N° 12, novembre 2006

Au Journal de Téhéran

Activité touristique





13 Janvier 1937
23 Dey 1315

Nous extrayons aujourd’hui de la remarquable étude MM. Andrieu et Muracciole déjà citée hier, le très intéressant passage suivant ayant trait au site où naquit Téhéran : " Dans cette vaste Plaine de la Médie, longeant l’Elbourz les grandes caravanes. C’était là le passage de la célèbre route de la soie, une des plus vieilles et des plus importantes du monde. Les Babyloniens la connurent, les armées innombrables des grands Achéménides la suivirent, elle fut le chemin d’Alexandre. Venant de la Méditerranée par Babylone, elle franchissait les défilés du Mont Zagros, atteignait Ecbatane et Rhagès puis, par les portes Caspiennes, elle allait vers l’est, vers Bactres d’où par les hauts cols de l’Indoukouch elle se prolongeait jusqu’aux opulentes cités de la Sérique. La prospérité apportée par cette grande artère commerciale, le voisinage des riches terres de l’Hyrcanie (Mazandéran) mais aussi la proximité de l’Elbourz et de ses eaux abondantes ont de tout temps donné à cette région du seuil des déserts orientaux de l’Iran une importance économique et politique considérables. Aussi y trouve-t-on toutes les époques, que ce soit Rhagès, Reï, Véramine, Demavend et plus tard Téhéran, chacune d’elles s’assurant la prépondérance au gré de la fortune des batailles. De ce point de vue, la capitale actuelle de 1’Iran apparaît comme la continuatrice de l’ancienne ville de Reï dont les ruines se trouvent à quelques kilomètres à pied de l’éperon montagneux que l’Elbourz allonge du Sud à l’Est de Téhéran. L’origine de Reï se perd dans la nuit des temps. L’orgueil des anciens Mages lui donnait pour fondateur Chus, petit-fils de Noé. Quelques historiens persans la font remonter à Houcheng Pichdadi, l’un des rois de cette première dynastie iranienne des légendes. Elle fut la Rhagès antique, citée dans l’inscription de Darius à Béhistoum et où, d’après certains auteurs, serait né Zoroastre. Elle était connue sous le nom de Rhagès aux temps bibliques. Le Livre de Tobie nous apprend en effet comment Tobie le Vieux, devenu pauvre, envoya son fils réclamer à Ghadamus, habitant de Rhagès en Médie, remboursement d’un prêt de dix talents. Selon Arien, Alexandre le Grand poursuivant Darius III s’y arrêta quelques jours avec son armée. Seleucus Nicator, général d’Alexandre et fondateur de la dynastie des Séleucides, y fit exécuter de grands travaux et la nomma Europos. Plus tard, lorsque la dynastie Parthe des Arsacides eût le pouvoir, la ville, sous le nom d’Arsacia, devint leur capitale. Vers le IIème siècle de notre ère, elle connut alors une grande prospérité et fut la plus vaste cité de la Médie. Sous les Sassanides, elle resta un centre florissant. La conquête arabe ayant au VIIème siècle ruiné la puissance des Sassanides, l’Islam se substitua à la religion zoroastrienne et l’antique capitale désormais devenue Reï, se transforma en une opulente métropole musulmane. Elle paraît avoir atteint l’apogée de sa splendeur sous les khalifats de Mansour et de Mehdi. C’est dans cette ville qui compta, dit-on, plus d’un million d’habitants, que certains historiens placent le lieu de la naissance du grand Khalife Haroun al Rachid en 765. Les écrivains locaux et les auteurs arabes parlent de Reï à cette époque avec une grande admiration. On peut en juger par le court résumé que fait Chardin d’un passage du livre. "Haft Iklim" (les sept Climats d’Ahmed Razi, géographe persan : Au temps du khalife Mehdi… qui vivait au VIIIème siècle du christianisme, la ville de Reï était divisée en 6 quartiers dont chacun avait 46 rues, chaque rue 400 maisons et 10 mosquées, y avait également dans la ville 6.400 collèges, 16.000 bains, quinze mille tours de mosquées, douze mille moulins, mille sept cents canaux, treize mille caravansérails ; je n’ose insérer le nombre de maisons, ne pouvant pas croire qu’il y eût autant d’hommes. De là lui sont venus les titres superbes qu’elle a dans les histoires ; Première des Villes, Epouse du Monde, Porte des Portes de la Terre, Marché de l’Univers… etc. ".

Quelle que soit l’évidente exagération de ces chiffres excessifs et de ces qualifications pompeuses, il reste indéniable que Reï fut à cette époque l’une des plus grandes villes de la Perse et peut-être de l’Asie. Sous les Bouyides et les Seldjoucides elle fut plusieurs fois capitale et Togrol Beg, le fondateur de cette dernière dynastie, y fit exécuter de grands travaux. C’est sous son règne que naquit à Reï vers le milieu du XIème siècle Hassan Sabbah, qui devint plus tard le terrible Vieux de la Montagne, le grand Maître de la Secte des Assassins dont les sanguinaires adeptes commirent tant de crimes. Souvent éprouvée par les tremblements de terre et les guerres, la vieille cité était encore un centre très considérable lorsqu’elle fut assaillie par les hordes tartares mongoles de Djengis Khan en 1221. Deux armées conduites par ses fils, l’une venant du Khorassan, l’autre du Mazandéran, y opérèrent leur jonction. La ville fut détruite et un grand nombre d’habitants massacrés. La fortune de Reï était dès lors irrémédiablement compromise. Houlagon, petit-fils de Djengis, la dévasta à nouveau en 1259. Il fallait que la vitalité de la vieille cité fût grande pour qu’en 1278, le géographe persan Kazvini y trouvât encore quelque activité. Elle apparut misérable à Rachid ed Din en 1303. Sa voisine Véramine, située à quelques 50 km l’est, avait entre temps pris un essor considérable attirant à elle toutes les richesses de la région. Le souverain mongol, Ghazan Khan, essaya en vain de redonner à la vieille capitale un peu de son ancienne importance… Toutefois la ville, ou ses restes, subsistaient encore vers 1420 car on la trouva mentionnée dans l’histoire de Chah Rokh, petit-fils de Timour Leng qui ajouta Reï à sa part de l’héritage paternel. A partir de l’époque Safavide, on n’en entendra plus parler."


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