N° 124, mars 2016

Nouvelles sacrées (XXVII)
Les femmes et la Défense sacrée
(1ère partie)


Khadidjeh Nâderi Beni


Construction d’un abri, Téhéran, 1985.
Photo : Saïd Sâdeghi

Dès l’attaque irakienne contre l’Iran, les femmes iraniennes participent activement à la résistance et à la défense contre l’envahisseur. La longue histoire de la Perse a toujours été marquée par le rôle des femmes dans les divers événements historiques : l’invasion des Mongols en Iran (en l’an 1219), la Révolution constitutionnelle (1905-1911), la Révolte du tabac (1892) et la Révolution islamique (1979) en constituent des exemples.

Profitant des expériences acquises lors des combats révolutionnaires contre le système pahlavi, les femmes prouvent une nouvelle fois l’importance de leur rôle dans les grands moments d’histoire du pays. En général, tout au long de la guerre Iran-Irak, les femmes ont participé à la défense du pays en deux temps : la participation directe aux combats et la participation indirecte à l’effort de guerre. En Iran, les femmes sont dispensées de participer activement aux combats ; cependant, au cours des huit années de la guerre, la situation a plusieurs fois exigé l’intervention directe des femmes dans la lutte armée contre l’ennemi. C’est surtout le cas pour l’histoire de la résistance de Khorramshahr face à l’occupation irakienne, durant laquelle le rôle des résistantes est à souligner. Quant à leur participation indirecte, elle comprend un grand nombre d’activités allant des secours aux victimes civiles au soutien aux familles sinistrées. Il s’agit de toute activité accomplie à l’arrière des lignes de front et prolongée jusqu’aux derniers moments de la guerre.

Premiers soins prodigués aux blessés, Andishmak, 1983.
Photo : Saïd Sâdeghi

1. La participation directe : Dès le déclenchement de la guerre, plusieurs villes du sud-ouest du pays se voient menacées par l’occupation irakienne. Le 24 septembre 1980, c’est-à-dire trois jours après le commencement officiel de la guerre, suite à la fondation des comités populaires pour la défense, on voit l’apparition d’une branche féminine dont la mission principale est d’organiser et d’instruire les forces civiles volontaires. En outre, un groupe de femmes (n’ayant pour la plupart aucune formation militaire) est chargé de fabriquer des armes artisanales, dont des cocktails Molotov utilisés contre les chars d’assaut de l’armée irakienne. Un autre groupe est chargé de surveiller les dépôts de munitions qui viennent d’être évacués et transférés dans un autre lieu. Pour sécuriser ces munitions malgré l’évacuation des garnisons, ce groupe devait régulièrement les déplacer. Avec la progression des Irakiens à l’intérieur de Khorramshahr, ce groupe féminin de résistance a dû faire passer le dépôt de munitions à Mâhshahr [1]. Dès le début des invasions irakiennes jusqu’à la veille de l’occupation complète de Khorramshahr, un grand nombre de femmes restent dans la ville afin de s’occuper des civils et des militaires tués et blessés. Selon les données statistiques, durant les 35 jours de résistance, la population féminine assume une double charge : 1) transporter des armes à l’arrière des lignes de front afin d’équiper les combattants ; 2) porter secours aux blessés et enterrer les morts dans le cimetière de la ville.

En outre, durant cette période, de nombreuses femmes combattent l’invasion irakienne au côté des hommes. Ameneh Vahhâbzâdeh, l’une des femmes combattantes qui résista contre l’occupation irakienne, relate dans ses mémoires : « Le 2 octobre 1980, un groupe de 300 femmes armées arrivent sur les lignes de front à Khorramshahr et Abadân. A partir de ce moment, ce groupe, dont j’étais membre, a participé à plusieurs opérations dont celle de Sâmen-ol-A’emmeh ». Fâtemeh Navvâb Safavi, elle, participe à une opération de reconnaissance sur les rives de Bahman Shir [2] et arrive à collecter des informations sur la situation et la structure de l’armée irakienne. Selon les propos de Noushin Nadjâr, une autre résistante combattante, durant la période de la résistance, un groupe de femmes était chargé de préparer des sacs remplis de terre qu’on utilisait pour construire des tranchées.

La nuit tombée, les femmes s’installaient sur le toit de la Mosquée Djâme’ qui était alors utilisée comme siège d’observation. Avec le commencement de la guerre, les femmes ont joué un rôle actif pour repérer et neutraliser des bombes posées par les Monâfeghins [3] En outre, un autre groupe féminin était chargé d’identifier les éléments de ce groupuscule qui s’étaient infiltrés à l’intérieur des villes et villages de l’ouest du pays, et plus particulièrement dans la province du Kurdistân. A suivre…

Source :
- Amiriân, Mohammad, Seyri dar târikh-e djang-e Irân-Arâgh (Aperçu sur l’Histoire de la guerre Iran-Irak), 5 vol., Centre des études et recherches de la Guerre, Téhéran, 1367/1988.

Notes

[1Ville portuaire située à 100 km du sud d’Ahvâz dans la province du Khouzestân.

[2L’une des branches de la rivière de Kâroun qui s’écoule au sud de Khorramshahr.

[3Gorouhak-e Monâfeghin ; « Monâfegh » est un mot arabe qui signifie « hypocrite ». Pour en savoir plus, voir notre article « Du Forough-e Djâvidân à Mersâd », n° 105, août 2014, consultable sur : http://www.teheran.ir/spip.php?article1933


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