N° 17, avril 2007

L’écotourisme en Iran et les zones de libre-échange du golfe Persique


Marzieh Kohandâni


De nos jours, le tourisme compte parmi les activités économiques les plus florissantes au monde. La croissance rapide et stupéfiante de la vie urbaine et ses conséquences ont contribué au développement de cette industrie mondiale, de telle sorte qu’aujourd’hui, sa progression est plus importante que celle du commerce mondial. L’apparition de tout un marché du voyage et du loisir et les investissements réalisés dans ce domaine a ainsi permis à beaucoup de pays de dégager des revenus colossaux. Peut être qu’il y a quelques décennies, peu nombreux étaient ceux qui auraient cru en cette croissance exponentielle. Malgré la présence de certains problèmes et difficultés, l’Iran constitue un terrain d’investissement favorable pour ce secteur, lui permettant d’augmenter la part de ses revenus non pétroliers. Il rapporte à des pays voisins comme la Turquie 12 millions de dollars, et connaît une importante expansion dans les ةmirats Arabes Unis. Par rapport à ses voisins, l’Iran détient certains atouts : un patrimoine historique important ainsi qu’un climat, une faune et une flore très diversifiés ; de ce point de vue, il fait partie des dix pays les plus privilégiés et les plus riches du monde. Il est dommage que de multiples et complexes raisons politique, économique et sociale n’aient pas favorisé le développement d’un écotourisme.

La place de l’écotourisme dans le monde

L’organisation mondiale du tourisme est convaincue que dans une décennie, plus de 20 % des touristes actuels du monde auront visité la nature et ses beautés, alors qu’ils ne représentent actuellement que 7 %. Et si on ajoute à la définition de l’écotourisme et du tourisme de nature d’autres sortes de tourisme comme le tourisme sportif, rural, nomade etc., les 20 % seraient susceptibles d’atteindre 50 %. D’après les estimations de la société internationale de l’écotourisme (TIES), les adeptes du touriste de nature peuvent être répartis en deux groupes d’âge qui se distinguent surtout de par leur motivation à voyager : un groupe qui recherche l’aventure, la découverte de contrées sauvages, et qui a en général entre 19 et 35 ans, et un autre se situant dans la limite d’âge entre 35 à 54 ans y recherchant davantage calme et repos.

De même, les études de la TIES tendent à montrer que plus de 80 % de ces touristes internationaux ont fait des études supérieures, et ce chiffre arrive à 100% quand il s’agit de personnes dont le but est de changer d’air et de communier avec la nature. Parmi les écotouristes internationaux, 60 % préfèrent les voyages en groupe, 15 % les voyages en famille et 13 % les voyages individuels. Ils sont à peu près 80 % à partir de 8 à 14 jours. Les études montrent que pour chaque voyage, les écotouristes dépensent de 1000 à 1500 dollars, somme qui peut encore s’élever selon le type de voyage choisi.

Les statistiques montrent qu’en 1996, les revenus de 300 000 personnes en Amérique dépendaient directement ou indirectement de l’écotourisme. Ce secteur a depuis connu un développement considérable. Dans les années 80, la croissance de l’écotourisme de beaucoup de petits pays a atteint près de 255 %. Des pays tels que le Costa Rica et le Kenya doivent ainsi près d’un tiers de leurs revenus en devises à l’écotourisme. Cette croissance n’a été possible que grâce à la sauvegarde des espèces animalières, la protection minutieuse de l’environnement naturel zoologique, ainsi qu’à une publicité importante faite sur la vie sauvage de ces pays.

La place de l’écotourisme en Iran

Beaucoup d’experts mondiaux placent l’Iran parmi les 5 premiers pays ayant un intérêt pour l’écotourisme. Ce pays abrite un grand nombre d’espèces dispersées, non répertoriées et, dans beaucoup de cas, en voie de disparition.

Considérant son potentiel d’investissement et l’étendue de ses ressources naturelles, l’écotourisme en Iran constitue une richesse et un potentiel sans pareil. Sa latitude géographique, ses conditions topographiques et sa diversité biologique le singularisent. Il abrite également le plus grand lac du monde au nord et un littoral de 1200 km de côtes avec le golfe Persique au sud, 50 lacs intérieurs - dont 18 comptent au nombre des zones humides de la convention internationale de Ramsar -, le lac d’Orumiyeh - l’une des 59 ressources naturelles du monde -, des forêts denses au nord formées d’une végétation séculaire et unique en son genre, de vastes déserts, des chaînes de montagne avec de hauts sommets, sans oublier une grande diversité de cultures.

On peut énumérer de la façon suivante les attraits de l’Iran pour l’écotourisme :

- La randonnée, qui comprend la découverte du monde animal, la découverte de paysages et de ressources naturelles uniques, l’étude et la recherche en milieu naturel etc.

- La chasse et la pêche, incluant la chasse et la pêche

- L’ethnologie : le tourisme nomade, le tourisme culturel et le tourisme rural

- Les sports d’hiver : le ski, la luge, la randonnée en montagne

- Les sports nautiques : la natation, la navigation, le ski nautique

- La découverte du désert avec les tours caravaniers

- Les soins par la nature : les cures thermales, la thalassothérapie, les centres de cure à la campagne

- La découverte des roches et des cavernes avec l’escalade, la marche sur la glace, la spéléologie

Comparé aux autres types de tourisme, l’écotourisme en Iran comprend certains avantages :

- Le développement de l’écotourisme ne demande pas d’importants investissements pour créer des infrastructures telles que la construction de routes, d’hôtels etc. ;

- Il favorise la protection et la sauvegarde des paysages et de l’environnement naturel ;

- Les écotouristes sont très sensibles aux règles sociales et religieuses du pays hôte ;

Les charmes et les capacités écotouristiques des zones de libre-échange du sud du pays en font des endroits particulièrement propices au développement de l’écotourisme.

Les sports de plage et les sports nautiques en zone libre

La côte sud iranienne compte parmi les pôles touristiques centraux du pays. Ces dernières années, les deux célèbres îles du golfe Persique, Kish et Gheshm, ont joui des plus importants investissements touristiques. Il faut considérer que si le tourisme bleu (tourisme du littoral) de l’Iran veut prendre un essor international, il peut seulement compter sur l’écotourisme et le tourisme de nature.

L’île de Gheshm, qui se trouve près du détroit d’Ormuz, est la plus grande île du golfe Persique. Généralement, ses côtes sont propices à la construction de ports. Outre la ville même de Gheshm, cette île abrite des villages traditionnels ainsi que la mangrove de Harâ, qui est l’une des plus rares végétations aquatiques du monde.

L’île de Kish possède quant à elle la deuxième plus grande superficie du golfe Persique. Actuellement, cette île est dirigée par l’organisation des zones libres. Elle bénéficie, avec l’île de Tchâbahâr, d’importants revenus provenant du commerce et de la création de facilités douanières qui sont propres aux zones de libre-échange. De plus, elle possède, en dehors des sports de plage et des sports nautiques, un remarquable potentiel pour le développement de l’écotourisme. Elle propose la découverte de la riche culture locale, ainsi que des tours spécialisés dans la plongée sous-marine, la navigation, le ski nautique etc.

Les forêts de Harâ (mangrove)

Malheureusement, les coûts élevés, certaines contraintes et une publicité insuffisante font que beaucoup de touristes préfèrent voyager dans des pays voisins du golfe Persique, comme les ةmirats et le Qatar, alors même que la création de ces zones de libre-échange et les investissements de quelques 100 millions de dollars réalisés avaient pour but d’attirer les touristes et les commerçants destinés à favoriser le développement économique de la région.

Les richesses naturelles des zones libres du Sud

Ces régions ont de très importants habitats naturels, qui abritent de nombreuses réserves d’animaux et de précieuses plantes aquatiques. Elles ont un rôle essentiel dans le cycle de la vie aquatique et en tant que réserve de pêche.

Les régions coralliennes

Les régions coralliennes constituent l’un des habitats sensibles de l’île de Kish. Elles ont un rôle particulier central dans la chaîne alimentaire aquatique. Les récifs de corail ressemblent à des villes englouties dans les fonds sous-marins. Ils se trouvent à proximité de la côte et sont la cause du peu de profondeur de l’eau. Jusqu’à présent, 29 sortes de coraux ont été répertoriées. En plus de leur utilisation en médecine, ils sont aussi utilisés dans l’écotourisme pour la plongée.

Les forêts de Harâ (mangrove)

Les formations sédimentaires dans la zone libre de Tchâbahâr

La hauteur de ces arbres toujours verts atteint jusqu’à trente mètres dans certaines régions et les arbustes mesurent de 2 à 4 mètres. Leurs feuilles sont d’un vert brillant ou bien grises. En été, de petites fleurs en grappes bourgeonnent à l’extrémité de leurs branches. La mangrove de Harâ située sur l’île de Gheshm se propage et se régénère très difficilement, si bien que son développement est limité. L’ensemble de Harâ, en tant que réserve biologique de la planète, est protégé par l’UNESCO. De façon générale, ces " forêts maritimes" ont un rôle écologique important puisqu’elles empêchent l’érosion côtière. Elles constituent également des endroits appropriés pour le développement d’une faune diversifiée : poissons, coquillages, crevettes, escargots etc. Le bois de ces arbres est utilisé dans l’industrie et l’artisanat.

Les oiseaux et les mammifères des zones libres du Sud

Ces îles se trouvent sur le passage des oiseaux qui immigrent de l’hémisphère nord vers l’hémisphère sud. Environ 22 millions d’oiseaux de toutes sortes suivent cette route chaque année à la saison hivernale et s’approvisionnent dans ces régions, ce qui leur confère une importance écologique mondiale. Les dauphins, compagnons de toujours des navigateurs, sont souvent visibles dans ces régions, ainsi que les baleines qui s’égarent parfois quelques moments dans ces eaux.

Les poissons et autres animaux marins

Près de 340 sortes de poissons, tortues, crevettes, crabes, étoiles de mer, requins, hippocampes etc. sont répertoriés dans ces régions, ce qui contribue à attirer de nombreux touristes et chercheurs.

Les capacités écotouristiques des zones de libre-échange du sud de l’Iran

Ces régions ont d’énormes capacités, actives ou potentielles, pour attirer les écotouristes. De la longue liste de leurs points positifs, il faut surtout considérer les facteurs suivants :

- Les caractéristiques environnementales et naturelles de ces régions et l’existence de paysages uniques ;

- L’absence de problèmes douaniers et la présence de facilités d’entrée et de sortie du territoire ;

- Des réseaux de transports de qualité ;

- Moins de barrières culturelles par rapports aux autres régions intérieures du pays ;

- Le voisinage avec les pays arabes ;

- La disponibilité de facilités utiles à l’écotourisme comme les sports nautiques ;

- Moins de pollution visuelle et acoustique.

Difficultés futures

Quelques difficultés demeurent cependant susceptibles de limiter la venue d’écoutouristes dans ces zones. On peut citer la pollution des eaux entourant ces régions, qui résulte de plusieurs facteurs tels que l’exploration, l’exploitation, le raffinage et l’exportation pétrolière.

- La pollution produite par le trafic maritime (pétroliers, bateaux de commerce...) ;

- Les changements physiques des fonds sous-marins et du littoral, causés par les activités industrielles, urbaines, portuaires et autres ;

- La pollution causée par les guerres (Iran-Iraq, Koweit-Iraq) ;

- La pollution venant de sources inconnues ;

- Les égouts, etc. ;

- Les problèmes créés par les failles de l’administration, l’absence de réponses de la part des dirigeants, les luttes d’intérêts personnels ;

- Les problèmes liés à la direction et à la mainmise du gouvernement, particulièrement en ce qui concerne le littoral ;

- Un faible nombre d’investisseurs étrangers ;

- Le coût élevé des dépenses pour les touristes et les promeneurs nationaux (frais de transport, etc.) ;

- L’absence de direction et de stratégie dans les plans de développement du littoral ;

- L’absence de marketing approprié pour attirer les écotouristes des pays ciblés ;

- Une publicité intérieure et extérieure insuffisante.

Les solutions proposées pour attirer les écotouristes et les promeneurs vers les zones de libre-échange

Grâce à certaines actions, il est possible de faire prospérer l’écotourisme dans ces régions. Elles peuvent se borner à :

- La création de facilités et de possibilités, afin que les visiteurs puissent acquérir des expériences enrichissantes.

- La mise en place d’une stratégie sous forme de direction et de planification du littoral. Il faut prendre en compte le fait que le littoral est très vulnérable, et que la largeur des côtes de ces régions est très étroite. La construction de bâtiments et d’infrastructures peuvent alors causer de nombreux dommages aux côtes coralliennes. De même, l’utilisation de pesticides agricoles cause des dégâts irréversibles.

- L’éducation des gens par la presse et les médias. Par exemple, les écotouristes nationaux et même étrangers, au moment de nourrir les poissons, doivent respecter les points suivants : ne pas donner à manger aux poissons dans les zones de pêche, car cela créé des perturbations dans les activités des espèces. Que seule soit donné de la nourriture réservée aux poissons, sans que rien n’y soit ajouté. Il faut aussi, pour la natation et la plongée sous-marine, donner quelques instructions : le nageur doit faire attention à ne pas toucher aux animaux, à ne pas influer sur la trajectoire d’un poisson qui nage librement, ou à ne pas heurter de ses pieds les animaux vivants.

- L’utilisation de guides compétents et connaissant le milieu naturel ;

- Des réseaux de transports accessibles et peu coûteux ;

- La construction d’hébergements de différentes sortes à prix convenables, et la création de refuges équipés ;

- Des publicités nécessaires pour faire connaître la nature et le patrimoine de l’Iran ;

- Un développement du marketing et de connaissance des habitudes, des marchés et des gens du pays hôte, la création d’office de renseignements ;

- Attirer les investisseurs privés, et plus particulièrement les investisseurs étrangers ;

- La diminution de la bureaucratie.

La sauvegarde et la restauration de cet environnement et la réponse aux attentes des touristes seront les facteurs décisifs permettant le développement de ce secteur. L’objectif final du tourisme est la satisfaction du client, sachant que chaque touriste mécontent peut dissuader près de 20 personnes de voyager. Un touriste dépense à peu près le prix de 50 barils de pétrole durant son séjour. L’importance de quelques millions de touristes est donc aisément compréhensible, et ceci d’autant plus quand on sait que le développement de ce secteur s’inscrit dans le long terme.

Les responsables des zones de libre-échange peuvent, de par des investissements ciblés et judicieux, empêcher la sortie des devises du pays. La capacité de l’Iran à attirer les écotouristes est bien plus grande que celle des pays arabes, et comme il l’est souvent évoqué, ces derniers profitent bien souvent de la négligence dont a été victime le secteur dans ce pays.


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