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L’eau provenant d’une source thermale – à plus de 36° C – est chauffée par une chaudière géothermale. Vu que la solubilité de l’eau augmente avec la température, l’eau de la source chaude contient une quantité considérable de minéraux solubles. Certains y attribuent des vertus thérapeutiques et s’y baignent pour soulager leurs douleurs articulaires ou tout simplement pour « réveiller » leur corps. On connaît depuis longtemps l’utilité des sources thermales pour s’accorder un moment de tranquillité, favoriser la circulation sanguine, nettoyer la peau, apaiser les maux et guérir certaines maladies.
Grâce à la foi populaire iranienne dans les bienfaits thérapeutiques des sources chaudes, la plupart d’entre elles sont devenues aujourd’hui des destinations prisées du tourisme médical. Pourtant, ces convictions s’appuient parfois sur de fausses perceptions. En outre, en raison du passage de ces eaux dans les couches superficielles de la terre, le soufre et ses autres composants chimiques peuvent entraîner des conséquences néfastes sur la santé.
Ces croyances et convictions partagées s’enracinent dans l’idée à la fois simple et trompeuse qu’une eau plusieurs fois bouillie a un fort pouvoir guérisseur. On estime que l’eau issue d’une source thermale, bouillie à plusieurs reprises, est très pure et délestée de sels solubles, surtout de minéraux nocifs.
Les vertus thérapeutiques de l’eau des sources chaudes sont liées à leur chaleur et aux bénéfices de cette chaleur pour le corps humain. Pour mieux fonctionner, les cellules du corps ont besoin d’énergie et de chaleur. Le pouvoir guérissant des sources chaudes dépend de différents facteurs comme les propriétés physiques, chimiques et thermiques de l’eau. Compte tenu de l’histoire géologique d’une région donnée, la teneur en sels minéraux des sources thermales peut varier et ces dernières peuvent aussi contenir différents ions comme le calcium, le lithium, le souffre et même le radium.
Il faut pourtant éviter les sources qui sentent le soufre et dont l’eau est amère. Notons aussi qu’une source chaude peut être bénéfique pour certains et néfaste pour d’autres. Une femme, par exemple, pense avoir perdu l’enfant qu’elle portait simplement parce qu’elle s’est baignée une seule fois dans une eau sulfureuse. Une autre personne, atteinte d’un problème dermatologique, affirme au contraire qu’une seule baignade l’a libérée de son problème, alors que tous ses traitements dermatologiques avaient échoué. Un habitant de Khormoj [1] témoigne des dangers liés au fait de se plonger dans des sources trop sulfureuses, notamment la source Mirahmad, située à 77 km de la ville de Khormoj : « Nous y sommes allés, ma mère et moi, elle souffrant de douleurs articulaires. Ayant parcouru une longue route pour y arriver, j’ai donc décidé moi aussi de m’y baigner. On m’a conseillé de ne pas rester dans l’eau trop longtemps, mais j’ai été insouciant… J’ai subitement senti une langueur et un engourdissement et je me suis évanoui… Puis, la conscience retrouvée, j’ai ouvert les yeux et je me suis retrouvée dans les bras de ma mère qui pleurait et on m’aspergeait le visage ! Je suis resté incapable de bouger les mains et les pieds pendant trois heures. Une famille de nomades turcs nous a hébergés et je me suis reposé chez eux pour retrouver mes forces. J’avais été empoisonné par les gaz toxiques de la source. J’ai été sauvé par mes compagnons. Un baigneur solitaire a perdu la vie dans cette source, le lendemain du jour où je m’y suis évanoui. Je comprends mieux pourquoi il n’y a aucune végétation dans les alentours de cette source et qu’on n’y voit pas trace d’oiseaux ni d’insectes non plus. »
Certains hadiths attribués au prophète Mohammad ou aux Imâms chiites concernent la question de recourir aux sources chaudes à des fins thérapeutiques. La fiabilité de ces communications peut être contestée, du fait de la rareté, sinon l’absence de pareils phénomènes dans la péninsule arabique. L’une des sources de hadith dans le monde chiite est le Hilyat al-Muttaqin [2], compilé par Mohammad Bâqir al-Majlisi où l’on peut lire le hadith suivant à la page 62 : « Le Prophète de l’islam déconseilla fortement de chercher la guérison dans les sources chaudes, surtout des sources sulfureuses, ajoutant que leur énergie est infernale. » Selon un autre hadith attribué à l’Imâm Ja’far al-Sâdiq : « Mon père évitait les eaux amères et sulfureuses des sources chaudes. Au moment du grand déluge, Noé appela toutes les eaux du monde à son secours. Elles acceptèrent toutes de l’aider, à l’exception des eaux amères et sulfureuses. Il a donc maudit toutes ces eaux. » Le Coran parle plutôt des eaux fraîches et non chaudes comme sources de guérison, lorsqu’il évoque Job et ses souffrances : “Frappe [la terre] de ton pied : voici une eau fraîche pour te laver et voici de quoi boire. » [3] Il faut néanmoins reconnaître au moins une vertu thérapeutique aux sources chaudes : la chaleur facilite la circulation sanguine et assure l’efficacité d’une guérison, en particulier pour les personnes âgées.
Des sites internet iraniens publient régulièrement des articles sur les vertus thérapeutiques présumées mais non vérifiées des sources thermales. Bien que non prouvées, ces vertus sont cependant admises par l’opinion publique. Une enquête non étayée menée par des médecins iraniens reconnaît les vertus suivantes aux sources thermales : stimulation sensorielle du corps, bénéfices pour le système digestif, l’artérite rhumatoïde, l’apaisement nerveux, la normalisation de l’hypotension sanguine, l’assouplissement des artères, le rétablissement d’une bonne circulation sanguine, la guérison ou l’amélioration des douleurs articulaires et musculaires et enfin, un impact positif sur les troubles rénaux et des voies urinaires. Les résultats de cette étude montrent que les sources de Râmsar soulagent les maladies dermatologiques, les troubles digestifs et l’hypotension, celles de Mahallât aident à la guérison des maladies pulmonaires et cardiaques, et celles des régions côtières du golfe Persique ont un impact positif sur le fonctionnement des systèmes digestif et respiratoire. Les Iraniens semblent croire, d’un commun accord, aux vertus positives des sources thermales. Par conséquent, les investissements dans le développement des infrastructures d’accueil et du tourisme thermal sont en hausse.
Aujourd’hui, seuls les centres thermaux et les sources chaudes de Sare’eyn à Ardebil bénéficient d’infrastructures développées et de conditions sanitaires standards. Ailleurs, les nombreuses sources thermales iraniennes souffrent de deux décennies au moins de manque d’investissements et de développement. Ainsi, depuis plus de vingt ans, le nombre des infrastructures hôtelières n’a guère augmenté et l’absence d’investissements et d’efforts pour les présenter à l’échelle internationale limite la clientèle de ces centres au niveau national ou même local.
Cependant, les sources locales et connues depuis longtemps par les habitants ont généralement une excellente réputation. Citons par exemple la source Zamzam à Mâssouleh. L’eau de cette source se jette dans la rivière Khân – elle-même passant à proximité de la citadelle Roud-khân, qui en tire son nom. Cette eau possède un goût amer et une couleur orangée, car elle est riche en fer. La source est effectivement située à proximité d’un gisement de fer, et la région possède un passé minier important. Autrefois, les habitants buvaient cette eau en y ajoutant du sucre. Ils estiment aujourd’hui encore que cette eau est bénéfique dans le traitement des maladies pulmonaires et digestives. Un autre exemple serait la source Lâkân, située à proximité du village d’Aghâ Dânâpir au sud de Rasht. La source Lâkân se trouve au milieu d’une dense végétation et elle est entourée de murs recouverts de sédiments calcaires. Les habitants la considèrent comme une source sacrée et son eau est réputée pour ses vertus thérapeutiques, notamment dans le traitement des maladies dermatologiques. Des piscines permettent de s’y baigner durant la période estivale.
Les ingrédients minéraux dissous dans les sources chaudes sont absorbés par le corps lorsque l’on s’y baigne, presque comme si l’on buvait l’eau. Les différents types de sources thermales ont des effets différents sur le corps, mais on peut énumérer plusieurs avantages communs à toutes les sources thermales :
1. Effet de la chaleur qui stimule le métabolisme et soutient le système nerveux.
2. Effet de la pression de l’eau, laquelle, en fonction de la densité de l’eau ou du degré de sa pression, permet aux mouvements du corps immergé d’avoir les effets positifs d’un massage sur les muscles du corps.
3. Effet de la flottabilité qui peut aider à lutter contre la fatigue, se détendre, améliorer l’état émotionnel et physique.
4. Effet de l’immersion dans la nature : l’intérêt d’avoir recours aux sources thermales va plus loin que l’immersion simple. Pour les sources dotées de piscines en plein air, il s’agit aussi de se baigner dans un milieu naturel et d’avoir le loisir de contempler le ciel et la nature en entendant les bruits de l’eau. Les sources thermales permettent ainsi de sortir de l’agitation de la vie moderne, de retrouver la paix et de calmer le stress. Elles sont un lieu de récupération idéale pour accéder à un meilleur état de santé.
L’expérience a montré que la baignade dans les sources chaudes pouvait soulager diverses maladies et affections telles que les névralgies, les douleurs musculaires, l’engourdissement, les ecchymoses, les blessures musculaires légères, les problèmes gastro-intestinaux chroniques, les hémorroïdes, l’hypersensibilité au froid, la récupération après une maladie ou la fatigue générale. Elle a également un effet tonique sur le corps.
Il faut savoir que se baigner dans les sources thermales n’est pas toujours recommandé. La condition physique des personnes et les conditions de l’eau, sa composition et sa température sont à prendre en compte avant de s’aventurer dans la source. La tuberculose, les tumeurs malignes, les maladies ou problèmes cardiovasculaires graves, les problèmes respiratoires, les problèmes rénaux, l’hémophilie, l’anémie, la grossesse et en général, toute maladie ou affection qui altère la santé sont des facteurs de risque grave et d’interdiction de baignade dans les sources thermales.
Bibliographie :
Feyzi Vidâ ; Mortazavi Hossein, Tcheshmeh-hâ va daryâ-hâ barâye bimâri. Estefâde-ye darmâni az âb ma’dani tcheshmeh (Les sources et les mers pour la maladie. Emploi thérapeutique des sources thermales), Revue trimestrielle Pâyesh, N°3, 2003.
Niroumand Karim, Tafâhom-hâye âb-e garm-e Sare’eyn dar ostân-e Ardebil. Negâhi be khâssiat va vijegi-ye tcheshmeh (Les interactions de la source thermale de Sare’eyn dans la province d’Ardebil. Regard sur les qualités et caractéristiques de cette source), 2008, 3e année, No. 9, Malâyer.
Rashidi Ma’ssoumeh ; Râmosht, Mohammad-Hossein ; Seyf, E. ; Khoshhâl-Dastjerdi, Javâd, Rotbeh bandi-e khavâs-e darmâni-e âbhâ-ye tcheshmeh (Le classement des effets thérapeutiques des différentes eaux des sources thermales), Majjaleh-ye salâmat va behdâsht-e Ardebil (Revue de la santé et de l’hygiène d’Ardebil), No. 1, 2012.
Ebrâhimzâdeh, Issâ, Abhâ-ye ma’dani va gostareh-ye fazâ’i-e ân dar Iran (Les sources thermales en Iran et leur dispersion géographique), Tahqiqât-e manâbe’-e âb (Recherches sur les sources d’eau), 2008.
Akhavan Behbahâni, Ali, Negâhi be jâygâh-e gardeshgari-e darmâni dar keshvar. Safar barâye salâmat (Regard sur le tourisme médical en Iran. Voyager pour la santé), Revue Jâm-e Jam, Téhéran, 2009.
[1] Ville au sud de l’Iran, dans la province de Boushehr.
[2] Littéralement : l’ornement des pieux.
[3] Sourate Sâd, 42.