Je saisis l’écran bleu qui se trouve devant moi : 26 février. Voilà, un nouveau jour commence. Je me lève et ma vie continue. Arrivée à la cuisine, ma valise à la main, je m’assieds devant eux et on commence à prendre le petit-déjeuner ensemble. Je sors ensuite et marche jusqu’à l’arrêt de bus. A l’arrêt de bus, j’attends le bus que je dois prendre ; mais je ne connais pas l’heure exacte de son arrivée et de son départ. Je regarde alors les autres qui attendent comme moi. Ma valise à la main, je parcours l’écran bleu de haut en bas : 2342 devient 2345. « Le bus va arriver dans cinq minutes et partir dans 10 minutes. »

Je suis assise dans le bus et je regarde les yeux des passagers. Ils me semblent être mille placards recelant mille et un mots qui n’ont pas été prononcés ; je fouille ces placards un moment. Ma valise à la main, je parcours l’écran bleu de haut en bas : 2345 devient 2349. « Les yeux sont des fenêtres où l’âme et l’esprit se révèlent. » Ces yeux cachent quelque chose.

Je descends du bus et je marche sur le trottoir. Les gens marchent près de moi et je traine ma valise derrière moi. J’aperçois Le Petit Prince debout près du trottoir, qui pleure ! Il est peut-être perdu.

 En face de lui, je vois le vieux Santiago à la recherche de quelque chose autour de lui - Peut-être son filet de pêche ?

À quelques pas de là, je vois Veronika qui a décidé de mourir, elle cherche une adresse - Peut-être celle d’une nouvelle vie ?

 Ma valise à la main, je parcours l’écran bleu de haut en bas : 2349 devient 2355. « Ils sont des personnages livresques : Le Petit Prince d’Antoine Exupéry ; Le Vieil Homme et la Mer d’Ernest Hemingway ; la Veronika de Paulo Coelho. » Ils me sont familiers. Pas une seconde, je ne veux savoir si je suis dans la vraie vie ou dans un songe.

Je ne peux pas m’en souvenir avec exactitude, mais cela fait quelque temps que je traîne cette grande valise marron. Cependant, je suis sûre que ce n’était pas avant que les 1000 deviennent 2000 et que les 3000 deviennent 4000. La valise est toujours dans ma main mais personne ne le remarque. Une valise en carton avec une poignée en bois qui devient de plus en plus lourde jour après jour. Ma valise à la main, je parcours l’écran bleu de haut en bas : 2355 devient 2360. « La valise est un bagage de forme rectangulaire, relativement plat, et pouvant aussi être porté à la main. »

Hier, pour la première fois, j’ai vu un homme prendre une valise en main comme moi. Même valise : grande et marron, en carton et avec une poignée. La valise à la main, je parcours l’écran bleu : 2360 devient 2366. « La valise est un bagage de forme rectangulaire, relativement plate, et pouvant être portée à la main. »

Je vais au cinéma. C’est bizarre : les acteurs jouent leur rôle avec leur valise à la main. Un acteur court avec la valise et fait de grands gestes avec ses mains. La valise à la main, je sors du cinéma et parcours l’écran bleu de haut en bas : 2366 devient 2380. « Le prétendu film réalisé par tel prétendu réalisateur et mettant en vedette des prétendus acteurs avec le sujet prétendu de… »

Ma valise à la main, je m’assois devant eux et on commence à dîner. Même les acteurs de la série télévisée ont des valises à la main lorsqu’ils jouent leur rôle. Il n’y a aucun moyen que je puisse suivre le film seulement en le regardant. Ma valise à la main, je parcours l’écran bleu : 2380 devient 2385. « La prétendue critique du prétendu film. »

Il n’y a aucun catalogue qui vende des valises, mais presque tout le monde a une valise. Et même, certaines personnes ont deux valises mais personne ne s’intéresse aux autres valises, et même pas peut-être à ses propres valises. Ma valise à la main, perdue dans mes pensées, je parcours l’écran bleu de haut en bas : 2385 devient 2395. Il n’y a aucune étiquette sur ces valises. C’est bon, au moins, on n’était pas valisier. Je ne trouve aucune définition pour le mot valiser, mais c’est probablement quelque chose comme occidentaliser, « adopter les coutumes et les mœurs de l’Occident. »

Petit à petit, les yeux s’agrandissent, les lèvres se serrent, les cous se courbent, les mains s’allongent, les étapes raccourcissent, les mots deviennent des images et des numéros, les voix deviennent des touches sur des écrans bleus, et ce sont les heures, les lieux, les couleurs, les goûts, les idées, l’amour, la torture, la moralité, et les paroles qui trouvent place sur l’écran bleu. Je cherche tous les signes, mais je ne trouve aucun nom pour cette épidémie - peut-être à cause de la pollution de l’air ou du voile.

Les poupées et les jouets dans les vitrines ont des petites valises à la main. Les sacs en plastique, les cartables et les uniformes semblent être des valises : marron et rectangulaires.

Les chapeaux, les parapluies, les cadres, les gâteaux, tous sont comme des valises : marron et rectangulaires.

Maintenant les gens, valise à la main, sont trop nombreux : les hommes, les femmes, les vivants et les morts. Tout le monde a valise à la main.

Et moi, ma valise à la main, je parcours l’écran bleu de haut en bas : 3000.

 


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