N° 137, avril 2017

Les mosquées iraniennes contemporaines


Hamideh Haghighatmanesh


La mosquée de l’Université de Téhéran

epuis un siècle environ, la découverte de l’architecture moderne et des architectures académiques occidentales a eu un impact fort sur l’architecture iranienne des monuments, notamment celle des mosquées. Dans l’architecture religieuse iranienne, cette évolution concerne en particulier la forme et l’espace des mosquées.

Les mosquées contemporaines iraniennes offrent un mélange de modernité et de traditions régionales, qui varie selon l’endroit où la mosquée est bâtie. Aujourd’hui, la diversité des genres et des styles des mosquées contemporaines est telle qu’il est impossible de dresser une taxinomie similaire à celle des mosquées traditionnelles. A titre d’exemple, la mosquée de l’Université de Téhéran a pour seuls éléments traditionnels un dôme et un minaret, aucun autre élément architectural ne se rapprochant des mosquées traditionnelles, en particulier la forme et la disposition spatiale.

La mosquée de Shahrak-e Ghods à Téhéran

Dans la société actuelle, le changement, au sens commun du terme, est considéré comme le produit inévitable de l’évolution du savoir et des sciences, qui entraîne à son tour l’évolution des principes architecturaux. Pour étudier l’évolution de la forme des mosquées, il faut entre autres aborder la question de l’impact et de l’influence de la modernité sur leur architecture. Il y a à ce propos de nombreuses approches, chacune analysant l’un des aspects de ce sujet sur la base d’indices qualitatifs ou quantitatifs.

L’une des analyses les plus communes réalisée sur les caractéristiques des styles modernes a pour objet les éléments structuraux d’ordre formel comme les ornements, l’espace, la complexité, la simplicité, etc. Au total, les caractéristiques des mosquées modernes ou « nouvelles mosquées » peuvent être classées en quatre catégories :

    Plan de la mosquée de Shahrak-e Ghods à Téhéran
  1. La forme extérieure perd de l’importance ; l’accent étant plutôt mis sur la disposition de l’espace intérieur. Il existe une certaine rupture entre les espaces intérieur et extérieur. Le plan est en général celui dit de shabestâni. La décoration de ce type de mosquée est plutôt abstraite et monochrome, et la lumière des espaces intérieurs souvent artificielle. Ce type de mosquée est souvent bâti dans les parties annexes de monuments plus anciens ou bien dans de grands complexes. C’est notamment le cas du plan du développement du mausolée de Hazrat-e Ma’soumeh à Qom et la mosquée de Shahrak-e Ghods à Téhéran.
  2. L’architecte des mosquées iraniennes modernes privilégie une expression symbolique. Les formes sont simples et platoniciennes. Le cube, souvent exploité dans l’architecture religieuse traditionnelle, revient dans ce type de mosquée, aux côtés de compositions simples mais minutieuses. Ces mosquées sont généralement dénuées d’ornements ou très peu ornées de motifs abstraits. Les épigraphes (katibeh) sont limitées et simples. Dans ce type d’édifice, les jeux de lumière, la luminosité indirecte et les clairs-obscurs sont très exploités au travers d’un travail minutieux sur la lumière. Elles sont en général construites sur des terrains bien dégagés ou dans des complexes urbains présentés comme prototypes architecturaux. A titre d’exemple, on peut citer la place consacrée à la prière (namâzkhâneh) du Parc Lâleh à Téhéran, celle de l’Université de Kermân, la mosquée Alghadir de Téhéran, la mosquée de l’Université de Téhéran ou la mosquée de Hazrat-e Ebrâhim située sur le complexe de l’exposition permanente de Téhéran.
  3. Parfois cependant, l’espace extérieur de la mosquée est plus travaillé que son intérieur. Des formes complexes et nouvelles sont préférées aux formes pures. Les ornements sont simples mais asymétriques, les couleurs utilisées variées mais plutôt foncées, et le clair-obscur est courant. Ces mosquées sont généralement construites dans les centres urbains, comme une partie d’un groupe de nouveaux édifices. Citons par exemple la mosquée de Vali-asr réalisée par l’architecte Rezâ Dâneshmir, et la mosquée Al-Javâd à Téhéran.
  4. Il est aussi possible de trouver un mélange des trois tendances évoquées précédemment, comme c’est le cas de la mosquée Amir de Téhéran.
La mosquée Alghadir de Téhéran

 

Nous présentons ici de façon plus détaillée deux types distincts de mosquées contemporaines, l’une plus ancienne et l’autre plus récente :

-La mosquée Al-Javâd : construite en 1962 sur la place Haft-e Tir à Téhéran, elle est considérée comme étant la première mosquée moderne d’Iran pour deux raisons : son architecture moderne et très différente des mosquées traditionnelles, et l’usage de matériaux photoactifs et ne captant pas la pollution. Ces matériaux dépolluants ont été choisis du fait de l’emplacement de la mosquée, la place Haft-e Tir étant très fréquentée et très polluée. Ces matériaux, outre leur propriété de ne pas absorber la pollution, augmentent la longévité de la façade du bâtiment.

Namâzkhâneh (place consacrée à la prière) du Parc Lâleh à Téhéran

La superficie de cette mosquée est d’environ 1500 m². Le corps du bâtiment est constitué de deux parties : le shabestân, et la salle de conférence à deux étages. Le shabestân de la mosquée ayant une forme conique constituée de plans croisés, l’édifice s’élargit vers le bas. Cette mosquée comprend également une bibliothèque au sous-sol et une coopérative industrielle au dernier étage.

 

La mosquée de Vali-asr réalisée par l’architecte Rezâ Dâneshmir

-Le Mosallâ de Téhéran : ce grand complexe est constitué d’espaces et d’édifices suffisamment grands pour accueillir des rassemblements de plusieurs millions de personnes, autant pour des cérémonies religieuses que des expositions et des événements culturels. Ce complexe d’une superficie d’environ 65 hectares a été bâti sur les terrains vagues d’Abbâsâbâd à Téhéran. Il est simple d’accès, par plusieurs points et quartiers différents. Sa construction a débuté en 1988, pour finalement prendre fin après beaucoup de retard en 2011. L’axe principal du Mosallâ est le plus long, et il est orienté en direction de La Mecque ; l’ensemble des autres bâtiments annexes suivant également cet axe. Le complexe de Mosallâ comprend 14 goldasteh (minarets), 12 sahn (cours) et 5 entrées. L’iwan principal a une hauteur de 72 mètres, et la hauteur du dôme de la mosquée Jâmeh, la principale mosquée du complexe, est de 63 mètres. Il est à souligner que tous ces nombres sont sacrés dans la pensée chiite. Au total, il existe sept édifices comportant un dôme dans le Mosallâ.

La mosquée Al-Javâd, place Haft-e Tir
à Téhéran

Le plus grand d’entre eux est également l’un des plus grands du monde musulman. Dans ce complexe, chaque entrée comporte deux minarets, un iwan et un dôme ; chacune d’entre elles ayant une architecture spécifique et comprenant des édifices différents. D’une hauteur de 140 mètres, les minarets les plus hauts du complexe sont accessibles jusqu’à leur sommet par des escaliers en spirale et des ascenseurs. L’iwan principal, en hauteur, qui s’étend entre la mosquée Jâmeh et les minarets principaux, comporte des éléments nouveaux par rapport aux iwans traditionnels.

Une grande importance a été accordée aux espaces verts dans le Mosallâ. Les howz ou bassins d’eau sont nombreux et centralisent les perspectives. Le howz principal s’étend sur une superficie de 2500 m². Les cinq shabestân, situés au nord de la cour centrale du Mosallâ, constituent en soi des monuments, chacun pouvant accueillir 70 000 personnes. Le grand complexe de Mosallâ possède également de nombreuses salles de projection, de conférence et des espaces dédiés à des séminaires, des rencontres et des réunions, ainsi qu’un musée, un amphithéâtre, un centre de recherche en études internationales islamiques, un centre de formation en sciences islamiques, un centre de formation en arts et artisanats islamiques, un marché culturel, un marché d’artisanat, une bibliothèque, et beaucoup d’autres espaces dédiés

à la vie culturelle et sociale de la capitale.

Le Mosallâ de Téhéran

Sources :


- Mahdavinejâd, Mohammad-Javâd, Mashâyekhi Mohammad, Bahrâmi, Monireh, « Olgou-hâye tarrâhi-e masjed dar memâri-e moâser » (Modèles de plans de mosquées dans l’architecture contemporaine), in Pajouhesh-hâye memâri-e eslami (5) (Recherches en architecture islamique), 2005.


- Iraji, Javâd, « Modernité dar masâjed-e moâser » (La modernité dans les mosquées contemporaines), in Memâr (Revue "Architecte") (56), 2010, pp. 120-124.

http://jria.iust.ac.ir/article-1-107-fa.pdf

https://fa.wikipedia.org/wiki/·Ho¿U ± ¶

http://www.arel.ir/fa/News-View-4421.html


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