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Durant son histoire plurimillénaire, la culture iranienne s’est nourrie et a été enrichie par des sous-cultures nomades et populaires. La culture se compose d’un ensemble d’éléments très divers qui se complètent en s’associant. Parmi les éléments constitutifs de toute culture, nous pouvons notamment citer la langue, la littérature, l’artisanat, mais aussi les vêtements.
Nous allons ici donner un aperçu des vêtements de l’un des peuples les plus anciens et les plus préservés de l’Iran : la tribu bakhtiârie. En effet, "les Bakhtiâris comptent parmi les peuples iraniens qui se sont le moins mélangé aux étrangers non seulement au niveau racial, mais également linguistique (leur langue étant le lori), culturel et littéraire. Au cours des différentes périodes historiques, ils menèrent une vie rude et retirée au cœur des montagnes Zâgros (à l’ouest de l’Iran) : les monts élevés, les vallées profondes et étroites, les forêts denses et impénétrables, les cascades et les fleuves rebelles, en d’autres termes l’enclavement et la difficulté à accéder à leur lieu d’habitation a ainsi contribué à les préserver en partie des guerres et des attaques que leurs compatriotes ont subies dans les autres régions du pays, comme par exemple celles d’Alexandre, des Arabes ou des Mongols." [1]
Selon les spécialistes, les vêtements des femmes bakhtiâries ressemblent beaucoup à ceux des femmes de l’époque sassanide. Les motifs des vêtements des hommes bakhtiâris seraient quant à eux extraits des dessins de ziggourat [2], ou bien de ceux du tombeau du Grand Cyrus. L’une des caractéristiques des vêtements bakhtiâris est que la matière première (comme la laine ou le feutre par exemple) est produite par les Bakhtiâris eux-mêmes.
Les vêtements des femmes bakhtiâries se caractérisent par leur grande diversité de couleurs qui varient selon l’usage : la vie quotidienne, les fêtes, le deuil, etc. Nous pouvons néanmoins dégager les éléments principaux suivants :
1. Le latchak (fichu) : Le latchak est une étoffe de velours, en général vert ou rouge foncé, qui entoure les oreilles et à laquelle est cousue une autre pièce d’étoffe beaucoup plus longue grâce à laquelle les femmes se couvrent la tête et même les épaules. Des perles de verre sont cousues sur la partie extérieure du latchak qui se fixe sur le front.
2. Le meynâ : Le meynâ est une pièce en dentelle de 2 à 5 mètres qui s’attache au latchak avec une épingle. Au cours d’un deuil, les femmes portent un fichu noir, nommé koulouki ou lâgheh à la place du latchak ou du meynâ.
3. La djouvâ ou djoumâ (robe de femme) est une sorte de couverture à manches longues qui couvre les genoux et s’arrête aux pieds. En général, les femmes bakhtiâries portent un djelizghet (gilet) sur leur djouvâ. Elles portent également une jupe longue nommée tonbân (pantalon) sous leur djouvâ.
1. Le tchoghâ est un pardessus blanc, sans manches, sans boutons, le plus souvent en laine et à rayures noires s’arrêtant aux genoux. Le tchoghâ compte parmi les vêtements les plus anciens des peuples iraniens. Les hommes portent en général une chemise sous leur tchoghâ. L’emploi de deux couleurs tout à fait opposées (le noir et le blanc) pour coudre ce vêtement était également doté d’une dimension symbolique, et était autrefois utilisé dans les cérémonies religieuses. Cette opposition rappelait le conflit traditionnel entre le bien et le mal, les rayures noires représentent la méchanceté et les rayures blanches évoquant le bien.
2. Le tonbân-e dabit est un pantalon large et noir qui se porte en général à l’occasion des fêtes et des cérémonies. Cet habillement descend de la taille et entoure les pieds traînant par terre. L’homme bakhtiâri revêt également une ceinture qui sert à ajuster son tonbân-e dabit à la taille.
3. Le kolâh-e bakhtiâri est un chapeau de feutre noir ou brun qui est souvent porté par les hommes adultes. Il existe deux sortes de kolâh-e bakhtiâri : le kolâh-e khosravi et le shab kolâh ; le premier est un chapeau plus ou moins haut dont la couleur varie selon l’usage et la personne qui le porte : le blanc est réservé aux chefs de tribu, tandis que le noir est porté par les hommes du peuple. Le shab kolâh est un chapeau brun foncé porté par les jeunes célibataires lorsqu’ils sont au travail. Il se compose d’un feutre épais qui protège la tête contre la chaleur ou le froid.
Sources :
Goli Zavâreh, Gh., Tchehreh-ye Tchahâr Mahâl et Bakhtiâri (Visage de Tchahâr Mahâl et Bakhtiâri), Téhéran, Sâzemân-e Tablighât-e Eslâmi, 1377 (1998).
Karimi, Asghar, Safar be diâr-e bakhtiâri (Voyage au sein de la région bakhtiâri), Téhéran, Farhangsarâ, 1368 (1989).
[1] Voir "Les Bakhtiâris : héritage culturel des montagnes du Zâgros", Kh. Nâderi Beni, article publié dans La Revue de Téhéran, N° 54, mai 2010.
[2] Temple babylonien en forme de pyramides et comportant plusieurs étages.