécimain apparaît donc être le premier élément unificateur entre la Révolution islamique d’Iran et le Mouvement islamique du Nigeria.

Le Sheikh Zakzaky, un Khomeiny à la nigériane

Le charisme personnel du guide fondateur de la Révolution islamique d’Iran est cité par les historiens comme l’un des éléments primordiaux dans la genèse et dans la victoire de cette Révolution. Le Mouvement islamique du Nigeria aussi, à son tour, doit son succès à la grande popularité personnelle du Sheikh Zakzaky auprès du peuple nigérian. Cet élément est une autre particularité partagée entre ces deux mouvements islamiques. En effet, en étudiant le chemin parcouru par le Sheikh Zakzaky et en méditant sur les secrets de sa réussite, nous observons que ce leader africain s’est largement inspiré des méthodes populaires de l’Imâm Khomeiny. En étudiant l’impact de la Révolution islamique d’Iran sur la genèse et l’expansion rapide du Mouvement islamique du Nigeria, il nous faut mettre en relief l’influence personnelle que l’Imâm Khomeiny a exercée sur la personnalité du Sheikh Zakzaky. En effet, en Afrique, le nom de l’Iran est très lié à celui de l’Imâm Khomeiny. [10]

Comme nous l’avons déjà évoqué, le Sheikh Zakzaky fait connaissance avec les idées révolutionnaires de l’Imâm Khomeiny en 1978. ہ cette époque, l’Imâm était encore en France et les médias diffusaient ses discours et interviews. Le jeune Zakzaky trouve un jour une image de l’Imâm Khomeiny publiée dans un journal étranger. Il photocopie ce portrait de l’Imâm et le distribue parmi les musulmans du Nigeria. Les activités pro-Khomeiny d’Ibrâhim Zakzaky au Nigeria étaient tellement efficaces que quand, après la victoire de la Révolution islamique, les gens s’adressaient à l’ambassade d’Iran au Nigeria pour demander une photo de l’Imâm Khomeiny, les diplomates iraniens leur disaient que la seule photo dont ils disposaient alors était une photo copiée et distribuée par un étudiant nigérian inconnu ! Inspiré par les méthodes révolutionnaires de l’Imâm Khomeiny et opposé à la corruption et l’injustice de l’ةtat nigérian, le Sheikh Zakzaky, en compagnie d’un groupe de jeunes Nigérians, se lance dans un combat en vue de créer un Mouvement islamique similaire à la Révolution déclenchée en Iran. Après la victoire de la Révolution islamique, Ibrâhim Zakzaky se rend en Iran et rencontre directement l’Imâm Khomeiny.

Les éléments figuratifs concernant les leaders de la Révolution islamique sont omniprésents dans la Hosseyniyeh Baghiyatollah où les portraits de l’Imâm Khomeiny et de son successeur l’Ayatollah Ali Khamenei, le Guide suprême actuel de la Révolution islamique, sont accrochés au mur juste à proximité du minbar du Sheikh Zakzaky. Sur le site Internet du mouvement (www.islamicmovement.org),

les portraits de ces deux figures politico-religieuses de la Révolution iranienne s’affichent à côté de l’image du Sheikh Zakzaky. Cependant, l’attachement philosophique du Mouvement islamique du Nigeria aux doctrines socio-politiques de la Révolution islamique ne se résume pas seulement à une relation à titre personnel entre le Sheikh Zakzaky et l’Imâm Khomeiny. Les partisans de ce Mouvement sont plutôt motivés par le dynamisme révolutionnaire des idées de l’Imâm Khomeiny.

Le dynamisme de l’islam révolutionnaire

La lecture politique de la religion de l’islam et la nature libératrice de l’interprétation révolutionnaire de l’islam que l’Imâm Khomeiny prêchait ont profondément attiré les peuples opprimés d’Afrique. L’idée de croire aux potentialités de l’islam afin d’injecter une nouvelle énergie et un nouveau dynamisme dans la communauté musulmane pour faire face aux puissances colonialistes et impérialistes a fasciné les jeunes Nigérians, dont l’entourage d’Ibrâhim Zakzaky.

Les méthodes de la résistance populaire et civile

Concernant la résistance populaire, les méthodes adoptées par les membres du Mouvement islamique du Nigeria montrent une forte analogie avec les démarches révolutionnaires du peuple iranien dans les années 1978-1979. Parmi les ressemblances dans les stratégies de résistance, on peut citer à titre d’exemple le recours à la désobéissance civile, les grèves nationales, les marches massives, les manifestations pacifiques, la condamnation de tout acte violent, et le fait d’éviter tout affrontement armé en général. Ce modèle de résistance civile est également comparable avec les méthodes pratiquées par le Sud-africain, Nelson Mandela et l’Indien, Gandhi.

L’engagement anti-impérialiste et anticolonialiste

L’une des grandes ressemblances entre les idées du Mouvement islamique du Nigeria et celles de la Révolution iranienne concerne les prises de position anti-impérialiste et anticolonialiste de ces deux mouvements. Les musulmans nigérians considèrent le colonialisme britannique comme l’élément perturbateur qui a mis fin à l’ancien gouvernement islamique du nord du Nigeria et a causé le retard systématique des régions musulmanes du nord du pays, ainsi que des conflits tragiques comme la guerre civile des années 1960. La conduite anticolonialiste du Mouvement islamique du Nigeria se définit dans le cadre du concept panafricain d’anticolonialisme, engagement plus ou moins partagé par les peuples de ce continent. Ce Mouvement nigérian considère l’islam comme un moyen de résistance contre le néo-colonialisme après l’indépendance du Nigeria en 1960. Le Mouvement islamique du Nigeria prétend que le colonialisme et ses conséquences socio-économiques sont l’une des causes principales des problèmes actuels du continent africain. Et c’est pour cette raison que l’appel à la justice du Sheikh Zakzaky est si apprécié par la nation nigériane.

Les prises de position pro-palestiniennes

L’Imâm Khomeiny commence sa campagne pro-palestinienne avant même la victoire de la Révolution islamique, dans les premières années ayant suivi la création illégale du régime sioniste. C’est lui qui établit le jour de Ghods (Jérusalem) dans le calendrier des musulmans. Aujourd’hui, partout dans le monde, le dernier vendredi du mois du Ramadan, les manifestants musulmans défilent en vue de réclamer la libération de la ville sainte des trois religions monothéistes. Les musulmans nigérians aussi organisent massivement des manifestations pro-palestiniennes dans les dix grandes villes du pays. La surprenante ampleur de ces manifestations antisionistes a suscité l’inquiétude des dirigeants du régime d’Israël qui ont demandé à leurs alliés au sein de l’armée nigériane de riposter violemment à ces rassemblements pacifiques. Sous la pression de l’ةtat sioniste, le 25 juillet 2014, en plein mois du ramadan, 35 civils musulmans, en jeûne, ont été massacrés par les soldats du régime nigérian. Le sang de ces martyrs africains a renforcé les liens solides entre les musulmans iraniens et nigériens en vue de défendre la cause palestinienne et pour condamner l’occupation de la terre sainte de Palestine. Mais notons surtout que contrairement à la propagande anti-chiite, cette prise de position du Mouvement islamique du Nigeria ne doit pas être interprétée comme un geste antisémite. Les leaders de ce Mouvement éprouvent une grande estime pour les fidèles de la religion monothéiste du judaïsme et pour le caractère saint du prophète Moïse si vénéré dans le Coran. Les critiques de ce Mouvement islamique ne concernent que les politiciens sionistes qui, selon les rapports des organisations internationales de l’ONU, remettent continuellement en cause les droits de l’homme et commettent des crimes contre l’humanité.

La commémoration des jours sacrés dans le calendrier islamique

En étudiant les différentes étapes de la Révolution islamique d’Iran, on comprend que les fêtes religieuses et les jours des cérémonies rituelles dans le calendrier islamique jouent un rôle de premier plan dans la genèse et la poursuite de la Révolution Islamique. Le discours critique de l’Imâm Khomeiny le jour de l’Achoura en 1963 à Qom et la grande prière de la fête du Ramadan à Téhéran en 1979 par l’Ayatollah Mofatteh en sont deux exemples parlant. Nous observons que la même approche existe dans les programmes du Mouvement islamique du Nigeria qui, à diverses occasions comme les jours des fêtes islamiques et surtout le jour d’Ashourâ, le dixième jour du mois de Muharram d’après le calendrier lunaire, organise des grands rassemblements pour ses membres. Les massives démonstrations cérémoniales des membres du Mouvement islamique du Nigeria à l’occasion d’Ashourâ et les discours révolutionnaires du Sheikh Zakzaky à cette occasion suscitent l’inquiétude des ennemis régionaux et internationaux de l’axe chiite de la résistance.

La célébration du deuil de l’Imâm Hossein et la culture du martyre

La Révolution islamique d’Iran, dans sa formation et dans sa survie, s’est toujours identifiée avec des faits en rapport avec l’histoire des Imâms chiites. L’Imâm Khomeiny et les autres leaders de cette Révolution ont insisté sur l’aspect révolutionnaire et intransigeant de l’action politique de l’Imâm Hossein, le troisième Imâm, très vénéré chez les chiites. La Révolution islamique d’Iran a pu s’inspirer de cette culture du martyre des chiites durant les émeutes de la Révolution et pendant la guerre de 1980-1988 imposée par le régime Ba’th de Saddam. Au Nigeria, la cérémonie de la commémoration du deuil de l’Imâm Hossein à l’occasion d’Ashourâ est devenue une démonstration annuelle d’une grande magnitude pour le Mouvement Islamique du Nigeria. ہ cette occasion, quelques centaines de milliers d’adeptes du Sheikh Zakzaky se rassemblent dans la ville de Zaria pour célébrer ce jour emblématique dans la tradition chiite. Ils s’habillent de noir et dressent les drapeaux et les banderoles où figurent les noms des saints chiites comme l’Imâm Hossein et son frère, le vénérable Abbâs. En ce jour, les membres du Mouvement chantent des hymnes religieux, font de longues marches de deuil et mettent en scène un théâtre religieux nommé ta’ziyeh, une performance artistique d’origine persane représentant symboliquement les événements du jour d’Ashourâ qui se sont déroulés en octobre 680 à Karbala. Les chiites s’identifient souvent aux martyrs d’Ashourâ, et cela a toujours été un leitmotiv pour résister aux pouvoirs tyranniques dans l’histoire du chiisme. Même au cours du massacre de Zaria en 2015, l’héroïsme et le sacrifice des chiites nigérians, qui n’avaient aucune arme, ont démontré ce fort attachement des membres du Mouvement islamique du Nigeria aux principes de la culture du martyre face à la barbarie des soldats équipés de mitrailleuses automatiques. Le Mouvement islamique du Nigeria s’est ainsi doté d’une "Fondation des martyrs" en vue de commémorer le souvenir des martyrs et de s’occuper des familles des martyrs chiites africains.

La doctrine chiite de l’attente de l’Imâm occulté

La question de l’attente de l’Imâm occulté (l’Imâm Mahdi, le douzième Imâm des chiites) est un thème essentiel dans la doctrine de la Révolution islamique. D’une certaine manière, on peut dire que la théorie du Velâyat-e Faghih (la souveraineté du Maître de la jurisprudence chiite), qui est l’idée de base dans la création de la République islamique, est ancrée dans cette pensée faisant du guide suprême de la Révolution islamique un représentant provisoire de l’Imâm Mahdi durant son occultation. Comme nous l’avons vu, la Hosseyniyeh du Mouvement islamique du Nigeria est nommée "Baghiyatollah", qui est l’un des principaux titres de l’Imâm Mahdi. Dans ses discours, le Sheikh Zakzaky fait toujours allusion à la doctrine apocalyptique de l’attente de l’Imâm occulté comme un Messie libérateur des peuples opprimés.

Le rôle des femmes dans le Mouvement islamique du Nigeria

Une autre préoccupation pour l’Imâm Khomeiny était l’amélioration des conditions de vie des femmes iraniennes qui, avant la Révolution islamique de 1979, étaient marginalisées par les autorités occidentalisées de l’ancien régime et souffraient des clichés traditionnels ainsi que des mauvaises interprétations des principes islamiques. La même préoccupation existe également chez le Sheikh Zakzaky, qui s’attache fermement à ce devoir d’améliorer le sort et le rôle des femmes dans la société nigériane. Il a ainsi créé "Sisters Forum" dans ce but. Zeynab Ibrâhim, l’épouse du Sheikh Zakzaky, joue un grand rôle dans ces activités culturelles en faveur des femmes nigérianes. Durant le massacre de Zaria en décembre 2015, de nombreuses femmes se trouvaient parmi les martyrs chiites de cette tragédie.

L’attention accordée aux couches défavorisées de la société

Les deux notions coraniques de mostaz’afan (opprimés) et les mostakberan (oppresseurs) sont les éléments basiques du paradigme sociopolitique de la Révolution islamique. En effet, cette Révolution se pense comme étant la révolte des Opprimés contre les Oppresseurs et la réalisation de la promesse divine de la victoire finale des peuples opprimés de la planète. [11] Ce thème est toujours évoqué dans les discours des autorités iraniennes. La popularité du Sheikh Zakzaky, auprès de la société nigériane, est due en grande partie à sa façon de s’entretenir avec les couches opprimées et défavorisées de cette société. Comme l’Imâm Khomeiny qui, contrairement aux leaders politiques élitistes, s’appuyait sur la masse opprimée de la société, le Sheikh Zakzaky prend aussi la même direction en s’adressant au peuple nigérian qui accueille très favorablement le message égalitariste et fraternel de l’islam.

Partie IIILe massacre de Zaria et ses conséquences pour le Mouvement islamique du Nigeria

Depuis le commencement de ses activités politiques dans les années 1980, le Sheikh Zakzaky a été, à plusieurs reprises, arrêté et emprisonné par les gouvernements nigérians qui, sous pression des pays ex-colonisateurs et de certains pays anti-chiites, ne pouvaient pas tolérer l’appel à la justice du leader du Mouvement islamique du Nigeria. Mais à chaque fois, sans ne pouvoir rien prouver contre lui, les autorités se sont vues obligées de libérer cette figure si populaire auprès des musulmans nigérians. Depuis le début de sa carrière politico-religieuse, le Sheikh Zakzaky a passé près de 13 ans de sa vie en captivité dans différentes prisons de l’ةtat nigérian. Les plus célèbres prisons dans lesquelles le Sheikh Zakzaky a été emprisonné sont la prison d’Enugu (1981-1984), le centre d’interrogation de NSO à Lagos (1984-1985), la prison de Port Harcourt (1987-1989 et 1996-1997), et la prison de Kaduna (1997-1998). Depuis l’arrestation illégale du Sheikh Zakzaky en 2015, ce guide vénérable des musulmans nigérians, âgé de 66 ans, souffre physiquement et psychologiquement dans une situation incertaine de détention. Cela nous rappelle la vie des grands héros africains comme Nelson Mandela qui ont passé de longues années dans les prisons du régime de l’Apartheid. Malgré tant de répressions, le Sheikh Zakzaky a continué dans la voie qu’il a tracée. Il a fondé un large réseau d’écoles islamiques en vue d’éduquer la nouvelle génération des musulmans nigérians. Le Sheikh Zakzaky a ainsi créé une Hosseyniyeh à Zaria et y a organisé des discours hebdomadaires en vue de sensibiliser et de former les milliers de fidèles à la cause chiite. Les réunions du Sheikh Zakzaky deviennent un lieu pour recruter de nouveaux disciples. Il bénéficie ainsi d’une popularité croissante auprès de la communauté musulmane et même chrétienne. Respecté de tous, sa popularité et ses importants succès dans l’expansion de ses idées religieuses et politiques suscitent une grande hostilité de la part des pays anti-chiites et de certains dirigeants politiques et militaires du gouvernent nigérian, encore attachés à l’héritage colonialiste néfaste au service des puissances impérialistes. Pourtant, entre 1980 et 2015, le Mouvement islamique du Nigeria a connu une grande expansion dans le pays le plus peuplé d’Afrique. Mais le point culminant des répressions du régime nigérian dirigé par le président Buhari, ex-général de l’armée, a eu lieu en décembre 2015. Déjà, en 2014, à l’occasion du jour de Ghods (Jérusalem), l’armée du Nigeria a massacré 35 civils nigérians dont trois fils du Sheikh Zakzaky lors d’une manifestation pacifique et démocratique. Mais le 12 décembre 2015, les généraux de l’armée sous influence des régimes étrangers ont adopté une autre stratégie orchestrée par les puissances islamophobes : ils ont attaqué la cérémonie religieuse des disciples du Sheikh Zakzaky à Zaria. Durant cet acte de barbarie démesuré qui a duré trois journées successives, quelques centaines de fidèles chiites ont été massacrés par l’armée. Les soldats mercenaires de l’armée n’eurent aucune pitié pour les blessés de cet assaut, et lors d’une attaque secondaire, ils brulèrent vif les blessés et les mutilés chiites hospitalisés. La sœur du Sheikh Zakzaky figurait parmi ces blessés brulés vifs par l’armée nigériane. L’armée démolit la Hosseyniyeh Baghiyatollah et mit feu à la résidence du Sheikh Zakzaky. Les soldats de l’armée sont même allés jusqu’à profaner et dégrader la tombe de sa mère.

Les médias occidentaux ont essayé de justifier ce crime contre l’humanité en diffusant des versions falsifiées des faits. Mais certaines organisations internationales des droits de l’homme, surtout Amnesty International, ont reconnu que, pendant ces trois journées, l’armée nigériane avait commis un crime contre l’humanité. Des centaines de corps de femmes, d’enfants et d’hommes ont été découverts dans des fosses communes creusées par l’armée qui a essayé d’enfouir les preuves de ses crimes. Pendant plusieurs jours, ils ont bloqué l’accès à cette zone pour laver le sang, ramasser les cartouches et effacer les traces de leurs actes barbares. Le Mouvement islamique du Nigeria a présenté une liste de 700 personnes portées disparues au cours de ce violent assaut de l’armée nigériane. Jusqu’à maintenant, 350 corps ont été découverts. De nombreuses femmes et enfants figurent parmi les martyrs de cet évènement tragique qui marquera certainement l’histoire des revendications islamiques au Nigeria. Les experts des questions politiques au Nigeria et les journaux de ce pays ont reconnu le caractère planifié de cette attaque. En effet, le choix conscient de ce jour précis où se déroulait la cérémonie du Mouvement Islamique du Nigeria et de cette zone particulière de Zaria pour faire passer le convoi du chef d’état-major des armées qui voulait, semble-t-il, assister à une parade de recrutement dans un dépôt de l’armée (un évènement militaire d’importance secondaire et dénué d’urgence), montre que ce massacre était programmé à l’avance. Pourquoi le convoi du général Tukur Yusuf Buratai a-t-il choisi une telle route dans une telle zone (le fief du Mouvement islamique) où se déroulait la cérémonie religieuse des disciples du Mouvement ? Et pourquoi les soldats nigérians ont-ils riposté à balles réelles aux civils qui s’étaient rassemblés pour pratiquer leurs rites religieux ? L’acte injustifiable de l’armée a clairement violé la Constitution nigériane et les déclarations des droits de l’homme internationalement reconnues. Mais d’où vient le mutisme honteux des médias occidentaux devant ce génocide manifeste des chiites nigérians ? Ces généraux de l’armée qui, au lieu d’être au service de la nation nigériane et de combattre les terroristes de Boko Haram, se précipitent pour servir les pays étrangers ; ne doivent-ils pas passer devant les tribunaux de la Cour pénale internationale (CPI) pour ce crime contre l’humanité et pour cette discrimination religieuse ?

Depuis cette journée noire du 12 décembre 2015, le Sheikh Zakzaky est incarcéré sans aucun verdict. Même le tribunal fédéral du Nigeria a officiellement clamé l’innocence du leader du Mouvement islamique du Nigeria et a demandé sa libération immédiate. Mais l’armée et le gouvernement du président Buhari prolongent la détention illégale et anticonstitutionnelle du Sheikh. En Iran, ainsi que dans d’autres pays musulmans, de nombreuses manifestations ont été organisées en vue de condamner cet acte tyrannique et criminel de l’armée nigériane. Mais malheureusement, les gouvernements des pays islamiques n’ont pas fait preuve de motivation pour exercer des pressions diplomatiques sur l’ةtat nigérian, et se sont contentés de prononcer quelques messages de condoléances et de condamnation. Même le gouvernement du président Rohani en Iran n’a pas vraiment agi de manière appropriée et n’a pas utilisé toutes ses potentialités diplomatiques afin de convaincre le régime nigérian de libérer le Sheikh Zakzaky. Au Nigeria, les musulmans nigérians continuent de manifester pacifiquement en vue de réclamer sa libération, mais doivent encore affronter les réactions violentes des forces armées nigérianes. ہ titre d’exemple, le 27 octobre 2018, lors de l’une de ces manifestations pacifiques et démocratiques, les soldats nigérians ont encore massacré à Abuja 45 civils nigérians désarmés. Cet acte violent de l’armée nigériane, qualifié d’homicide volontaire, a, une nouvelle fois, été condamné par Amnesty international. [12]

Durant ces derniers mois, le régime nigérian, en changeant sa stratégie, a tenté de détourner la vocation pacifique des revendications du Mouvement islamique du Nigeria en infiltrant quelques-uns de ses agents dans les rangs de ce mouvement en vue de le pousser à déclencher des émeutes. L’assassinat de l’un des prédicateurs d’Izala Society, une entité wahhabite ennemie de ce Mouvement, accompli par les services du renseignement nigérian et étranger, montre bien ce plan diabolique des ex-colonisateurs qui envisagent de susciter des violences interconfessionnelles au sein de la communauté des frères musulmans nigérians. Heureusement, l’intelligence et la clairvoyance des leaders du Mouvement islamique ont fait échouer les stratagèmes de ces ennemis de l’islam. Actuellement, dans la phase des répressions militaires, quel avenir peut-on prévoir pour le Mouvement islamique du Nigeria ? Les centres culturels, la Hosseyniyeh de ce mouvement, et même la résidence du Sheikh sont brisés. Certains leaders de ce Mouvement, comme le Sheikh Touri, le numéro deux du Mouvement, sont tombés en martyrs. Le guide principal de cette organisation religieuse est en captivité et reste dans un état physique critique. Le régime nigérian a mis ce Mouvement dans une situation étouffante sans précédent. Doit-on pour autant conclure que le Mouvement Islamique a échoué dans sa mission ? Est-il arrivé à son point final ? Ou est-ce le calme avant la tempête ? Le bilan de ce mouvement depuis 1980, durant les quatre dernières décennies, est très positif. Aujourd’hui, le Nigeria est le pays africain rassemblant la plus grande population chiite du continent. Parmi les jeunes élèves du Sheikh Zakzaky figurent des personnalités brillantes qui formeront les générations futures du Mouvement islamique du Nigeria. Certains élèves du Sheikh Zakzaky ont suivi une formation de théologie chiite à Qom, le berceau de la Révolution islamique d’Iran. La motivation religieuse et la discipline systématique de cette nouvelle génération des membres du Mouvement islamique du Nigeria, qui bénéficient de quatre décennies d’expérience de résistance politico-religieuse nous permettent d’être optimistes concernant l’avenir de ce Mouvement musulman africain. Autre signe de ce succès : grâce à sa large popularité au nord du pays, le Mouvement islamique du Nigeria ne peut plus être ignoré dans les calculs politiques et dans les élections présidentielles et législatives du Nigeria.

Conclusion

L’objectif de cet article était de présenter une vision comparée de la genèse et de l’expansion du Mouvement islamique du Nigeria et de la Révolution islamique d’Iran. Nous avons d’abord traité l’historique de la présence de l’islam et des revendications politiques des musulmans au Nigeria. Nous avons ensuite étudié les points communs et les axes de convergence entre les deux mouvements islamiques en Iran et au Nigeria. Enfin, nous avons vu les conséquences du massacre de Zaria en 2015, ainsi que la nouvelle phase de la résistance qui s’ouvre pour le Mouvement islamique du Nigeria après cette tuerie. ہ partir de l’ensemble de ces éléments, on peut conclure que l’impact de la Révolution islamique d’Iran sur le Mouvement islamique du Nigeria était plutôt d’ordre idéel, spirituel et méthodologique. S’appuyer sur la force populaire et devenir une voix d’opposition pour les couches défavorisées de la société nigériane étaient une politique khomeyniste qui fut suivie par le Sheikh Zakzaky. Malheureusement, la barbarie de l’armée nigériane et l’acte génocidaire des autorités nigérianes face aux revendications démocratiques du peuple musulman nigérian ont bloqué, pour le moment, la voie de la réalisation des idées progressistes et humanitaires du Mouvement islamique. Le gouvernement nigérian, manipulé par des pays comme l’Arabie Saoudite, Israël et les ةtats-Unis, a barré le chemin démocratique, pacifique et civil que suit le Mouvement islamique du Nigeria. Comme nous l’avons évoqué, malgré les condamnations internationales et le décret de libération annoncé par le tribunal fédéral du Nigeria, qui a acquitté le Sheikh Zakzaky de toutes les accusations, les forces armées refusent de relâcher le guide spirituel des chiites nigérians. Cela montre bien l’inquiétude des puissances colonisatrices et impérialistes vis-à-vis de l’apparition d’un nouveau Khomeiny sur le continent africain. Bien que les ennemis du Mouvement islamique du Nigeria aient pu provisoirement barrer le chemin de cette révolution islamique du peuple nigérian, à l’instar de ce qui s’est passé en Iran, la volonté de Dieu s’imposera certainement malgré les complots et les stratégies des ennemis de l’islam. Les graines que le Sheikh Zakzaky a semées dans le sol fertile du Nigeria vont bientôt donner leurs résultats fructueux. Comme nous assure le Saint Coran :

"Ils envisagent d’éteindre la lumière de Dieu par leurs bouches, mais Dieu parachèvera Sa lumière, en dépit de l’aversion des mécréants." [13]

Bibliographie :

- Rasouli, Navid, Nigeria, Sarzamin-e zabân-hâ va ghomiyat-hâ (Le Nigeria, le pays des langues et des ethnies), ةditions Al-Hodâ, Téhéran, 2007

- Shakibâ, Mohammad Rezâ, Sarzamin va mardom-e Nigeria (Le pays et le peuple du Nigeria), ةditions Al-Hodâ, Téhéran, 2009

- Arab Ahmadi, Amir Bahram, Naghsh-e Bonyâdin-e Sheikh Zakzaky dar sheklgiri va gostaresh-e tashayyo dar Nigeria (Le rôle fondamental du Sheikh Zakzaky dans la formation et l’expansion du chiisme au Nigeria), ةditions Negarestân Andisheh, Téhéran, 2017

- Paden, John, Faith and Politics in Nigeria, US Institute of Peace Press, 2008

- Fasuyi, T, Cultural Policy in Nigeria, UNESCO Publications, Paris, 1973

- Latham, A., Old Calabar, 1600-1891 : the impact of the international economy upon a traditional society, Clarendon press, 1973

- Jenkins George, Kenneth John, The Price of Liberty ; Personality and Politics in colonial Nigeria, Cambridge University Press, 1973

- Taleshi, Hossein, Nigeria, Le Nigeria, ةditions du Ministère iranien des affaires étrangères, Téhéran, 1995

Sites consultés :

- https://www.islamicmovement.org

- https://www.amnesty.org

- https://www.presstv.com

- https://www.newsweek.com/nigerian-court-orders-release-shiite-leader-detained-year-527648

- http://www.sharia-in-africa.net

- https://www.theguardian.com

- https://www.globalsecurity.org

- https://www.britannica.com

- https://www.aparat.com

- https://www.presstv.com

Notes

[1Le Sheikh Ibrahim Zakzaky a révélé ce passage dans une interview accordée à un documentariste iranien. Le film documentaire intitulé Du sang de Jone en deux parties de 40 minutes a été réalisé à propos du Mouvement islamique du Nigeria par le religieux Mojtaba Rezvani. Ce film persanophone est disponible sur Internet à cette adresse : https://www.aparat.com/v/BSrDT
Cette interview du Sheikh Zakzaky se trouve aussi dansun autre film documentaire titré Ibrahim. Ce film de 50 minutes est disponible sur Internet à cette adresse : https://www.aparat.com
Ces deux films ont été diffusés par la chaîne Documentaire de la Télévision nationale de la République islamique d’Iran.

[2Jama’at Izalat-ol-Bed’ah wa Ighamat-os-Sunnah, "La Société de la suppression de l’hérésie et du rétablissement de la tradition", est un organisme wahhabite extrémiste et anti-chiite lié étroitement à l’Arabie saoudite. En profitant de ses importantes sources financières et de ses vastes moyens de propagande, cette organisation salafiste joue un rôle important dans l’organisation des récentes répressions violentes contre le Mouvement Islamique du Nigeria.

[4Le mot Fodio signifie "savant" dans la langue Hausa.

[5Certes, le vrai christianisme basé sur la mission salvatrice et les messages pacifiques de Jésus Christ n’a rien à voir avec les actes barbares des colonisateurs européens qui ont instrumentalisé cette sainte religion monothéiste en vue d’humilier et de métamorphoser les peuples colonisés d’Afrique.

[6La présence des colonisateurs européens au Nigeria remonte au XVème siècle, mais c’est au XIXe siècle et précisément en 1851 que les Britanniques commencent directement leur vaste intervention militaire en vue d’occuper et de coloniser l’intégralité de la terre nigériane. Ils créent administrativement dans ce pays un protectorat au sud et un protectorat au nord. Cette division vicieuse est considérée comme l’une des causes essentielles du conflit Nord-Sud qui continue d’exister même après l’indépendance du Nigeria en 1960.

[7Certains disciples du Sheikh Zakzaky ont coopéré avec le service international de la radiotélévision iranienne qui vient de créer récemment une chaîne en langue hausa.

[8Certaines estimations parlent du chiffre très étonnant de 10 millions de sympathisants pour le chiisme au Nigeria, mais l’ensemble de ces personnes n’adhèrent pas officiellement au Mouvement islamique. Le Nigeria est le pays le plus peuplé d’Afrique avec une population de 200 millions d’habitants.

[9À souligner qu’en vue de suivre ses objectifs culturels et scientifiques, le Sheikh Zakzaky effectue de nombreux déplacements dans les pays étrangers comme les ةtats-Unis d’Amérique, l’Angleterre, l’Arabie Saoudite, la Russie, l’Afrique du Sud, le Soudan, etc.

[10Cela nous fait penser à cette phrase historique de l’Ayatollah Ali Khamenei, le Guide suprême de la Révolution Islamique : "Le nom de la Révolution Islamique ne serait connu nulle part dans le monde sans le nom de l’Imâm Khomeiny."

[11Cette promesse existe dans les versets coraniques. Par exemple le verset 5 de la sourate 28 qui dit : "Et Nous avons voulu accorder Notre soutien à ceux qui étaient opprimés sur la terre et faire d’eux les dirigeants, et faire d’eux les héritiers."

[13Sourate 61, verset 8


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