N° 153, août 2018

Bozorg Alavi, écrivain pionnier de la littérature moderne persane


Farzâneh Nassimi
Traduit par

Mahnâz Rezaï


Bozorg Alavi, écrivain iranien de renom, naquit à Téhéran le 2 février 1904 et décéda à Berlin le 17 février 1997). Son œuvre a été interdite en Iran de 1953 à 1979.

Bozorg Seyyed Mojtabâ a été élevé dans une famille de commerçants. Son grand-père, Hajj Seyyed Mohammad Sarrâf, a activement participé au mouvement constitutionnel qui conduisit à la Révolution Constitutionnelle en 1906. Le père d’Alavi, Seyyed Abolhassan, fut également impliqué dans la politique constitutionnelle. A ce titre, il dut s’exiler en Allemagne et rejoignit le Comité nationaliste iranien ou Komiteh-ye Melliyun-e Irân, dirigé par Seyyed Hassan Taqizâdeh, éditeur de Kâveh (1916-1922), revue nationaliste couvrant des sujets politiques, culturels, scientifiques et littéraires, avec une forte orientation pro-européenne. Lors de l’un de ses voyages clandestins en Iran en 1923, Seyyed Abolhassan réussit à emmener ses deux fils avec lui en Allemagne. Deux ans plus tard, lui et son fils aîné, Mortezâ, rallient Ahmad Asadi et Taghi pour fonder la Faction républicaine révolutionnaire d’Iran ou Ferqeh-ye jomhouri-e enqelâbi-e Irân, dont la mission et l’ordre du jour furent énoncés en 1927 dans un document intitulé « Bayân-e haqq ». Seyyed Abolhassan, également l’auteur de Rejâl-e asr-e mashroutiyat (Les hommes marquants de l’ère constitutionnelle), se donna la mort en 1927 à Berlin.

En 1931, Mortezâ Alavi fonde la revue Peykâr à Berlin, dont quinze numéros sont publiés. Quelque temps plus tard, il est contraint de se réfugier en Russie après que des protestations du gouvernement iranien aient poussé l’Allemagne à l’expulser du territoire. En URSS, il est victime des purges staliniennes et meurt dans un camp de prisonniers dans la République soviétique d’Ouzbékistan.

L’éducation de Bozorg Alavi débuta dans une école élémentaire traditionnelle [1] située dans le principal bazar de Téhéran et se poursuivit dans des écoles « modernes » Aghdassieh et Dâr-ol-Fonoun. Ses activités politiques, elles, débutent quand il est à Dâr-ol-Fonoun, au moment de l’accord de 1919 signé entre l’Iran et la Grande-Bretagne.

Alavi continue ses études en Allemagne. Il montre de l’intérêt pour la littérature occidentale et aime tout particulièrement le romantisme allemand. Réprimant sa passion pour le journalisme, il étudie la didactique et la psychologie pour devenir professeur, comme lui avait conseillé son père, après avoir reçu son diplôme de l’université de Munich en 1928. Ses contacts étroits en Allemagne avec d’éminents hommes de lettres iraniens comme Hassan Taqizâdeh (1878-1970), Mohammad Qazvini (1877-1949 ou Mohammad-Ali Jamâlzâdeh (vers 1892-1996), lui font découvrir la littérature persane classique. C’est également durant cette période que se développe l’amitié qui le liera pour toujours à Taghi Arâni.

Pour gagner sa vie après le suicide de son père en 1927, Alavi travaille quelques mois comme traducteur à l’ambassade iranienne en Allemagne. Puis il retourne en Iran sur les conseils de son frère. En 1928, il commence à travailler comme professeur d’allemand à l’Ecole technique de Shiraz [2]. C’est alors qu’il se lance dans sa carrière littéraire, d’abord au travers de la traduction. Il traduit notamment des extraits de la pièce Die Jungfrau von Orleans (1801) de Friedrich von Schiller (1759-1805) pour un journal local. Il publie l’intégralité de la pièce, intitulée en persan Doudhize-ye Orleân, en 1933 avec une introduction de Sâdegh Hedâyat (1903-1951).

L’année suivante, il accompagne un géomètre allemand en tant qu’interprète et guide lors d’un voyage dans le Guilân. Ce voyage inspire sa nouvelle la plus connue, « Guileh mard », publiée plusieurs années plus tard dans la collection Nâmehâ va dâstânhâ-ye digar (Lettres et autres histoires, 1952). « Guileh mard » a été traduit en anglais par Manoutchehr Mousavi sous le titre « Un homme du Guilân » en 1976. Les premières nouvelles paraissent dans la revue Parvaresh. Des années plus tard, dans une interview avec Râmin Jahânbeglou, Alavi qualifia ces nouvelles de « très romantiques ». Elles ne furent jamais reprises dans ses recueils publiés postérieurement.

En 1929, alors qu’il enseigne l’allemand à l’Ecole technique de Téhéran, Alavi rencontre Nimâ Yuchij (1896-1959), pionnier de la poésie persane moderniste, enseignant alors le français dans la même école. Durant cette période, Alavi traduit La Profession de Madame Warren (1928) de George Bernard Shaw (1856-1950) sous le titre de Kasb o kâr-e Khânoum-e Warren, avec relecture d’Abdolhossein Noushin. Sous l’inspiration de Saïd Nafisi (1895-1976), un important homme de lettres iranien, Alavi traduit également des extraits de Das Iranische Nationalepos de Theodor Nöldeke (1836-1930). Les traductions paraissent en 1930 dans Sharqh, une revue littéraire publiée à Téhéran par Mohammad Ramazâni (1904-1967), propriétaire de la maison d’édition Kolâla-ye Khâvar, dont le comité comptait plusieurs personnalités de l’élite littéraire iranienne. Alavi rédige également un article sur Nietzche pour la revue Armân ou Armân Monthly (nos 8-10, pp. 278-84) en 1931.

Dans les années 1930, la présence imposante de Sâdegh Hedâyat domine la vie littéraire de l’Iran, et Alavi recherche ardemment à le rencontrer. Hedâyat et Alavi sont aujourd’hui considérés comme deux des pionniers les plus importants de la prose romanesque iranienne moderne.

Au cours de ses années de formation, Alavi oscille entre les pôles Hedâyat et Arâni. Il partage avec Hedâyat un amour profond pour l’Iran ancien et sa glorieuse histoire, et un mépris conséquent pour ses envahisseurs étrangers. Ce sentiment était très présent parmi l’élite moderniste iranienne dans la période d’après la Grande Guerre, et a été développé en tant qu’idéologie d’Etat des Pahlavi dans les décennies suivantes. Alavi penche également du côté de Hedâyat pour son utilisation des théories et des techniques de la psychanalyse freudienne dans ses premiers écrits. Les personnages mélancoliques et confus de Tchamedân (La valise), qui lui ont valu une renommée d’auteur de fiction moderne, sont des exemples particulièrement puissants de l’influence freudienne sous-jacente. Le sentiment d’aliénation d’Alavi par son père est bien reflété dans l’histoire éponyme de cette collection, un récit de relations triangulaires à Berlin, avec le narrateur et son père en opposition et rivalité pour l’amour d’une Russe.

D’un autre côté, sous la surveillance d’Arâni, Alavi, qui connaît déjà Das Kapital de Karl Marx, est attiré par l’idéologie marxiste de l’Europe de l’Ouest. Plus tard, il regardera avec remords ses années politisées : "Cela ne m’a mené nulle part. Il a bloqué ma façon d’être en tant qu’écrivain". L’oscillation d’Alavi entre Hedâyat et Arâni l’a mené au premier rang des deux mouvements littéraires et politiques les plus importants de l’Iran du XXe siècle. Il est regrettable, cependant, que leur présence imposante ait éclipsé les contributions de leurs disciples, y compris Alavi.

Bozorg Alavi

En février 1933, Arâni avec Alavi et Iraj Eskandari (1907-1985) fondent le périodique Donyâ (Le monde), premier journal marxiste à orientation théorique publié en Iran. La traduction d’Alavi du court métrage de Stefan Zweig (1881-1942) Brief Einer Unbekannten est publiée dans Donyâ sous le titre de « Golhâ-ye sefid : Nâmeh-ye yek zan-e nâshenâs » (Les fleurs blanches : Lettres d’une femme inconnue), sous le pseudonyme de Fereydoun Nâkhodâ. Alavi écrit également sur la psychologie et l’art pour le journal, et ses articles sont tous marqués par son engagement gauchiste et des théories psychanalytiques. Donyâ est interdit après douze numéros, en juin 1935.

Au printemps 1937, Alavi est arrêté pour son association avec les groupes communistes et propagation du marxisme. Il est condamné à sept ans de prison. En prison, Alavi et d’autres disciples d’Arâni, qui sont morts en prison le 4 janvier 1940, forment un groupe appelé le Groupe des cinquante-trois personnes (Gorouh-e panjâh o seh nafar). Avec l’occupation alliée de l’Iran en 1941, la plupart des membres du groupe sont libérés. Peu de temps après, ils fondent le parti communiste Toudeh de l’Iran et Alavi, toujours en prison, est élu à son comité central. Cependant, lors de la première conférence provinciale du parti Toudeh en automne 1942, Alavi démissionne de son poste pour éviter les tâches administratives et consacrer ses efforts à la promotion du programme du Parti Toudeh en rédigeant des articles. Il a également accepté un travail à la Société Perso-Soviétique des Relations Culturelles (Anjoman-e ravâbet-e farhangi-e Irân o Ettehâd-e Jamâhir-Showravi), et simultanément, traduit des nouvelles de la Seconde Guerre mondiale pour l’ambassade britannique en Iran, activité de traduction qui continue jusqu’à la fin de la guerre.

Peu de temps après sa libération en 1941, Alavi publie son Varaq-pârehâ-ye zendân [3], un recueil de cinq contes détaillant les espoirs et les déceptions de la vie en prison pendant le règne de Rezâ Shâh (1925-41). La collection a été louée pour la musicalité de son langage, la richesse de son imagerie, et sa brillante étude des caractères. La publication de son Panjâh o seh nafar, le récit de la vie en prison telle qu’elle a été vécue collectivement par lui et ses camarades partageant les mêmes idées provoque aussi un bouleversement parmi les intellectuels. Certains commentateurs ont lié la publication du livre à l’intérêt de son auteur pour le Parti Toudeh et l’ont critiqué pour avoir occasionné la transformation graduelle des leaders du Toudeh en figures mythiques.

Alavi, Ali Dashti (1894-1982), et plus tard Mahmoud E’temâdzâdeh (connu sous le nom de Behâzin, 1915-2006) parmi d’autres, sont crédités d’être les premiers auteurs persans modernes à décrire objectivement la vie en prison, créant ainsi un nouveau départ pour le genre médiéval et classique de la poésie carcérale nommée habsieh. La grande influence d’Alavi peut être détectée sur des écrits ultérieurs du même genre.

De 1941 à 1953, Alavi s’occupe principalement de publier des articles, d’affiner ses compétences littéraires et d’affermir sa réputation d’écrivain et d’intellectuel. Au cours de ces années, il a également traduit des œuvres de John B. Priestley (1894-1984), Anton Chekov (1860-1904), Maxim Gorky (1868-1936) et d’autres. En 1944, il est nommé rédacteur en chef de Payam-e no (Le nouveau message), l’organe officiel de la Société Perso-Soviétique des Relations Culturelles, dans lequel il publie la majeure partie de sa production littéraire marquée par des penchants idéologiques et des préférences politiques marxistes. Le récit de sa visite de la République soviétique d’Ouzbékistan dans le cadre d’une délégation culturelle iranienne a été repris dans Ozbakhâ (Les Ouzbeks, 1948), dans lequel il loue l’Union soviétique pour le bien-être matériel et culturel des Ouzbeks. En 1953, il reçoit la médaille d’or du Conseil mondial de la paix pour la publication de Nâmehâ va dâstânhâ-ye digar.

Alavi a également joué un rôle déterminant dans l’organisation du premier Congrès des écrivains iraniens (1946), qui a servi de tribune pour exprimer les points de vue les plus opposés. Orienté sans réserve par les gauchistes, le Congrès a contribué de manière significative au développement de la littérature engagée, qui a attiré un grand nombre d’écrivains dans les années suivantes. Ce congrès a aussi attiré l’attention des écrivains iraniens sur leurs droits collectifs et leurs intérêts communs dans un processus qui a abouti à la création de l’Association des écrivains d’Iran, le Kânoun-e nevisandegân-e Irân, en 1968. L’association jouera un rôle important dans la résolution des problèmes de censure dans les années suivantes.

Alavi, contrairement à de nombreux dirigeants Toudeh, était plus absorbé par le marxisme et le matérialisme dialectique occidental-européen, non-soviétique, prôné en Iran par Arâni et certains de ses disciples. Son approche flexible et tempérée des questions sociales, politiques et littéraires, cependant, contrastait avec la nature déterministe de l’idéologie qu’il épousait. Partagé entre les deux pôles, il rédigeait des articles idéologiquement encadrés tout en créant des histoires romantiques qui étaient souvent en contradiction avec les limites de l’idéologie.

Les histoires d’Alavi dans cette période se voient souvent refuser la dominance de la voix d’un narrateur omniscient, et permettent ainsi à divers personnages de raconter l’histoire de leurs propres points de vue. Leurs récits, non toujours conformes les uns aux autres, jettent une mystérieuse qualité sur la structure du récit, passionnant le lecteur, toujours tenu en suspens, avec le déroulement de l’intrigue. Cette stratégie est mieux utilisée dans son roman le plus célèbre, Tcheshmhâyash (1952, Ses Yeux), généralement considéré comme une étape importante dans le développement de la fiction persane moderne. L’histoire tourne autour du portrait d’une inconnue, intitulé "Ses Yeux", peint par un artiste célèbre, Mâkân, une figure clé de l’opposition clandestine dans les dernières années du règne de Rezâ Shâh (1925-1941), mort en exil. Certains critiques soutiennent que la représentation de Mâkân par Alavi pourrait être basée en partie sur Kamâl al-Molk (mort en 1938), peintre renommé des ères qâdjâres et pahlavi, tandis que d’autres ont retracé des similitudes entre Mâkân et Arâni. Ses Yeux sont une histoire de cadre dans laquelle l’histoire principale est racontée. Le narrateur de l’histoire est le directeur adjoint d’un collège d’art, qui tente de percer les secrets qui entourent la vie de Mâkân, et le mystère des yeux d’une femme. Sa recherche lui permet de retrouver le modèle de ce portrait, Farangis, une femme instruite d’origine aristocrate. En racontant l’histoire de sa vie et sa relation avec Mâkân, Farangis parle de son amour passionné pour le Maître, son implication dans les mouvements politiques clandestins pour lui plaire, et son acceptation éventuelle d’une proposition de longue date du chef de la police du Shâh pour sauver la vie de Mâkân.

La publication de Ses Yeux fit grand bruit et attira à la fois des louanges extravagantes et une condamnation très forte. Certains critiques ont trouvé la toile de fond idéologique du roman problématique, arguant qu’elle a réduit l’histoire au niveau d’un pamphlet. Aux dires de Khânlari, Alavi a présenté une première version du roman à Sâdeq Hedâyat, Sâdeq Tchoubak (1916-1998), et Khânlari. Ce dernier a trouvé que ce roman était une « histoire sentimentalement romantique » et qu’il souffrait des connotations politiques au détriment de ses mérites littéraires. Khânlari soutenait que le choc entre le romantisme littéraire d’Alavi et sa rigidité politique était la cause de la faiblesse du roman. Alavi, qui n’était pas d’accord avec l’évaluation de Khânlari, attribua ce jugement au poste de ministre que Khânlari occupait. Paradoxalement, « l’attaque la plus forte est venue des camarades politiques de l’auteur et des critiques de son propre parti », en Iran et en Union soviétique. Pour les gauchistes, Farangis représentait une bourgeoise aventureuse, qui n’avait rejoint le mouvement clandestin que pour l’excitation.

Cependant, tous les commentateurs n’étaient pas d’accord avec les critiques amères des partisans du Toudeh et louaient Alavi pour sa représentation étudiée de Mâkân et Farangis comme personnages complexes et multidimensionnels, qui avaient dépassé leurs limites sociopolitiques. Ses Yeux ont été également salués comme une histoire d’amour illustrée de manière cohérente autant dans sa perspicacité psychologique que dans sa protestation politique, et dépourvue de clichés et de platitudes idéologiques. L’influence du romantisme, de la psychanalyse et de l’idéologie dans le langage simple, économe et en même temps poétique d’Alavi, jusque-là inconnu des écrivains persans, fut remarquable. Alavi, contrairement à certains de ses contemporains, notamment Sâdeq Tchoubak, dont les écrits sont marqués par sa tentative constante de reproduire des dialectes régionaux et de transcrire les mots tels qu’ils sont prononcés dans la langue parlée, s’écarte rarement de la langue écrite standard.

Alavi affiche un talent remarquable pour créer des personnages féminins vifs. L’image de sa première femme, Guitâ, et les souvenirs de sa mère, qui a été séparée de son mari et a vécu une vie solitaire, pourraient avoir contribué à sa représentation de Farangis. Comme beaucoup de ses autres protagonistes féminines, Farangis n’est ni consacrée ni trompée, et lutte contre les traits culturels qui ont influencé son point de vue. Par ses défauts, elle engage la sympathie du lecteur. Les émotions et les dilemmes de Farangis peuvent peut-être être mieux compris comme symptomatiques de la modernisation rapide que l’Iran subissait dans ces années. Le ton confessionnel de ses paroles amène le lecteur à comprendre qu’elle a voyagé loin pour sauver Mâkân, et comme nous le dit la conclusion de son histoire de vie, "Le Maître a commis une erreur".

Alavi est professeur invité à l’Université Humboldt, enseignant la langue et la littérature persanes, lorsque le gouvernement de Mohammad Mossaddegh tombe lors du coup d’État Ajax. A partir de cette période, Alavi reste à Humboldt et se détourne de la fiction pour se consacrer à la recherche littéraire et à la traduction d’œuvres persanes en allemand. Désormais, il évite les activités politiques et n’assiste plus qu’à une seule réunion du parti communiste iranien Toudeh à Moscou en 1957. En 1969, il se retire et cesse son enseignement à l’Université Humboldt.

La troisième phase de sa carrière littéraire commence en exil. Ses œuvres majeures en allemand sont Kämpfendes Iran (Iran en conflit, Berlin, 1955), et Das Land der Rosen und der Nachtigallen (La terre des roses et des rossignols, Berlin, 1957). Avec Heinrich FJ Junker, il est co-auteur du Persisch-Deutsches Wörterbuch, dictionnaire persan-allemand et du Geschichte und Erntwicklung der modernen Persischen Literatur (Histoire et développement de la littérature persane moderne, Allemagne, 1964), avec des articles sur les poètes et écrivains iraniens. Le livre suit l’évolution de la prose et de la poésie persanes depuis le début du XXe siècle sur fond de changements politiques et sociaux.

Il a édité et écrit des épilogues à la traduction allemande de trois livres de Sâdegh Hedâyat : Haji Âghâ, tr. Werner Sundermann, sous le titre de Hädschi Äghä (Berlin, 1963) ; Afsâne-ye âfarinesh, tr. Manfred Lorenz, sous le titre de Die Legende von der Schöpfung (Berlin, 1960) ; et Die Prophetentochter (et autres contes), tr. E. Fichtner et Werner Sundermann. Il est également l’auteur d’articles sur la vie socio-politique en Iran et d’une introduction à Khâkestar-e hasti (Les cendres de la vie, Téhéran, 1999), une collection d’articles sur la critique littéraire par Mohammad Ja’far Mahjoub, célèbre chercheur littéraire persan. Certaines de ses nouvelles d’exil ont été publiées dans la revue Kâveh, périodique persan publié à Munich par Mohammad Âsemi. Son Mirzâ (1968, par Judith Wilks sous le titre de "Mirza", 1991), et le roman Sâlârihâ (Les Sâlâris, 1978), ont été publiés à Berlin-Est.

Au printemps 1979, Alavi retourne brièvement en Iran après 25 ans d’exil et y reçoit un accueil chaleureux. Il retourne de nouveau en Iran l’année suivante pour une courte visite. Il continue de vivre et de travailler à Berlin, visitant l’Iran pour la dernière fois en 1993. Ses travaux ultérieurs, tels que Mouriâneh (Termites, Téhéran, 1993), qui raconte l’histoire des dernières années du régime Pahlavi du point de vue d’un agent de la police secrète, la SAVAK, et Revâyat (Histoire, Téhéran, 1998), sont extrêmement faibles et de peu de mérite littéraire. Golshiri les considérait comme un passage du « romantisme révolutionnaire au romantisme islamique ». Les articles qu’il a écrits pour Âyandeh (Futur), journal persan publié et édité par Mahmoud Afshâr (1893-1983, et plus tard Iraj Afshâr), et d’autres publications sont également plutôt faibles. Ses nouvelles d’exil ont été publiées en Iran en deux volumes intitulés Mirzâ (1978) et Yekkeh va tanhâ (Seul et esseulé, 1978).

Alavi a épousé sa première femme, Guitâ, en 1936. Le mariage s’est terminé par un divorce en 1939, alors qu’Alavi était toujours en prison. Plus tard, il a épousé sa cousine Fâtemeh Alavi, dont il eut un fils, Mâni. En 1956, il épouse en troisièmes noces Gertrude Klapoetke en Allemagne. L’écriture de fiction demeura son ambition suprême, mais son parcours fut semé d’embûches et de détournements, et le cours de sa vie déterminé par les mouvements sociaux et politiques qui le conduisirent en prison et le poussèrent à l’exil. Bozorg Alavi décéda à 93 ans, déplorant encore son rêve contrarié : « Quand je vois mes collègues produire des œuvres si précieuses... Mon cœur est rempli de chagrin que mes mains soient vides, et je me demande ce qui s’est passé. Vous vouliez devenir écrivain mais vous êtes resté bloqué ».

    Notes

    [1Institution scolaire en vigueur en Iran avant la modernisation du système éducatif et appelée en persan « maktabkhâneh ».

    [2Honarestân-e san’ati-e Shirâz.

    [3Traduit par Donne Raffat sous le titre « Scrap-Papers from Prison », 1985.


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