N° 17, avril 2007

Histoir de l’Iran

La période proto-élamite


Mortéza Johari


Le pays, connu sous le nom de l’Iran, qui commença à se développer six siècles avant J.C., constituait une civilisation sur laquelle nous n’avons que très peu de renseignements. Cependant, les quelques documents qui nous sont parvenus ont permis aux chercheurs de se faire une idée sur certaines caractéristiques distinguant ce peuple de ceux établis dans la région du Tigre et de l’Euphrate.

Ainsi, les peuples des plateaux du Sud-Ouest, les "Khozi", différaient des Aryens de la région montagneuse de l’Iran, alors que d’autres peuplades comme les "Huri", "Lulubi", "Guti", "Manda" ou encore "Kachi" avaient, elles, des racines identiques à celles du peuple Aryen.

Les peuples qui constituèrent la civilisation perse et qui lui donnèrent le nom d’Iran semblent remonter de 1000 ans à 2000 ans avant l’ère chrétienne. Il s’agissait de peuplades qui avaient émigré des régions montagneuses situées à l’Est et au Nord-Est vers les plaines intérieures, pour s’installer auprès d’autres populations de même lignage qui s’étaient auparavant établies sur ces terres. Avant d’émigrer vers les terres intérieures, ces peuplades s’installèrent d’abord dans des régions qui correspondent aujourd’hui au Tadjikistan, à l’Ouzbékistan, au Turkménistan et à l’Afghanistan. Ce furent ces peuples - essentiellement composées de cultivateurs et d’éleveurs de troupeaux - qui constituèrent les grandes tribus d’Aryens de cette région et qui, en comparaison avec les autres peuplades comme les Koldani, les Khuzi ou les Ashuri, avaient une culture très peu développée.

Les premiers habitants de la région des plateaux iraniens

Après l’assèchement de la grande mer qui recouvrait l’Iran, 20 000 ans avant l’ère chrétienne, et la longue période de sécheresse qui lui succéda, les terres asséchées et fertilisées par la sédimentation permirent l’installation de peuplades dans des grottes forestières aux abords des montagnes. Des traces de ces groupes existent dans les régions montagneuses de Bakhtiâr, à Tang Badiân, qui révèlent également qu’elles savaient manier la lance et façonnaient de la poterie noire. Les hommes étaient responsables de la chasse alors que les femmes surveillaient le foyer et fabriquaient des poteries. Elles s’occupaient également de la cueillette des fruits qu’elles séchaient pour les conserver et cultivaient de petits espaces, donnant naissance à une agriculture qui n’en était encore qu’à ses prémisses. Considérées comme le principal soutien de famille, les femmes connaissaient une supériorité au sein d’une cellule familiale de type matriarcal.

Au fur et à mesure de l’assèchement de la grande mer centrale, les rivières se jetaient dans les lacs qui eux-mêmes étendaient leurs alluvions, permettant ainsi de fertiliser ces terres. Peu à peu, des animaux et des plantes s’y développèrent et les êtres humains sortirent de leur grotte pour peupler ces nouvelles étendues. Environ 5000 ans avant J.C., les régions d’Iran étaient habitées par des peuples dont certains vestiges ont été retrouvés dans la région de Kâshân.

Les habitations étaient faites de paille et de bois, et les feuilles qui couvraient les toits furent peu à peu mélangées à de la boue. Les ustensiles de cuisine étaient constitués de paniers tressés recouverts d’argile, la poterie fit progressivement son apparition et les femmes dessinaient ces motifs de paniers sur les poteries, jusqu’à l’apparition du cuivre et son utilisation pour la fabrication d’ustensiles de cuisine.

A cette époque, les morts étaient enterrés dans les maisons après avoir été enduits d’oxyde de fer. Ils étaient enterrés avec des ustensiles utiles et des aliments. Peu à peu, les animaux furent apprivoisés et utilisés pour le transport, et leur peau servait à la confection de vêtements. L’agriculture, l’élevage et le commerce se développèrent. Environ 4000 ans avant J.-C., l’architecture des habitations se complexifia, avec l’apparition de parpaings et l’abandon de construction en couches. Cependant ces parpaings n’étaient pas réguliers mais pressés à la main, en forme de boules dures séchées au soleil, et placés au milieu de la boue qui constituait le mur. Les murs et l’intérieur des maisons étaient peints en rouge, et les morts étaient enterrés en leur sein, près de l’endroit où brûlait le feu et étaient préparés les repas, et ce afin de pouvoir continuer à "participer" à la vie familiale et au repas. Il semble que dès cette époque, les femmes avaient appris l’utilisation du tour à poterie.

Le chien de garde fit son apparition dans la vie de ces paysans et apporta une plus grande sécurité aux demeures et aux champs. Le cheval devint aussi d’utilisation courante pour le transport et les travaux agricoles.

Peu à peu, les briques devinrent plus régulières et remplacèrent les anciennes "boules de parpaing séché" dans la fabrication des murs, peints désormais en blanc, et comptant désormais des fenêtres et des portes. En parallèle, des villages se constituaient en quartiers différents. Les oiseaux et les animaux en général étaient les motifs les plus couramment représentés à cette époque sur des poteries de plus en plus élaborées. Enfin, la fonte du cuivre et la formation de moules sont les premières découvertes de ces anciens peuples d’Iran.

La transhumance des peuplades iraniennes

Au début du deuxième millénaire avant J.C., la situation instable régnant dans ses régions d’Asie mineure obligea les peuplades et les tribus iraniennes qui s’étaient installées dans les régions des plaines centrales à émigrer. De façon générale, les pressions des peuples d’origine asiatique au Nord, le refroidissement du climat, le développement des tribus et l’assèchement des pâturages, furent à l’origine de cet exode.

Environ 1700 ans avant J.-C., les Mèdes et les Parthes, qui vivaient au Nord de la mer Caspienne et entre la mer Caspienne et la mer Noire et dont les dialectes étaient similaires, furent les premiers à partir pour les régions du Sud, pour finalement s’établir à l’Ouest de la mer Caspienne, donnant à cette région des noms dont l’origine fut le mot "Erân". Certains historiens estiment que ces peuplades étaient celles des "Shekaï" et des "Sarmati". Après avoir traversé les chaînes montagneuses du Caucase, ils s’établirent aux environ du lac d’Urumieh - très vaste à l’époque -, sur des terres verdoyantes favorables à l’agriculture et à l’élevage, spécialement celui des chevaux. Les Mèdes s’installèrent au Sud-Est du lac, entre Hamedân et Tabriz et jusqu’à Ispahân, alors que les Parthes choisirent les régions Ouest et Sud-Ouest du lac, celles de l’actuel "Ardalan" qui à l’origine, signifiait "art-alan" ou Iran sacré. Ces deux peuples vivaient en paix et se consacraient à l’agriculture et à l’élevage des chevaux qui leur conférait une supériorité stratégique dans les combats. Au début, ils se mirent au service des dirigeants de la région pour devenir ensuite eux-mêmes les chefs des villages.

Les relations entre les Iraniens et les habitants de ces régions

Les peuplades iraniennes qui donnèrent leur nom à cette région s’installèrent progressivement dans des campements dispersés aux alentours des villages. Leurs relations avec les habitants étaient pacifiques, et ils ne furent pas contraints, (à l’inverse de leurs cousins indiens), à constamment guerroyer pour s’installer sur ces nouveaux territoires.

Cependant, les habitants de la région avaient un vieil ennemi, les Assyriens, qui les attaquaient régulièrement pour les piller. L’arrivée de ces nouveaux guerriers fut l’occasion de trouver un protecteur pour le village. Ils leur permirent donc de s’installer aux alentours et de s’adonner à l’agriculture, à l’élevage des chevaux, tout en protégeant le village.

Témoins du courage et de l’habileté de ces cavaliers, les chefs des villages les engagèrent pour leur propre protection et la surveillance interne du village. Ils devinrent alors, grâce à leurs chevaux et à leurs chiens de garde, les gardiens et l’armée du village. Peu à peu, leur influence et leur pouvoir leur ouvrirent les centres économiques et les centres du pouvoir, et le mariage de certains avec les filles de personnes influentes du village favorisa leur essor économique et politique. Suite à ces alliances, une grande partie des terres devint la propriété des Iraniens nouvellement installés qui, après avoir été les gardiens et les défenseurs du village, en devinrent bientôt les nouveaux chefs.

Les habitants de la région acceptèrent les coutumes et les rites de ces puissants arrivants qui intégrèrent également certaines coutumes et mœurs des anciens habitants de la région. Les Iraniens construisirent progressivement, comme ils en avaient la coutume, des forteresses de deux ou trois murailles, avec des tours et des fossés. Par la suite, la culture des anciens habitants de la région disparut peu à peu au profit de celle du peuple iranien, pour constituer une nouvelle société fondée sur l’élevage et l’agriculture, qui ouvra la vie à un essor économique remarquable et rapide.

Les vestiges de cette époque, retrouvés sur la colline de Sialk aux alentours de Kâshân révèlent l’existence de deux groupes et de deux cultures différents. On y trouve les vestiges d’une solide forteresse près d’un village ainsi que les restes d’un palais, d’une habitation et d’un cimetière. Les dépouilles des nouveaux arrivants n’ont pas été inhumées dans les maisons, comme c’était la coutume dans cette région, mais dans la "ville des morts", avec leur couvre-chef, leur vaisselle en terre cuite et leur équipement de cavalier. Le motif du cheval était très présent sur les poteries de cette époque et souligne l’importance de cet animal dans la vie des habitants. C’est ainsi que les peuplades iraniennes réussirent à s’installer dans la région et à prendre en main son contrôle politique et économique.

Sources :

1. Pirnia, Hassan, L’Iran antique, Volume I.

2. Saeediyan, Saeed (سعید سعیدیان), Les peuples d’Iran.


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