Richesse et savoir sont comme rose et narcisse
Qui ne sauraient fleurir ensemble.

Né à Balkh au IXe siècle, Abol-Hasan Shahîd Ibn Hossein Jahûdânakî Balkhî fut un grand théosophe, théologien et philosophe de son temps qui passa la plus grande partie de sa vie à étudier et à enseigner. Il fut notamment remarqué à la suite d’une controverse concernant la nature du plaisir qui l’opposa à Rhazès, anecdote figurant dans de nombreux écrits de l’époque et qui fut largement retenue par la postérité. On peut notamment retrouver la conception de la notion de plaisir chez Shahîd Balkhî - opposant notamment plaisir du corps et plaisir de l’âme en défendant la précellence de ce dernier - dans des ouvrages tels que Sawân-ol-hikma de Abû Soleymân Mantiqî. Il s’entretint également avec Rhazès sur de nombreux autres sujets tels que la connaissance du divin, les notions d’immobilité et de mouvement, ou encore l’eschatologie. Ces débats conduisirent d’ailleurs Rhazès lui-même à composer un ouvrage en réponse aux problèmes et questions soulevés lors de ces échanges avec Shahîd Balkhî. Poète reconnu, il se distingua avant tout par ses ghazals qu’il rédigea en persan et en arabe, mais dont une grande partie a malheureusement été perdue. Il fut également un éminent maître calligraphe dont le génie artistique a notamment été évoqué par Farrokhî lui-même. Il mourut en 936 et le poète Roudakî, qui lui vouait une grande admiration, lui rendit hommage en composant une élégie funèbre vantant l’étendue de son talent.

Serment

J’en fais le serment par ta vie, un serment solennel,

jamais je ne t’abandonnerai ni n’écouterai nul avis.

Non, je n’accepterai aucun de ces avis qu’on me prodigue,

car un avis contre un serment est de nulle valeur.

J’ai ouï dire que le paradis appartient à celui

qui procure au cœur désireux l’objet de son désir.

Mille perdreaux jamais n’auront l’âme d’un faucon,

mille esclaves jamais n’auront l’âme d’un seigneur.

Si l’empereur de Chine contemplait ton visage,

il te rendrait hommage et prodiguerait ses trésors.

Si le roi des Hindous voyait ta chevelure,

il se prosternerait et raserait les temples.

Je suis comme Ebrâhim dans la machine du supplice,

on voudrait me précipiter au bûcher des regrets [1].

Mais la paix soit sur toi, ô ma rose du Paradis,

et que ton visage toujours oriente tes prières !

Les astres

Gloire au soleil, à Vénus, à la lune :

ils sont indemnes éternellement.

Ils courent tous selon leur unique loi

et sans jamais s’écarter de leur route.

On croirait voir une assemblée de rois,

entre lesquels le soleil est empereur.

Ils sont amis et face à face

ils se regardent l’un l’autre…

Il est au ciel deux artisans,

l’un est tailleur et l’autre tisserand.

L’un ne coud que la tiare des rois,

l’autre ne tisse que de la bure noire.

Traductions et note extraites de l’ouvrage de Z. Safâ, Anthologie de la poésie persane, Gallimard/Unesco, 2004.

Notes

[1Selon la légende musulmane, Ebrâhim (l’Abraham de la Bible), apôtre du vrai Dieu, fut, sur l’ordre du roi païen Nemrod, attaché à une catapulte pour être précipité dans un brasier gigantesque.


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