Né a Hamadân au Xe siècle (905 ?- 989 ?) - IVe siècle de l’hégire (329 ?- 410 ?) - Baba Taher est reconnu comme l’un des plus grands mystiques de son temps. Bien que sa vie nous soit presque inconnue, on sait pourtant qu’il était plus réputé, de son vivant, pour son ascétisme et sa vertu que pour ses poèmes. Selon Râvandi, historien du XIIe siècle, le roi seljouk, Togrol, alla le voir à Hamadân.

Aujourd’hui Baba Taher est surtout connu pour ses do-beïtis, un mètre poétique semblable au quatrain. Ces courts poèmes étant un chant intérieur, ils invitent au recueillement et à la méditation. Imprégnés de panthéisme religieux, ils repèrent dans toute chose la trace du Bien-aimé. L’amour, accédant à une dimension mystique, devient dès lors une constante de la poésie tahérienne. Il est signe de l’infini, une force qui nous rapproche de Dieu. Pour l’homme éloigné et perdu dans la pluralité de ce monde, l’amour est conçu comme médiateur du divin. Face au monde matériel, le poète oscille entre deux pôles : tantôt il le perçoit comme cause d’une séparation douloureuse, créant de profonds chagrins ; tantôt comme une manifestation de la volonté divine, digne d’affection et de sympathie. Baba Taher fait donc constamment alterner joie et souffrance. Cette situation paradoxale ne lui déplaît pas ; il s’y soumet et en tire même du plaisir :

Ainsi on perçoit chez lui un optimisme profond, composante majeure de son mysticisme. La vie terrestre, derrière son apparence, dévoile l’infini et marque une étape inévitable vers l’amour éternel. L’éloge de la nature doit se comprendre dans une même logique.

Sur le plan formel, Baba Taher, loin d’être limité à la langue noble, recourt avec talent au langage populaire et aux dialectes régionaux. De la sorte, non seulement il facilite la compréhension de ses vers, mais surtout il fait sortir la langue pehlevi d’un probable oubli.

Quant au style de Baba Taher, la poésie n’étant pas pour lui un but en soi, il est fulgurant et spontané. Au détriment d’une poésie travaillée et sophistiquée, le poète compose ses vers avec la plus grande simplicité, souplesse et aisance.

Le charme, la douceur et la popularité de ses quatrains, sont ainsi dus à la fois à leur consistance et à leur limpidité formelle.



خوشا آندل که از غم بهره ‌ور بی * بر آندل وای کز غم بی‌خبر بی

Heureux soit le cœur qui connaît la peine

malheureux celui qui n’a pas la sienne

به بازار محبت نقد رایج * کسی داره که دیلش سوته تر بی

Au pays de l’amour, la monnaie en cours

porte l’effigie d’un roi, le chagrin est sa reine



به صحرا بنگرم، صحرا ته وینم * به دریا بنگرم دریا ته وینم

Contemplant le désert, moi je ne vois que toi

En regardant la mer,c’est toi que j’aperçois

به هرجا بنگرم، کوه و در و دشت * نشان از قامت رعنا ته وینم

De tous les coins du monde et par monts et par vaux

Brillante et solitaire silhouette unique en soi



به گورستان نظر کردم کم و بیش * بدیدم حال دولتمند و درویش

Scrutant les cimetières j’ai tant vu dans ces demeures

Au royaume des ossuaires quand arrive le fossoyeur

نه درویشی به خاکی بی کفن ماند * نه دولتمند برد از یک کفن بیش

Personne au nom de sa misère n’est mis en terre sans un suaire

Et jamais il ne fut offert paire de linceuls aux empereurs




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