N° 20, juillet 2007

Le golfe Persique


Mortéza Johari
Traduit par

Maryam Devolder


De l’antiquité jusqu’à nos jours, les textes historiques et géographiques ont toujours parlé du Golfe Persique pour désigner la partie maritime du sud de l’Iran du débouché de l’Arvandrud au détroit d’Hormuz. Certains historiens, géographes ou archéologues l’ont nommé aussi "la mer Perse", "le Golfe Al-’ajam" ou "le golfe Persique". Des écrivains grecs comme Strabo furent les premiers à nommer cette mer "la mer Perse" et la région de l’Iran, la Perse. Ce qu’ils appelèrent Persépolis signifiait "la ville ou la région des Perses".

Les historiens et les savants d’avant l’ère chrétienne, dans leur description des époques qui remontaient à 700 ans av. J.-C., c’est à dire la fin de la dynastie des Elamites, le début des Mèdes et l’arrivée au pouvoir des Achéménides, appelaient cette région "le golfe Persique". Avec l’ère chrétienne, les historiens et les géographes grecs, romains et égyptiens continuèrent à le nommer de cette façon.

En faisant allusion à l’époque des Sassanides, Mussa Khûrni, géographe du Ve siècle, parle du Golfe Persique en terme de "mer Perse" faisant partie de l’empire iranien. Les documents historiques et géographiques de l’époque islamique parlent de cette région dans les mêmes termes : Khalij al-Fârs ou Bahr-ol-Fârs. Des dizaines d’historiens célèbres comme Ibn Faqih, Estekhari, Mas’ûdi et Ibn Hawqal appelaient également la mer du sud de l’Iran "la mer des Perses".

Les voyageurs occidentaux qui vinrent en Iran au XVIe siècle évoquèrent aussi le "Golfe Persique" et les historiens de l’époque des Qâdjârs, Mohamad Ebrâhim Kâzerûni, Rezâ Gholi Khân Hedâyat, Lesân-ol-Molk Sepehr ont toujours parlé de cette zone maritime en terme de "Golfe Persique" dans les différents ouvrages sur l’histoire de l’Iran qu’ils ont rédigés.

Les historiens arabes comme Jorji Zeidân, Qadri Qal’aji, Nofel Mesri, ’Ali Hamîdan, ont travaillé sur l’histoire du Golfe Persique et sur la nomination de cette région qu’ils ont toujours appelée de cette manière. Les encyclopédies allemandes, françaises, américaines et turques, ont aussi parlé du Golfe Persique pour désigner cette région, alors que les Anglais utilisaient parfois d’autres expressions pour le désigner du fait de l’ingérence qu’ils avaient dans la région.

La question du nom du Golfe Persique et d’un éventuel changement de nomination est apparue ces dernières années et semble être le résultat d’une manœuvre politique qui ne semble cependant pas avoir eu l’effet attendu dans le monde. Lord Belgrave, ambassadeur anglais entre 1926 et 1957 dans différents pays de la zone et qui faisait preuve d’une grande animosité envers l’Iran et les Iraniens, fut le premier à parler officiellement de Golfe Arabique au lieu de Golfe Persique. Cependant, certains historiens et politiciens anglais comme Fred Halliday ou Arnold Wilson ont continué à utiliser le terme "Golfe Persique" dans leurs articles et discours.

Les eaux du Golfe Persique sont, dans le cadre des règlements internationaux, sous le contrôle et l’autorité de la République islamique d’Iran. Dans la préface de la nouvelle loi sur les eaux territoriales de la République islamique d’Iran, du Golfe Persique et de la mer de la région de Makran, la convention maritime de 1982 a prévu 12 miles de région de surveillance en plus des 12 miles de mers territoriales, ce qui confirme la propriété pour la République islamique d’Iran, avec les îles iraniennes, d’une grande partie des eaux du Golfe Persique.

La situation géopolitique et stratégique du Golfe Persique

Du fait de sa situation économique, sociale, industrielle et géographique, le Golfe Persique a une grande importance stratégique pour la République islamique d’Iran et les autres pays de la zone. Son intérêt stratégique vient de ses ressources pétrolières, qui jouent un rôle primordial dans l’économie mondiale. Le pétrole est exploité depuis près de cinquante ans et désormais, l’économie des pays de la zone repose majoritairement sur les exportations de pétrole et de gaz, bien que le niveau de vie soit différent entre les pays du nord et du sud du Golfe Persique. En outre, il est aussi le lieu de transit des armements, par mer, voie ferroviaire et routière, rôle qui fut prépondérant pendant la Seconde Guerre Mondiale.

La Révolution islamique d’Iran a bouleversé la donne géopolitique régionale. Par exemple, malgré un armement massif, les forces soviétiques de cette époque n’ont pu contrôler les mouvements islamiques en Afghanistan influencés par la révolution islamique d’Iran, et ont ainsi été obligées de rebrousser chemin et de recourir à des solutions plus politiques. Les nouvelles républiques d’Asie centrale et du Caucase ont aussi été influencées par la Révolution islamique d’Iran. Tous les pays musulmans, des bords de la Méditerranée à la corne de l’Afrique, du centre de l’Afrique aux pays de l’Océan indien et d’Extrême Orient, subirent de façon différente les effets de cette vague révolutionnaire.

Après la Révolution, le Golfe Persique est devenu une zone de tensions étant donné que les grandes puissances ont essayé d’y accentuer leur présence, entraînant ainsi de multiples conflits et violences. Relié à l’Océan indien, il fut toujours un enjeu stratégique pour les grandes puissances. Durant la guerre froide, les Etats-Unis cherchèrent à installer leurs bases militaires à Oman et à Bahreïn et à faire du Golfe Persique une zone américaine, tandis que l’URSS cherchai à s’implanter dans les régions sud du Yémen et en Irak.

Les Etats-Unis créèrent des forces d’intervention rapide pour concrétiser leurs plans impliquant la collaboration de nombreux pays arabes de la région. Ces forces spéciales étaient militairement faibles et leur réaction n’était pas claire en cas de coup d’état ou de soulèvement, étant donné que les petits pays de la région ne jouissaient pas d’une unité nationale suffisante permettant d’éviter les conflits internes religieux ou ethniques. De même, la présence de nombreux travailleurs immigrés et d’idéologies diverses fut à la source de la constitution de mouvements menaçant la stabilité politique et des pouvoirs claniques ne jouissant d’aucune légitimité démocratique et popularité au niveau national. Aujourd’hui encore, la situation a peu évolué et il est donc très difficile de mettre en place une Union des pays du Golfe Persique pour assurer la sécurité de cette région, étant donné les divergences qui existent entre les dirigeants et les gouvernements.

Aujourd’hui, le calme de la mer, l’étendues des côtes et le grand nombre d’îles ont permis la construction de ports militaires, commerciaux et de pêche, ainsi que la circulation des pétroliers aussi bien que celle des bateaux-mouches. Les bases militaires aériennes et terrestres sont très nombreuses et côtoient les multiples installations des forces maritimes et grands complexes touristiques.

Les plus importantes installations militaires du Golfe, sont celles de Ra’as Mosandam et de Bandar Abbâs, suivies par celle de Tchâ-bahâr, d’Oman, de Bahreïn et de Busher qui se situent successivement sur les côtes du détroit d’Ormoz et les estuaires de la région de Makran, du Nord de la mer d’Oman et du Nord du Golfe persique.

Les aéroports et les ports servent de sites balistiques et antiaériens. En outre, les installations pétrolières du Golfe Persique peuvent se transformer en bases de contrôle aérien, de contrôle maritime et sous-marin, ainsi qu’en pistes d’atterrissage pour les hélicoptères, en ports de vaisseaux de guerre, en espace de stationnement des sous-marins et en réserves d’armements et de munitions. Enfin, un pont de 25 km relie Bahreïn à la péninsule arabe. Outre ses utilisations commerciales, il représente un intérêt stratégique aussi important que le contrôle par satellites des activités aériennes, côtières et sous-marines.


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