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n 1927, Kamâl-ol-Molk se retire de la gestion de son école Madreseh-ye sanâye’-e mostazrafeh contre sa volonté et un an plus tard, en 1928, il quitte Téhéran. Mais son école reste ouverte pendant un certain temps, dirigée par certains de ses élèves.
Quand Kamâl-ol-Molk quitte cette école, Ashtîânî [1] est choisi comme président. Ses responsabilités à l’école de Kamâl-ol-Molk ne durent que jusqu’en 1930, date à laquelle il voyage en Europe. [2]
Durant ses années à la tête de cette institution, il y ajoute de nouvelles disciplines comme l’anatomie, l’histoire de l’art et la perspective, et y fonde une bibliothèque. [3]
À cette période, après Âshtîânî, il se produit au ministère de la Culture différents changements. Dans ce contexte, l’école connait des évolutions et une certaine instabilité. Abol-Hassan Sadiqi, peintre et sculpteur qui fut l’un des meilleurs élèves de Kamâl-ol-Molk, retourne en Iran en 1931. [4] Après avoir reçu l’accord de ce dernier, il accepte la présidence de l’école, qu’il conserve jusque vers 1939. [5]
Les cours de peinture pour les anciens élèves restent dans le même lieu, appelé par la suite Honarestân-e Sanâye’-e Jadideh (École des Arts modernes). C’est l’époque du développement d’une autre école nommée Honarestân-e Sanâye’-e qadimeh (École des artisanats anciens). Cette école a été fondée en 1931 afin de développer les arts et artisanats nationaux. [6]
On considère aussi que cette période marque la renaissance de la miniature. [7]7
À la suite de l’école Honarestân-e sanâye’-e qadimeh à Téhéran, d’autres écoles ayant les mêmes buts sont créées à Ispahan et Tabriz.
En 1936, une école est fondée à Ispahan, dirigée par un Allemand, avec deux disciplines : mécanique et menuiserie. La même année, la peinture est ajoutée, sous la responsabilité de Bahâdori qui en était également le seul enseignant. À la fin de la même année, l’administration décide de diviser la discipline de la peinture en trois sections : peinture réaliste (tabiat), miniature, et dessin de tapis. Quelque temps plus tard, deux peintres de Téhéran, Mohammad Mo’fayerî et Mohammad Nâser Safâ, sont invités à Ispahan pour y enseigner la peinture classique. Bahâdori lui-même enseigne la miniature et le dessin de tapis. Après quelque temps, l’école déménage. En 1939, d’autres disciplines sont ajoutées : création de l’émail, tissage de brocart, ciselure et khâtamkâri (marqueterie). Finalement, elle devient une école indépendante sous le nom d’École des Beaux-Arts. En 1943, les premiers diplômés sont employés comme enseignants. [8]
Après ses études secondaires, Bahâdori s’installe à Téhéran pour étudier à l’école de Kamâl-ol-Molk. Quand cette dernière s’est divisée en deux, il rejoint la partie consacrée aux arts nationaux, Honarestân-e sanâye’-e qadimeh (École des artisanats anciens), et étudie le dessin de tapis. Il voyage beaucoup à Ispahan, où il trouve un grand nombre de motifs décoratifs utiles pour cette discipline. Quand il obtient son diplôme, il travaille au bureau des Beaux-Arts et commence à enseigner le dessin de tapis tout en créant des œuvres dans ce domaine. Quand l’école secondaire des Beaux-Arts d’Ispahan est fondée, il est choisi comme directeur. [9]
Né à Ispahan, c’est le fils du peintre Mohammad Hassan naqqâsh. Son grand-père est le peintre Zeynolabedin naqqâsh et son ancêtre, le peintre Mohammad Karim naqqâsh. Il dit à ce propos : « Je suis né dans une famille de peintres. Mes ancêtres jusqu’à l’époque des Safavides étaient peintres les uns après les autres. Mon père parfois déclarait en plaisantant : dans nos veines, ce n’est pas du sang, mais de la couleur. » [10] Le bureau des Beaux-Arts d’Iran avait organisé une classe spéciale pour Hâj Mosavver-ol-Molki à l’école des Beaux-Arts d’Ispahan, sa ville, afin que des auditeurs libres, en dehors du système scolaire de l’école des Beaux-Arts, puissent la fréquenter. [11] Il a appris l’art de la fabrication et la peinture de plumier sous la tutelle de son père. [12] Quand la fabrication des plumiers est progressivement devenue obsolète, il a exercé d’autres activités dans le domaine de la peinture, et a atteint la célébrité. [13] On peut estimer en la matière que son art reprend les techniques du style de l’école d’Ispahan. Selon Ali Karimi, il avait appris le dessin de tapis et sur la céramique à près de quarante ans, parallèlement à la miniature et à l’enluminure, ainsi que la technique de l’aquarelle et de l’huile et le portrait en autodidacte. [14] Hâj Mosavver-ol-Molki estime qu’« il y a un ou deux siècles que le miniaturiste iranien imite les maîtres du passé, avec beaucoup de préjugés, mais peu d’habileté et d’initiative. Au lieu d’utiliser les traditions et les valeurs précieuses de la miniature passée afin de trouver de nouvelles capacités et des solutions nécessaires, il a fermé le chemin de la virtuosité, de l’imagination et de la création, et s’est contenté de copier les œuvres originales anciennes. » [15]
Il a aussi pensé que le problème de la miniature contemporaine était le manque de repères réalistes, et a dit : « Au début de l’époque pahlavi, [...] je suis allé en France, à Paris pendant six mois. J’ai essayé d’étudier les diverses écoles de la peinture occidentale. La diversité et l’étendue de ces écoles et les œuvres peintes des artistes occidentaux étaient vraiment extraordinaires. [16] » Comme d’autres, il a tout d’abord pensé à la perspective : « Pour la première fois, je fais entrer la perspective scientifique dans la miniature. C’était nécessaire puisque dès le début de l’ère qâdjâre, cela s’était lentement réalisé. » [17]
Abbâs Rassâm Arjangî a créé une école d’art similaire à Tabriz, en 1932, où la miniature était enseignée. La première école d’art à Tabriz nommée Madreseh-ye sanâye’-e mostazrafeh avait été créée en 1918, et était dirigée par son frère, Mîr Mosavver Arjangî. [18] Cette école, similaire à celle de Kamâl-ol-Molk de Téhéran, est restée ouverte pendant dix ans. [19] Néanmoins, plus tard, avec l’évolution de l’école de Kamâl-ol-Molk à Téhéran, l’école de Tabriz a également été transformée et agrandie par Rassâm Arjangî, tout en gardant le même nom. En 1938, elle a encore subi de nouveaux travaux d’agrandissement et est devenue similaire à l’école fondée par Tâherzâdeh Behzâd à Téhéran, ainsi qu’à l’école des Beaux-Arts d’Ispahan. [20] Tandis que la peinture « nature » existait déjà, Rassâm Arjangî enseigna la miniature, l’enluminure et l’anatomie. Cette école avait un atelier de dessin de tapis ainsi qu’un atelier de tissage de tapis. Cette école a été fermée après quelques années. Lors de la fondation des écoles des Beaux-Arts à Téhéran, selon l’ordre de l’Administration des Beaux-Arts, l’école des Beaux-Arts de Tabriz fut établie en 1957. Cet établissement est connu sous le nom de Mirak. [21]
Abbâs, connu sous le nom de Rassâm Arjangî, était expert dans les techniques de l’aquarelle et de la peinture à l’huile. Il travaillait en suivant un style réaliste, et composait aussi des miniatures : bazmi et razmi [22]. En 1910, âgé de dix-huit ans, il se rendit à Tbilissi pour y apprendre la peinture. Après quelques années, il quitta cette ville pour étudier à l’université de Moscou, mais dût retourner en Iran avant de terminer ses études en raison de la Première Guerre mondiale.
Il a réalisé des œuvres dans le domaine de la peinture réaliste et de la caricature, ainsi que dans celui de la miniature. Avant Tajvidi et Hossein Behzâd, il a essayé d’apporter certains changements à la miniature. Il a affirmé : « Quelques peintres, qui n’ont pas travaillé selon le style de la peinture réaliste et ne savent rien à ce sujet, tiennent un discours dénué de signification et de fondement. Ils envisagent un programme spécial pour la miniature : par exemple quelle forme faut-il peindre pour un cheval, comment faut-il faire figurer un poulain, quelle sorte de silhouette et de forme faut-il pour l’arbre. Ce discours vient de ce qu’ils ne peuvent simplement pas faire de la peinture ; leurs mains sont habituées à des choses disproportionnées et mauvaises. Ils veulent donc couvrir les défauts de leur travail en disant « j’ai fait de la miniature », mais la miniature, c’est l’imitation de la nature et pas autre chose ; et il n’y a pas de programme. » [23] Dans ses miniatures, Rassâm Arzangi a essayé de tout représenter de manière réaliste et propre à son époque, y compris le détail des visages.
* Maître de conférences, Département d’art et d’architecture, Université de Yazd
[1] Kamâl-ol-Molk choisit Esmâ’il Âshtîânî (1892-1970) comme professeur de l’école et en 1916, Âshtîânî est choisi comme vice- président. (Rû’în Pâkbâz, Dâerat-al-ma’âref-e honar, p. 30.)
[2] Rû’în Pâkbâz, Dâerat-al-ma’âref-e honar, p. 30.
[3] Voir Anonyme, “Âshtîânî,” Honar va Mardom, Mordâd 1349 (1970), n° 94, p. 7.
[4] Sadiqi a voyagé en Europe pour poursuivre ses études, en 1928, l’année où Kamâl-ol-Molk est parti de Téhéran. Voir Mortezâ Momayyez, “Awwalin mojasameh sâz-e mo’âser,” Honarhâ-ye zibâ, 1376 (1997), n° 2, p. 12.
[5] Mortezâ Momayyez, op. cit., p. 12 ; également le site de Sadiqi : http://www.sadighi.com/
[6] Karimi Ali, “Miniyatûr-e irâni (7),” p. 38.
[7] Ibid. p. 40.
[8] Voir Mostafâ Kâviâni, “Mo’arefi-e tchand tchehr-ye derakhshân-e honar-e mo’âser-e esfahân,” Dâneshkadeh-ye adabiât va ’olum-e ensâni (Dâneshgâh-e Esfahân), 1379 (2000), n° 20-21, p.191. Également voir Royâ Qazvini, “Honarestân-e honarhâ-ye zibâ-ye esfahân,” Farhang-e Esfahân, 1385 (2006), n° 33-34, p. 124.
[9] Mahmûd Eftekhârî, op. cit., pp. 90-91.
[10] Rahmân Hâtefi, “Hâj Mosavver-ol-Molki, Ostâd-e nâm-âvar Miniyatûr (2)”, Honar va mardom, n° 102,103, Farvardîn va Ordîbehesht, 1350 (1971), p. 48.
[11] Ali Karimi, “Hossein Hâj Mosavver-ol-Molki,” Honar va mardom, n° 24, Mehr, 1343 (1964), p. 19.
[12] Ibid., p. 20.
[13] Ibid., p. 19 ; Rahmân Hâtefi, “Hâj Mosavver-ol-Molki, Ostâd-e nâm-âvar Miniyatûr (2),” Honar va mardom, n° 102,103, Farvardîn va Ordîbehesht, 1350 (1971), p. 48.
[14] Ali KARIMI, op. cit., pp. 19-20.
[15] Rahmân Hâtefi, op. cit., p. 47.
[16] Idem, p. 50.
[17] Ibid.
[18] Voir Zabihollâh Bedagi, “Yahyâ Dolatshâhi,” Honar va mardom, n° 189 -190, Tir et Mordad, 1357 (1978), p. 48. Voir également Mohammad-Ali Mo•’3fayyeri, “Yâd az Mîr Mosavver Arjangî,” Âyande, Âbane, 1367 (1988), n° 6-8, pp. 293-296.
[19] Cette durée de dix ans est ma conclusion sur la base de la date de son départ pour Téhéran. À cette époque, l’État avait décidé de fonder une école artistique dans toutes les villes d’Iran. À ce moment-là, une école semblable portant le nom de Madreseh-ye sanâye’-e mostazrafeh a été fondée à Qazvin et est restée active un certain temps. (voir : Zabihollâh Bedagi, op. cit., pp. 48-54.) Une école appelée Madreseh-ye sanâye’-e mostazrafeh a été fondée à Rasht par Ali Naqi Vaziri en 1929, et il en a confié la gestion à Abolhassan Sabâ. Elle offrait essentiellement des formations sur la musique. Abolhassan Sabâ, qui avait appris la musique chez Vaziri, a étudié la peinture à l’école de Kamâl-ol-Molk pendant un certain temps. Sâsân Sepantâ, “Negâhi be zendegi, shiveh-e kâr va âssâr-e ostâd Abolhassan Sabâ,” Adabestân farhang va honar, Dei, 1369 (1990), n ° 13, p. 16.
[20] Dans ce cas, il y a ambiguïté : on ne sait pas si c’est la même école qui a été transformée, ou si c’est une autre école.
[21] Homâyûn Mûsavi, “Negâhi be âmûzesh-e motavaset-e naqâshi dar Irân,” Âine Khiâl, Esfand, 1386 (2008), n° 5, p. 74.
[22] Mohammad-Ali Mo’ayyeri, op. cit., p. 296. Voir M.-A. Karimzâdeh Tabrizi, Ahvâl va âsâr-e naqqâshân-e qadim-e, London, 1363 (1984), Vol. 1, pp. 184-185.
[23] Anonyme, “Miniyatûr va naqqâshi”, Sâlnâmeh Âriâ, 1321 (1942), p. 105.