N° 128, juillet 2016

Religions et dynasties au pouvoir
en Iran Antique


Shahâb Vahdati


L’ancienne religion des tribus iraniennes

 

L’ancienne séparation entre les tribus iraniennes et indiennes a probablement eu lieu au cours du deuxième millénaire av. J.-C. Jusqu’à cette époque, les croyances religieuses et la langue de ces deux groupes tribaux étaient similaires. Une certaine idée de l’ancienne religion des Iraniens peut être donnée par la religion védique indienne.

L’Avestâ comporte des indications sur le culte des esprits des ancêtres (fravashi, qui devient plus tard fravahr). Comme les anciens Indiens, les Iraniens vénéraient les animaux sacrés comme la vache, le chien et le coq. Il existait aussi une boisson sacrée nommée haoma (soma indou). En outre, tout comme les asuras en Inde (les plus anciens dieux), les Iraniens honoraient les esprits nommés Ahourâ et au contraire, les Devas (qui conservent jusqu’à aujourd’hui en Inde leur statut de dieu), considérés par les Iraniens comme des mauvais esprits. Les noms de certains de ces dieux sont identiques ou très proches : Mithra est le dieu du soleil, le mauvais esprit, Angra (correspond au védique Indra), un autre est Yima (le dieu des agriculteurs, des bergers et le législateur en Iran) et correspond au védique Yama.

Sur la base de ces croyances archaïques, les Iraniens ont développé une religion originale : le mazdéisme ou zoroastrisme.

Manuscrit de l’Avestâ

 

Le mazdéisme

 

L’Avestâ - au moins les 17 chants de Gathas - a été attribué au prophète Zoroastre (forme grecque de Zarathushtra signifiant « le possesseur de chameaux dorés »), figure légendaire du VIe siècle av. J.-C. et contemporain du roi Vistâsp (à ne pas confondre avec Hystaspes, père de Darius Ier). Certains le situent à une époque encore plus avancée, tandis que d’autres mettent en question l’existence même d’une telle personne.

L’idée de base de l’Avestâ est l’existence d’un dualisme de la lumière et de l’obscurité dans le monde. Les deux sont incorporés dans des images de lumière et de bonté (Ahourâ) et du mal (Ahriman). Le nom de ce dernier n’a pas été mentionné dans les textes anciens nommés Gatha, qui comporte en revanche les mots de darvand et de daruzh signifiant menteur. Auprès d’Ahourâ Mazdâ existent six esprits lumineux mineurs qui s’appellent Amesha Spenta (les saints immortels). En dessous d’eux, d’autres esprits, les anges ("Yazat") sont la personnification des éléments purs (ciel, soleil, air, vent, feu, eau, etc.) ou des qualités morales. Ils s’opposent tous à une même quantité d’esprits ténébreux dont les plus importants sont Angra (comparable à l’indien Indra), Eshmo (devenu Asmodée en Europe, l’un des noms du diable).

Ahourâ Mazdâ est considéré comme étant le créateur de tout ce qui existe, mais il a créé tout ce qui est clair, propre, raisonnable, bon pour le peuple. A l’inverse, Angra Mainyu incarne tout ce qui est mal, impur et dangereux. La terre cultivée, les animaux domestiques, les éléments propres comme la terre, l’eau et en particulier le feu, l’esprit de vérité, de sagesse, de bonté ont été créés par Ahourâ Mazdâ tandis que l’obscurité, le désert, les animaux sauvages, les oiseaux de proie, les reptiles, les insectes, la maladie, la mort, l’infertilité, le mensonge, le mal et les impuretés morales ont été créés par Angra Mainyu.

Restes du temple de la déesse Anâhitâ, Kangâvar, près d’Ecbatane

 

La religion sous les Mèdes

 

La religion des Mèdes est l’une des formes de l’ancienne religion aryenne ayant précédé le zoroastrisme. Sous le règne des Achéménides, les Mèdes conservent leur religion qu’ils opposent au zoroastrisme pur des Perses. Il n’est donc pas étonnant que les prêtres de cette religion (appelés mages) appartenaient à la tribu des Mèdes.

On apportait des offrandes au pied de la déesse de la fertilité Anâhitâ Ardvisura. A Ecbatane, la principale ville des Mèdes, se trouvait le grand temple de la déesse Anâhitâ (Anaitis pour les auteurs grecs). Se référant à Hérodote (historien grec du Ve siècle av. J.-C.), Strabon (historien romain du Ier siècle av. J.-C.) mentionne les rituels ayant lieu dans ce temple. D’après lui, les femmes mèdes au service du temple d’Anâhitâ se livraient aux hommes de familles nobles (elles appartenaient aussi à des classes élevées) en échange de cadeaux. Elles n’offraient jamais l’hospitalité aux étrangers de leur classe, et ne choisissaient que des amants ayant un statut social plus élevé.

 

Sous les Achéménides

 

La coexistence de la foi monothéiste mazdéenne avec l’ancienne religion iranienne ne prend fin qu’avec la formation de la monarchie achéménide, où le zoroastrisme devient la religion d’Etat. Selon une hypothèse, la montée en puissance des Achéménides (au milieu du VIe siècle av. J.-C.) a été accompagnée par une sorte de bouleversement religieux. Pendant le règne des Mèdes (612-550 av. J.-C.), les mages avaient une position dominante en tant qu’unique caste sacerdotale du pays. On ne sait pas si les mages et l’ensemble des Mèdes vénéraient Ahourâ, les Devas, ou les deux en même temps sans les opposer les uns aux autres. En renversant le pouvoir des rois mèdes en 550 av. J.-C., les Perses achéménides hostiles aux mages choisissent les prêtres mazdéens (appelés mobed) qui prêchent les idées d’un Zoroastre ayant agi comme un réformateur. Cependant, les mages n’acceptent pas ce nouvel ordre sans résistance, et la plus grande rébellion contre les rois achéménides sera dirigée par un mage nommé Gaumâta (en 523). Les rois achéménides se sont proclamés eux-mêmes avec insistance comme partisans d’Ahourâ Mazdâ à travers de nombreuses inscriptions retrouvées de l’époque, et comme des protecteurs du divin et du sacré. A l’inverse, les ennemis se dressant contre eux étaient considérés comme les adorateurs des Devas (les démons).

Ernst Emil Herzfeld à Persépolis

On peut remarquer ce fait clairement sur une inscription du roi Xerxès (étudiée en 1935 par Herzfeld). On y lit : « Dieu est grand, celui qui a créé cette terre, qui a créé les cieux, qui a créé l’homme, qui a fait Xerxès roi, l’un des nombreux rois, l’un des nombreux maîtres… (le pays est considéré comme subordonné à Xerxès)… et parmi ceux-ci figurent des contrées où l’on adorait autrefois les Devas et puis, par la volonté d’Ahourâ Mazdâ, j’ai vaincu les Devas et interdit qu’on les respecte, et ordonné que désormais, on adore Ahourâ Mazdâ et le ciel... Ce que j’ai fait, je l’ai fait par la grâce d’Ahourâ Mazdâ. »

Le dieu Ahourâ Mazdâ est incarné par une image anthropoïde couplée avec un symbole solaire. Il couronne notamment le sommet de la grande inscription de Bisotoun datant du règne de Darius Ier et qui compte parmi les monuments achéménides les plus importants.

Ainsi, il est fort possible de penser que la transition du culte des Devas (les anciennes divinités tribales aryennes) vers le mazdéisme et la conversion finale à la religion d’Ahourâ Mazdâ a été notamment motivée par des raisons politiques. La religion d’Ahourâ Mazdâ était principalement destinée à sanctifier d’une aura religieuse le pouvoir royal. La politique religieuse des Achéménides était habile et prudente : ils n’intervenaient pas dans les cultes qui existaient déjà dans les pays ni dans les pays sémitiques et l’Egypte. Cependant, dans les régions de l’empire où vivaient les peuples iraniens, le culte centralisé d’Ahourâ Mazdâ fut propagé, et les Achéménides interdirent strictement l’ancien culte des Devas.

 

Sous la dynastie des Parthes

 

Il est connu que certains des rois parthes avaient des sympathies vis-à-vis de la religion zoroastrienne, mais ils ne réussirent pas à protéger cette religion de divers écarts et interventions. Du livre des légendes nommé Ardavirâf-Nâmeh, nous apprenons que l’incroyance, les innovations religieuses et le syncrétisme étaient répandus au sein de la population majoritaire. Peu avant, le pehlevi avait cessé d’être la langue officielle et l’enseignement du livre sacré des zoroastriens écrit dans cette langue, avait été peu à peu oublié. Tout cela a duré jusqu’à ce que, finalement, après cinq siècles, la confusion entre divers types de croyances religieuses et une certaine décadence culturelle conduisent à des troubles sociaux. L’indulgence des Parthes n’aboutit ni à l’éclosion d’une libre pensée ou à une renaissance de la culture, ni à une réforme religieuse. Cependant, la situation change avec l’arrivée des Sassanides.

Fravahar, un des symboles les plus connus du zoroastrisme en haut de l’inscription,
Bisotoun, Kermânshâh

 

Sous les Sassanides

 

Le centralisme religieux est la caractéristique principale du régime politique des Sassanides (du IIIe siècle au VIIe siècle), où la religion mazdéenne devient une véritable religion d’Etat et l’Avestâ est écrite sous la forme d’un livre sacré. La religion mazdéenne sert de bannière nationale à la lutte contre les Etats chrétiens méditerranéens (Byzance, et autres) et, plus tard, contre le califat musulman.

Ardeshir Ier, roi et grand prêtre zoroastrien à l’origine de la renaissance du zoroastrisme

Avec la défaite de l’Empire achéménide, l’hostilité entre les Mèdes et les Perses s’estompe. Après le règne des Séleucides et des Parthes, les Sassanides réussissent à créer un grand empire qui durera cinq siècles, autour de l’idée d’un pays avec une seule religion. Bien que l’Avestâ ne reconnaisse pas les mages comme des chefs religieux, le titre de magupat (mage) sera pourtant accepté au sein du pouvoir durant la période sassanide, pour être changé plus tard en mobad (prêtre zoroastrien) et largement utilisé.
Bien que dans le passé, les Mèdes aient été vaincus par les Perses et que leurs mages (chefs religieux) aient perdu de leur influence, sous les Sassanides, ils arrivent de nouveau au pouvoir et s’engagent en faveur de la grandeur des rois iraniens.

Appuyé par un courage remarquable, Ardeshir Ier, shâh et grand prêtre zoroastrien (ou Magupat) réussit à vaincre Artaban V, le dernier roi parthe, en 224 et accède au trône. Dès le début de son règne, il s’autoproclame Shâh garant de la loi politique et religieuse du zoroastrisme.

Dans le Shâhnâmeh (Livre des Rois) de Ferdowsi, nous pouvons notamment lire :

« La religion et le gouvernement sont ensemble comme la bague et la pierre,

Premières pages de l’Ardavirâf-Nâmeh, manuscrit appartenant à Thomas Hyde

Pas de gouvernement sans religion, et pas de religion sans conseil d’administration ».

Depuis le règne d’Alexandre de Macédoine et des Parthes considérés comme partisans des Grecs, la religion zoroastrienne, (s’opposant à la culture et la religion étrangères) commence à s’affaiblir et tend à sombrer dans l’oubli. Ardeshir Ier est donc déterminé à lui rendre sa grandeur oubliée, et son premier acte une fois au pouvoir est de redonner à cette foi l’éclat qu’elle avait à l’époque des rois achéménides.

Selon l’eschatologie zoroastrienne, le sauveur promis de la fin des temps sera lui aussi doté à la fois du statut de chef religieux et politique, et ce en vue de vaincre et d’éliminer les forces du mal dans le monde lors de la bataille ultime du bien et du mal (Dinkard, Volume 2). Plus tard, Ardeshir Ier charge un grand mobed nommé Tansari de collecter des parties de l’Avestâ et de compiler un livre sacré. Cette initiative royale rencontre une grande faveur de la part des prêtres zoroastriens. Chacun d’entre eux essaie ainsi de contribuer à ce projet en fonction de ses capacités, faisant de cet événement un exemple sans pareil dans l’histoire de la religion zoroastrienne.

Bas-relief à Naqsh-e Rajab montrant l’investiture de Ardeshir Ier ( centre gauche ) recevant l’anneau de puissance et le diadème du dieu Ahourâ Mazdâ (centre droit), époque sassanide,
province de Fârs

 

La récupération des feuilles disparates de l’Avestâ

Ce travail de rassemblement a été commencé par Ardeshir Ier et poursuivit avec grand sérieux par ses successeurs, en particulier Shâhpour II, appuyé par son grand vizir et célèbre chef religieux Adarbad Mehras-Pend (Dinkard, Volume 9). Mais l’idée de transcrire l’Avestâ dans le cadre d’un livre n’a pas été facilement accueillie. Transcrire l’Avestâ revenait, pour certains zoroastriens, à le rabaisser au rang d’objet matériel. D’un autre côté, il était nécessaire de compiler l’Avestâ car le zoroastrisme devenait la religion officielle du pays. Il fallait donc convaincre les coreligionnaires hésitants. Pour prouver le bien-fondé de ce choix et gagner la confiance des gens, Adarbad organisa une épreuve en conformité avec les légendes religieuses : il ordonna qu’on verse sur sa poitrine nue 27 kg d’étain fondu ; il en sortit indemne. A la suite de cet événement, plusieurs prêtres zoroastriens pieux et vertueux se mirent à collaborer au projet à travers le pays. Sur cette base, le roi Shâhpour déclara officiellement la licéité de la compilation de l’Avestâ, et publia un décret selon lequel dans le cas où les prêtres s’opposeraient à ce projet, ils seraient privés de leurs droits d’être considérés comme des chefs de la religion zoroastrienne.

A la même époque, les prêtres iraniens débattaient sur l’état de l’âme humaine après sa mort et cherchaient à accéder à des connaissances fiables sur l’au-delà, notamment afin de convaincre ceux qui ne croyaient pas. Ils choisirent un groupe composé de sept prêtres qui élurent le meilleur d’entre eux, un prêtre nommé Arda-Virâf. Celui-ci organisa des cérémonies religieuses préliminaires et entra dans un état d’extase qui dura sept jours, jusqu’à ce que son esprit accède à la lumière et voit les bienfaiteurs au Ciel et les pécheurs en Enfer. Après avoir repris conscience, il décrivit ce qu’il avait vu, ce qui devint la base des connaissances sur la vie éternelle dans la vision du monde mazdéenne.

 

Le judaïsme en Iran

 

La religion juive est présente en Iran depuis de nombreux siècles. Dès l’époque de la conquête de Babylone au VI siècle av. J.-C. par Cyrus II, les juifs libérés des chaînes babyloniennes vivent en bon voisinage avec les Iraniens. Le livre écrit en pehlevi nommé le Shahrestân-hâye Irâni (Les villes iraniennes) confirme que l’ensemble des villes iraniennes avaient leur quartier juif.

Buste d’Ardeshir Ier

Cependant, peu à peu, les deux peuples s’éloignent l’un de l’autre. Les livres en pehlvi commencent à les considérer d’abord comme des étrangers, puis comme des ennemis. Par exemple, le Dinkard refuse que la foi juive ait une origine divine, et la lie au contraire au personnage sanguinaire de Zahhâk et aux démons (daevas). Dans le cinquième volume du même livre, un certain Seno (nom d’un chef religieux zoroastrien) demande au shâh de parler aux juifs, et de promulguer un décret pour agir contre le développement de la foi juive dans le pays, car « ils sont la cause de la propagation du mal et la méchanceté parmi les fidèles de la foi mazdéenne ». Dans l’une des œuvres zoroastriennes ultérieures, Nabuchodonosor est loué pour avoir dispersé les juifs (Minou-Kherad). Après l’arrivée de l’islam cependant, les Juifs accèdent au rang de minorité reconnue, et vivent en paix et bonne entente avec leurs voisins musulmans.

 

La promotion du christianisme en Iran

 

Le christianisme arrive en Iran au cours de la domination des Parthes. Au début du règne des Sassanides, le christianisme est considéré comme l’une des religions de l’Iran, mais constituant une plus grande menace que les autres religions du fait de l’intensité de son prosélytisme.

Selon le chroniqueur Vigrame, l’auteur d’une Histoire de l’Eglise assyrienne, l’un des évêques chrétiens déclare qu’après sa mort, l’âme du shâh d’Iran ira en Enfer avec le diable, tandis que les âmes des chrétiens iront au Ciel. En outre, un prêtre chrétien d’Iran demanda au grand évêque de Byzance de sauver les chrétiens iraniens de la puissance maléfique des Sassanides. Les événements de ce genre ont été source de l’émergence d’inimitié et de haine entre les chrétiens et les zoroastriens. Les conflits sont plus tendus entre les dirigeants des deux religions, sujets aux fanatismes religieux et exacerbant l’hostilité sur la base de la foi. Pendant cette période, les prêtres zoroastriens persécutent plus que jamais les apostats et l’athéisme est considéré comme l’un des plus grands péchés.

Cependant, le nombre de prosélytes chrétiens augmente, en particulier lorsque les shâhs favorables au christianisme Yazdgard Ier et Hormoz IV montent sur le trône ou lorsque Khosrô Ier et Khosrô II choisissent pour épouse des chrétiennes. Noushzâdeh, l’un des fils de Khosrô Ier, adopte officiellement la religion chrétienne, et Khosrô II ordonne la construction d’églises à la demande de son épouse chrétienne. De telles actions de la part de la famille du roi encouragent les chrétiens à promouvoir et à diffuser leur religion. Ainsi, pour les chrétiens, Yazdgard Ier est surnommé « le roi saint » et pour ses compatriotes zoroastriens, « Yazdgard le pécheur ».

Adarbad Mehras-Pend, vizir de Shâhpour II et prêtre zoroastrien

 

La scission des zoroastriens

 

En conséquence, les dirigeants de la religion zoroastrienne voient une diminution de leur influence sur la population. Ils forment diverses sectes et factions pour interpréter les lois de la religion, chacun selon ses goûts et compréhension. Les textes en pehlevi ne parlent que peu de cette période, mais il existe de nombreux textes grecs, syriens et arméniens à ce sujet. Par exemple, Yeznik et Elisaus, deux écrivains arméniens du Ve siècle, ont écrit au sujet de la scission des zoroastriens. Le syrien Damaskius évoque dans son livre Odemus l’un de ces groupes zoroastriens qu’il appelle « les adeptes de l’espace ». Il dit : « Ils sont convaincus que l’espace est le principal créateur, et de lui sont issues les deux forces antagonistes du bien et du mal. » À son tour, le grec Cumont, auteur des Secrets de Mithra, écrit : « La plus importante et en même temps la secte la plus détestée des zoroastriens est celle des zurvânites qui s’est attirée le plus grand nombre de partisans, et ceci peu après avoir été attaquée par le gouvernement. Ils considèrent le temps (zorvân ou zurvan) comme étant le créateur principal de l’univers ». Eux et des adeptes du mithraïsme ont migré aux coins les plus reculés de l’Ouest, et les mithraïstes ont finalement choisi le dieu Zurvan (ou Zorvân) à la tête de tous leurs dieux.

 

Khosrô Ier, dit Anushiravân le Juste (en persan : Anoushiravân-e dâdgar)

Mâni et le manichéisme

 

Mâni naquit sous le règne d’Artaban V, le dernier roi parthe. A 13 ans, il reçut sa première révélation et commença immédiatement à diffuser sa prophétie. Il s’autoproclama dernier prophète et sous le règne d’Ardeshir Ier, commença à prêcher sa nouvelle religion. Sous le règne de Shâpour Ier, son influence était telle qu’il réussit à convertir le roi à sa foi. La religion de Mâni continuera à se répandre jusqu’à l’accession au trône du roi Vahram Ier. A partir de cette période, elle devient un adversaire sérieux de la religion zoroastrienne. Par conséquent, le clergé national de l’Iran incite le roi à agir contre Mâni.

Le roi et le grand prêtre zoroastrien demandèrent à Mâni de s’exposer à l’épreuve de l’étain fondu, qui aurait prouvé ou non la justesse de sa doctrine. Mais Mâni déclina cette proposition, il fut donc jeté en prison et exécuté en 276. Après l’assassinat de Mâni, le mouvement manichéen cessa de prospérer en Iran. Cependant, ses croyances et son idéologie ne furent pas détruites, et ses adeptes continuèrent de diffuser cette religion aux coins les plus reculés de l’Est (en particulier en Chine), ainsi que de l’Ouest. Et elle se propagea à un point tel que, pendant un certain temps, le manichéisme fut considéré avec le mithraïsme comme un adversaire sérieux du christianisme à Rome.

Les nombreux textes en pehlevi s’attaquent fortement à Mâni et à ses partisans. Ils l’appellent « Mâni Druj », ce qui signifie "apostat" ou "blasphémateur". Dans le livre Dinkard, il est considéré comme une sorte de div (démon), et ses disciples comme des « imposteurs, stupides, sorciers et égarés ».

 

Statue en pierre de Shâpour Ier, Kâzeroun, Fârs

Mazdak et le mazdakisme

 

Après le manichéisme, le mazdakisme est la deuxième religion révolutionnaire populaire dont les principes ont été établis par un prêtre zoroastrien nommé Mazdak, fils de Bâmdâd. Mazdak est un mobad (prêtre mazdéen) contemporain du roi sassanide Kavadh Ier, le père de Khosrô Ier. A cause de ses idées révolutionnaires et de ses prises de position sociales, il fut présenté par le clergé zoroastrien comme un « darvande abâliche » (blasphémateur maudit), et celui dont le péché a créé de la confusion parmi les fidèles (Dinkard, Volume 11). La philosophie de Mazdak, empruntée au mazdéisme, consiste à croire en l’existence des deux forces opposées du bien et du mal, mais elle promeut un certain ascétisme en interdisant de manger de la viande et en créant une religion basée sur le collectivisme et des considérations d’ordre économique. Mazdak désapprouve la propriété privée et encourage le partage du pouvoir entre ses partisans, afin d’éliminer les vices tels que l’envie, la cruauté et l’inimitié, considérées comme les racines du mal de la société.

Cette doctrine révolutionnaire a attiré, pendant un certain temps, l’attention des masses iraniennes à un point tel que même le roi d’Iran, Kavadh Ier, l’a accueillie favorablement. Mais plus tard, sous Khosrô Ier, fils de Kavadh Ier, les prêtres zoroastriens se réunirent pour la remettre en cause et lutter contre elle. Cette foi fut jugée dangereuse pour l’équilibre de la société iranienne, et le roi publia un décret autorisant la persécution des disciples de Mazdak dans le but de lutter contre la propagation des principes de sa religion. Peu après (en 528 av. J.-C.), Mazdak et ses partisans furent expulsés d’Iran. Bien que ce coup dur aboutit à une liquidation de l’idéologie proto-communiste de Mazdak en Iran, ses idées survécurent au-delà des frontières du pays.

 

La défaite des Sassanides contre l’islam

La mort de Khosrô II, sous le règne duquel l’Iran a lutté pour la dernière fois contre l’Occident (et en particulier l’Empire romain), est considérée comme constituant le début de la chute de l’Empire sassanide. L’arrivée au pouvoir des rois lâches et pusillanimes et les disputes majeures entre les chefs de l’armée iranienne affaiblirent considérablement l’empire sassanide. Khosrô II s’engagea dans une longue guerre avec les Romains et les tribus de l’Est (de l’Asie centrale). D’autres fléaux comme la peste et la sécheresse frappèrent le pays. D’autre part, des idéologies étrangères empruntées notamment à l’Occident pénétrèrent en Iran. Les Iraniens de foi mazdéenne jusqu’alors zélés dans le travail commencèrent à mener une vie oisive au lieu de cultiver la terre, ce qui fragilisa davantage le pays face à ses ennemis. En outre, les différentes croyances et les principes religieux divergents contribuèrent à l’affaiblissement du sentiment de patriotisme. Et lorsque le dernier roi sassanide Yazdgard III accéda au trône, une tribu venue de la péninsule arabique, dotée d’une nouvelle religion, envahit l’Iran et remporta une victoire écrasante.

 

Bibliographie :


- M. Boyce, Zoroastritsi : verovania i obichaï (Les zoroastriens : croyances et coutumes), Moscou, 1988.


- Lelikov, LA, Zoroastrisme : yavlenie i problemi, localnie i synchreticheskie culti (Le zoroastrisme : phénomène et problèmes, cultes locaux et syncrétiques), Ed. Nauka, Moscou, 1991.


- Râzi, Hâshem, Mazâheb-e bozorg-e doniâ (Les grandes religions du monde), Ed. Forouhar, Téhéran, 1981.


- Diakonov, Igor, Târikh-e mâd-hâ (L’histoire des Mèdes), Tr. de Karim Keshâvarz, Téhéran, 1966.


- Daryâï, Touradj, Shâhânshâhi-e sâssâni (La dynastie sassanide), Tr. Mortezâ Sâghebfar, Ed. Ghoghnous,

Téhéran, 2011.


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