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Les Assyriens et les Chaldéens qui vivent en Iran ont un long passé commun avec les Iraniens. Leur histoire remonte jusqu’à l’Empire assyrien et leur implantation en Iran semble aussi ancienne que les guerres entre les Royaumes Mède et d’Assyrie. Bien que les communautés assyrienne et chaldéenne contemporaines tentent de se définir par une identité nationale depuis le début du XXe Siècle, elles trouvent essentiellement leur cohésion grâce à deux facteurs : une langue commune, et la religion chrétienne.
Le syriaque est une langue sémitique ancienne, appartenant au groupe des dialectes orientaux de l’araméen.
L’araméen était une langue sémitique parlée principalement pendant l’antiquité dans tout le Proche Orient. L’araméen - langue proche du phénicien et de l’hébreu - était parlée à l’origine par un peuple nomade qui vivait dans la partie sud de la Palestine. Les Araméens attaquèrent et vainquirent les civilisations voisines (en Syrie et au nord de la Mésopotamie) à partir du XIVe siècle av. J.-C. Le nord de la Mésopotamie était alors le Royaume d’Assyrie. Les Araméens créèrent sur l’Euphrate de petits royaumes qui disparurent aux IXe et VIIIe siècle av. J.-C. avec le retour de la puissance assyrienne, mais la conséquence du mélange des cultures fut le fait que la langue araméenne supplanta l’akkadien au VIIe siècle av. J.-C. et devint la principale langue parlée dans l’Empire assyrien puis l’Empire perse. Les Araméens entrèrent dans la mouvance des grands empires d’Orient et se répandirent dans l’administration de l’Empire perse. Précisons que l’akkadien était une langue sémitique ancienne, qui s’était scindée en deux dialectes - l’assyrien et le babylonien - au IIe millénaire av. J.-C.
L’araméen se diffusa ensuite dans tout l’Orient comme langue parlée et écrite (son alphabet était plus simple que le cunéiforme). Les Araméens ont adopté l’alphabet phénicien pour écrire leur langue vers l’an 1000 av. J.-C.
Le syriaque était un dialecte de l’araméen. Les peuples qui parlaient et écrivaient en syriaque pendant l’Antiquité vivaient dans une région correspondant actuellement à la Syrie et au nord de l’actuel Iraq, où était située la ville d’Edesse (aujourd’hui, la ville d’Urfa). La langue syriaque acquit toute son importance à partir du IIe siècle de l’ère chrétienne, quand Edesse devint l’un des centres du christianisme oriental. La partie nord de la Mésopotamie était déjà depuis quelques siècles (c’est-à-dire depuis Alexandre et ses successeurs) l’un des foyers importants de la langue syriaque. La migration de grecs et de macédoniens dans cette région eut pour conséquence l’entrée de nombreux mots grecs dans la langue syriaque, ainsi que de la modification de la grammaire de celle-ci.
Les textes écrits en syriaque avant l’ère chrétienne ne sont pas très nombreux. Par contre, de très nombreux textes, surtout religieux, furent écrits dans cette langue entre le IIIe et le VIIIe siècle de l’ère chrétienne. Le syriaque était, après le grec, la deuxième langue importante de l’Empire romain d’Orient.
L’araméen fut peu à peu supplanté par la langue arabe à partir du VIIe siècle, c’est-à-dire à partir de l’installation des arabes musulmans dans les pays d’Orient, mais ses différentes formes dialectales sont encore parlées de nos jours par des millions de locuteurs en Syrie, en Iraq et dans le Caucase. Les Assyriens et les Chaldéens qui vivent actuellement en Syrie, en Iraq, en Turquie et en Iran parlent le syriaque ; cependant, la langue syriaque parlée par chacune des communautés vivant dans les pays cités s’est mélangée avec la langue dominante parlée dans ces pays. L’écriture syriaque est globalement la même que l’écriture araméenne, mais elle a subi l’influence de l’écriture grecque.
Tous les membres de la communauté assyrienne et chaldéenne sont chrétiens. La majorité d’entre eux s’est convertie au christianisme entre le Ier et le IIIe siècle. La ville d’Edesse (ou Urfa) était un foyer politique, religieux et scientifique important des Assyriens au cours des premiers siècles de l’ère chrétienne. La première Eglise assyrienne d’Orient, également appelée Eglise des Perses, fut fondée à Edesse. Les Assyriens convertis au christianisme étaient des missionnaires actifs qui tentèrent de répandre la religion chrétienne partout en Orient, et même jusqu’à Malabar (en Inde). C’est à Edesse également que fut fondée la première école destinée à former les chrétiens en théologie, en philosophie et en sciences. Cette école, qui s’appelait "Ecole des Perses", formait chaque année des missionnaires qui partaient ensuite dans toutes les régions de la Perse et de l’Asie pour y créer des églises, des écoles et des hôpitaux.
De nos jours, les Assyriens et les Chaldéens appartiennent à quatre Eglises différentes :
-L’Eglise assyrienne d’Orient regroupe en son sein la majorité des Assyriens. On la nomme également Eglise Nestorienne, et parfois Eglise Perse. Cette Eglise s’est formée à partir des communautés chrétiennes de l’Empire perse qui ont adopté la doctrine de Nestorius. Les membres de cette Eglise sont Assyriens pour la plupart. Ils sont répandus dans le monde entier, mais la majorité d’entre eux réside en Iraq, puis aux Etats-Unis, en Iran, en Syrie, au Liban et en Turquie par ordre d’importance. Les croyances de cette Eglise sont assez proches de celles de l’Eglise Orthodoxe. Les prières y sont faites en langue araméenne. L’Eglise Assyrienne d’Orient est dirigée par un patriarche et ne dépend pas du Vatican.
-L’Eglise assyrienne chaldéenne regroupe les chrétiens assyriens qui se sont ralliés à Rome à la fin du XVIe siècle. Il s’agit donc d’une Eglise catholique de rite oriental, et plus précisément de rite chaldéen. La langue liturgique de cette Eglise est le syriaque. Il semble que ses membres tiennent à être nommés "Chaldéens" pour se différencier des autres Assyriens. Elle regroupe actuellement en Iran environ 13 000 adeptes.
-L’Eglise assyrienne évangélique est une Eglise protestante. Elle a été fondée en Iran au début du XIXe Siècle, par des missionnaires américains. Elle dépendait jusqu’à il y a peu de la Confédération des Eglises Protestantes d’Iran, mais elle est actuellement dirigée de manière autonome. La langue liturgique est celle que les Assyriens parlent couramment. Cette Eglise a une paroisse assez active.
-L’Eglise des frères assyriens est une Eglise presbytérienne. Elle fut fondée d’abord aux Etats-Unis, puis en 1910 en Iran par un assyrien iranien résidant aux Etats-Unis. Elle compte peu d’adeptes en comparaison avec les trois autres Eglises.
Les documents historiques montrent que les communautés assyriennes vivent en Iran depuis des siècles. Leur installation en Iran s’est parfois réalisée de façon forcée : au cours du Ier millénaire av. J.-C., le roi assyrien attaqua à plusieurs reprises le Royaume des Mèdes, en particulier les régions situées aux alentours du lac d’Oroumieh, et y installa des Assyriens ; de même, selon une tablette cunéiforme datant du VIIIe siècle av. J.-C., près de 200 000 assyriens furent installés à cette époque par le roi d’Assur dans les régions qui correspondent actuellement aux provinces d’Azerbaïdjân, et qui appartenaient à l’époque au Royaume des Mèdes.
Plus tard, à l’époque du règne des Sassanides en Perse, les habitants des villes assyriennes d’Edesse et de Nisibis furent souvent malmenés du fait des guerres incessantes qui avaient lieu entre l’Empire perse et l’Empire romain, étant donné qu’elles étaient situées dans une zone frontalière. Bon nombre des habitants de ces villes migrèrent alors volontairement vers les régions plus orientales de l’Empire perse, où ils y furent installés de force, en particulier dans la région du Khouzestân actuel. L’empereur sassanide Shâpour 1er ordonna que la ville de Gondi-Shâpour (ou Djondi-Châpour) y soit construite par les soldats romains prisonniers de guerre. Cette ville, située près de l’actuelle ville d’Ahwâz, fut construite pour être la rivale de la ville d’Antioche de l’Empire romain sur le plan culturel et scientifique. Ahwâz fut dès lors l’une des villes iraniennes où vivait un grand nombre d’Assyriens.
Après la conquête de la Perse par les musulmans, le calife Omar, qui avait décidé de créer un pôle d’implantation près de Bagdad et voulait pour cela construire la ville de Koufa, ordonna que les Assyriens vivant dans cette région soient transférés au Golfe persique.
A l’époque du règne des Mongols, les chrétiens iraniens résidaient essentiellement dans les régions du nord-ouest et du sud-ouest de l’Iran, ainsi que dans les îles du Golfe persique. Il semble que bon nombre d’Assyriens qui vivaient alors en Iraq furent obligés de fuir devant l’armée des Mongols et se réfugièrent aux alentours du lac d’Oroumieh.
L’autre grande vague de migration des Assyriens en Iran eut lieu au cours de la première Guerre Mondiale. A cette époque, l’Empire ottoman organisa le génocide des Arméniens et des Assyriens qui vivaient en Turquie, et transféra (avec l’accord du gouvernent iranien) les populations assyriennes vers les régions frontalières situées au nord-ouest de l’Iran.
La communauté assyrienne et chaldéenne de l’Iran comprend actuellement, d’après le dernier recensement, 30 à 40 000 personnes, qui vivent principalement à Téhéran, au nord-ouest de l’Iran et au sud-ouest de l’Iran. Bon nombre d’entre eux ont émmigré au cours de ces cinq dernières décennies aux Etats-Unis, mais ils gardent des liens avec leurs familles restées en Iran. L’Histoire des Assyriens d’Iran est inséparable de celle des autres iraniens, du fait des innombrables mélanges culturels qui ont eu lieu au cours des siècles. Les Assyriens qui résidaient dans le sud-ouest de l’Iran ont subi de nombreuses pertes au cours de la guerre Iran-Irak, mais ils ont combattu vaillamment à côté des autres iraniens pour défendre l’Iran qu’ils considèrent être leur patrie.
[1] Les sources utilisées pour écrire ce paragraphe ont été le Dictionnaire Encyclopédique Persan Moïn et le Dictionnaire Encyclopédique Larousse, éd 1997.
[2] Les sources utilisées pour rédiger ce paragraphe ont été le Dictionnaire Encyclopédique Larousse, éd 1997, et un article intitulé "Les Assyriens d’Iran", écrit par "L’Institut du Dialogue des Religions" et diffusé sur internet par le site persan www.banipal.org