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Takht-e Soleymân
Le quatrième site historique iranien inscrit au patrimoine mondial de l’Unesco*
Takht-e Soleymân est le nom d’un lieu historique situé près de Takâb et du village de Takht-e Soleymân (Nosrat Abâd), dans la province de l’Azerbaïdjan de l’ouest. Il fut l’un des lieux les plus sacrés du zoroastrisme. Selon les historiens, ce lieu fut peuplé dès le premier millénaire avant J.-C. Cette région rassemble des monuments datant des époques parthe, sassanide et ilkhânide, dont plusieurs âtashkadeh ou "temples du feu" zoroastres, des monuments datant de l’époque sassanide situés sur la montagne Belqeis, ou encore la prison de Soleymân près de Takht-e Soleymân. A l’époque sassanide (IIIe-VIIe siècle), les zoroastriens iraniens avaient trois principaux temples du feu : Borzin Mehr (le feu de l’amour élevé) près de Neishâbour et qui appartenait aux agriculteurs, Farbaq (le feu de la grâce divine) à Karyân, dans la province de Fârs et qui appartenait aux prêtres zoroastriens et enfin le temple du feu Azargoshasb, qui appartenait aux armées et se trouvait près d’une ville appelée Gandjak, sur la montagne Asnavand, en Azerbaïdjan. Il fut construit probablement à l’époque du règne de Peroz, grand- père d’Anoushiravân. La région de Takht-e Soleymân est avant tout célèbre pour l’existence de bâtiments datant de l’époque sassanide : le temple du feu d’Azagoshasb, le temple d’Anâhitâ, le musée de Hadayâ, la prison de Soleymân, la forteresse Belqeis ainsi que les vestiges d’un palais de l’époque ilkhânide.
"Azargoshasb" signifie "le feu du cheval". D’après une légende iranienne, Keykhosrow, lors de la conquête de Bahmandej (la forteresse de Bahman) se battit avec les démons qui par magie rendirent l’univers ténébreux. Un feu descendit alors sur la crinière de son cheval et rendit le monde de nouveau lumineux. Keykhosrow, après avoir battu les démons et conquis Bahmandej, mit ce feu dans la forteresse pour rendre grâce de sa victoire. Ce feu et ce lieu furent ainsi nommés le feu du cheval (âzargoshasb), et par la suite appelés Takht-e Soleymân.
Le temple du feu d’Azargoshasb, construit de diverses sortes de pierres, est un ensemble composé d’une salle carrée avec un dôme : près de cet ensemble, à l’est, se trouve un autre ensemble composé également d’un autre temple du feu en forme de croix ainsi que de deux salles avec des colonnes carrées et quelques pièces.
Azargoshasb a de nombreux noms : Ganzak ou Gandjeh en pehlevi, Gazka en romain et Shiz en arabe. Le nom plus récent de "Takht-e Soleymân" fut utilisé pour la première fois par les habitants de cette région aux XIVe et XVe siècles en s’inspirant de certaines histoires religieuses sur le prophète Salomon ("Soleymân" en arabe et en persan). Le nom d’Azargoshasb est répété maintes fois dans les textes de l’Avesta ainsi que dans d’anciens manuscrits iraniens, grecs, arméniens et romains. Ferdowsi a également évoqué à de nombreuses reprises le nom du temple du feu d’Azargoshasb dans son Shâhnâmeh.
Le temple du feu Azargoshasb avait une importance religieuse de premier ordre ; il était également le symbole du pouvoir des Sassanides et jouait un rôle important dans la vie politique et sociale de cette dynastie. A titre d’exemple, après la défaite du mazdakisme, Khosrow Parviz fit restaurer ce temple du feu qu’il considérait comme la cause de l’unité nationale et religieuse du pays. En 624, le temple du feu fut détruit par Héraclius puis le lieu fut peu à peu laissé à l’abandon. Aux XVIIe et XVIIIe siècles de l’ère chrétienne, les orientalistes européens commencèrent à effectuer des études sur cette région.
Outre le site historique en lui-même, le visiteur de Takht-e Soleymân peut également visiter le lac naturel situé aux alentours dont la profondeur maximale atteint près de 112 m. Etant donné sa haute teneur en sel, l’eau de ce lac ne peut cependant pas être utilisée pour irriguer les cultures alentours. Selon les prêtres zoroastriens, ce lac appartient à Nâhid (Anâhitâ), la déesse de l’eau et d’après d’anciennes légendes, un monstre habiterait toujours dans le lac. D’après une autre légende, Salomon aurait vaincu plusieurs démons et les aurait jetés dans une montagne dans laquelle il y avait un trou profond, et qui serait la montagne même située à côté de Takht-e Soleymân.
D’après les historiens, en 547 av. J.-C., après avoir vaincu Crésus, le riche roi de Lydie, Cyrus le Grand aurait invité celui-ci en Iran à verser ses biens précieux comme vœu (nazr) dans le lac. Si cette histoire est vraie, on peut ainsi supposer que le trésor s’y trouverait encore… On raconte également qu’à l’époque des Parthes, lors d’une guerre contre l’empire romain, Antonio, le commandant de l’armée romaine, aurait assiégé la forteresse Gaznak. Au cours de ce siège et pressentant leur défaite, les gardiens du temple auraient jeté les objets précieux du temple de feu et du temple Nâhide dans le lac. Les prêtres zoroastriens du temple auraient fait de même au cours d’une guerre opposant Khosrow Parviz à Héraclius qui parvint à s’emparer de la forteresse. Si ces récits sont avérés, les profondeurs du lac regorgeraient d’objets appartenant aux époques parthe et sassanide.
Deux routes principales permettent d’accéder au site : la route de Zandjân ou celle de Takâb. Cette dernière est plus facile et belle. Takht-e Soleymân se situe dans une région montagneuse et dès l’automne, il y fait très froid. Il est donc préférable de le visiter au printemps ou en été.
* Les autres sites historiques iraniens inscrits au patrimoine mondial de l’Unesco, selon l’ordre chronologique de l’inscription, sont : Tchoghâzanbil , Takht-e Djamshid , la place de Naghsh-e Djahân, Takht-e Soleymân, le dôme de Soltânieh, la citadelle de Bam, le site de Bisotoun, l’église de Ghara Kelisa.