En allant ce matin depuis Téhéran

Comme quittant le monde qui s’approfondit

Par son seul mouvement de nos âmes raidies,

Je me crois le quittant pour de plus clairs courants.

 

Large ville, bâtisse d’un empire assourdi

Dont il reste les bassins pour tout souvenir,

Je te fuis pour une autre où j’entends hennir

Un cheval fin et brun acheté dans Cadix.

 

Une maison m’attend dans le bord d’un jardin

Que les eaux de pluie qui remplissent les vases

Insufflent en fragrances aux vents de Chiraz,

Où l’on rêvasse à des fleurs qui cachent un daim,

 

Où les gaz retenus dans l’averse chargée

Se corrompent auprès d’un oiseau délirant

De l’odeur des pruniers, et des chênes d’Iran,

Abreuvés aux sources de la Chine à l’Egée

 

Où se succèdent, avant le mien, de doux printemps,

Des paradaeza remplis de rouges grenades

Et du jus de roses que je bois par rasades

Sous ton Ombre, toi qui nous fis, et qui nous attends.

Le soir déclinant est la tombe de mon cœur,

Et vase du désir poussant sa peau livide,

Comme un reflet mouillé dans un œil sassanide

Chute dans l’âme profonde de ma demeure.

 

Une toupie géante remplie de tempêtes

Danse lentement au fond de ce puits nocturne.

Désir derviche, disciple retombé aux urnes,

Le tournoi où tu pries vit sous un cœur ascète.

 

Mon lourd métal est une mer domestiquée

Qui rote et fume à la manière du Vésuve,

Sans déborder jamais les lèvres de ses cuves

Où le soleil toujours apparaît disloqué.

A une juriste

 

Vous avez sur la bouche un dessein de l’esprit ;

Un œil vert encombré d’une ombre morcelée,

Qui joue comme un saule sur un cours au répit.

Il y entre vulnéraire un Décret scellé

 

De l’étoile éternelle fille du Mystère,

Contre un nuage obscur qui doit toujours couvrir

La clarté d’un astre à la raison de la Terre

Dont le songe détruise et le muscle soupire.

 

Je glisse doucement des lois qui nous gouvernent

A vos traits imparfaits que règle l’harmonie,

A la crasse de Paris que l’aube décerne,

Où ma mémoire touchée de leur tyrannie

 

Déroule la fugacité du souvenir

D’un parfum brouillé dans le puits de la conscience,

De l’éclat d’un timbre net, mère du désir,

De tous les appâts dont le désir fait l’alliance ;

 

La brune chevelure et profuse, large et dense,

Le jais profond et voluptueux, plein et lisse,

Convoquent un bois d’Allemagne et de créance

Et mêlant dans sa nuit le chêne et la réglisse ;

 

Votre voix qui m’agrée et traversée du chant

Qui peut naître doucement dans une ombre pure

Jette de l’ordre comme un astre sur un champ

Encercle d’un rayon les doux épis qui crûrent ;

 

Deux beautés dissemblables et fausses jumelles

Recevant de la Lune la pleine lumière,

Vos globes verts joignent la clarté qui se mêle

Aux profondeurs sans accès du noble Mystère.

 

Conservez dans vos yeux où l’arabe boit source

La sphère de l’étoile et le plan de Justice

Que l’impiété divise et verse dans deux bourses,

Ecartant l’ombreuse pour celle du caprice.

 

 


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