N° 6, mai 2006

L’art du khatamkâri


Helena Anguizi


Le Khatamkari, cet art d’ornement de la surface des objets par l’incrustation de minuscules morceaux de bois triangulaires qui viennent se poser côte à côte, remonte à si loin, qu’il serait difficile de lui trouver une origine. Un art dont le commencement remonte, comme beaucoup d’autres métiers d’art, aux plus anciennes légendes, de sorte que dans certains récits, on relate que le vénéré Ibrahim pratiquait lui aussi cet art. Quoi qu’il en soit, les plus anciens Khatamkaris, ont été découverts lors de fouilles archéologiques en Egypte. Il existe également d’autres spécimens qui sont précieusement gardés dans les plus célèbres musées du monde, tel le Métropolitain.

En Iran également, l’art du khatamkari ne date pas d’hier, comme en témoignent de nombreux et magnifiques travaux, tel la terrasse de la grande mosquée de Chiraz, ou le Menbar (lieu de prédication où les sermons sont prononcés dans les mosquées), en bois massif de la mosquée d’Ispahan.

C’est durant l’ère Safavide que ce savoir faire a atteint son apogée. Tous les artisans de l’Iran se sont réunis à Ispahan et ont redonné vie à cet art datant de l’antiquité.

C’est précisément à cette époque que le Khatamkari, se dota en Iran d’un style incomparable et unique en soi. En effet les artistes de renom se sont consacrés à l’illustration en utilisant des matières inédites, comme le fer, les os et des pigments naturels pour travailler, dans un ordre précis, sur des polygones de tailles différentes.

L’encyclopédie des arts traditionnels, évoque le Khatamkari en ces termes : Art d’orner la surface des objets sous forme de mosaïque ou petits triangles. Les motifs travaillés sont géométriques et prennent forme par l’alignement de petits triangles en bois, en métal ou en os. Plus les triangles seront petits et fins et plus la diversité des couleurs sera grande, plus le Khatam aura de valeur.

La fabrication de la plus petite forme géométrique nécessite au moins trois triangles et la plus grande, quatre, au maximum. Pour la décoration de tout objet, l’utilisation d’un matériel précis s’impose. L’artiste se procure tout d’abord toutes sortes de bois et d’ossements dans différentes couleurs qui sont ensuite taillés sur trente centimètres de long et un millimètre de diamètre, sous forme de triangles, et sont ensuite limés au fil de fer. Vient ensuite l’étape où le maître fait une première esquisse, et une fois le modèle dessiné et approuvé, les morceaux de bois sont rassemblés avec de la colle de menuiserie et le tout est attaché fortement avec de la ficelle. Cette étape du travail est appelée "Parak".

L’artiste s’assure ensuite que le bois est bien fixé, avant de défaire les ficelles pour le retravailler à la lime. Une fois cette étape terminée, on procède au "Touglou", étape où l’on rassemble par quatre, les morceaux de bois qu’on colle à nouveau. L’étape suivante appelée "Golpichi", consiste à rassembler à l’intérieur d’un cadre métallique, les triangles, de manière à obtenir une étoile. Cette étape se répète jusqu’à obtention du résultat voulu. Le tout est ensuite compacté à l’aide d’une machine et découpé en fines tranches. A ce niveau, le travail a déjà connu plus de quatre cents différentes étapes, les unes plus précises que les autres. Mais le travail est loin d’être achevé. Après toutes les finitions, on colle de fines lamelles de bois autour du travail et c’est à partir de là qu’ une nouvelle étape commence. Les parcelles de Khatam sont sélectionnées en fonction de leurs dimensions et de leurs couleurs et sont ensuite fixées à la colle à leur emplacement avant de recevoir un dernier coup de lime. Le travail s’achève par le vernissage de la surface du Khatam.

La valeur d’un bon Khatam dépend de l’harmonie et de la résistance des couleurs, de la symétrie des formes, mais surtout de sa surface lisse et sans failles.

Le premier centre qui lança l’enseignement académique du Khatamkari, fut fondé en 1928, grâce aux efforts de Kamalolmolk. C’est durant ces mêmes années qu’une partie du palais de marbre et le salon du Madjlis islamique furent ornés de Khatams.

Signalons en guise d’exemples les magnifiques caisses des sépultures du vénéré Mossa Ben Djafar et de l’Imam Djavad qui se trouvent à Kazemieh et dont la construction remonte au règne de Chah Esmaïl (Roi safavide), ornées par la main du maître Mohammad Djomleh. Egalement, le cercueil où repose en paix l’imam Hassan Assghari (que la paix divine soit sur lui), celui de l’Imam Ali Naghi, qui se trouve à Samérah et le cerceuil du sépulcre de Narguesse Khatoun, mère de l’Imam Mahdi (que Dieu hâte sa parousie). Nul ne passera sans étonnement devant le magnifique portail de l’école de Tchahar Bagh (Quarte jardins) d’Ispahan et celui de l’Imamzadeh Chahréza à Ghomcheh sans compter beaucoup d’autres magnifiques Khatams issues des différentes époques de notre histoire.


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1 Message

  • L’art du khatamkâri 24 août 2014 08:13, par line Arnaud

    Bonjour,

    Pouvez-vous m’ adresser cette revue N° 6 Mai 2006 sur l’ artisanat KathamKari,svp.

    Arnaud Line 107 ,AV DE VERDUN 92130 iSSY LES MOULINEAUX

    Merci d’ avance.L.Arnaus

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