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Les Iraniens descendent d’Aryens, la plus importante des tribus de race blanche. On ne sait pas d’où viennent exactement les Aryens et les chercheurs ont élaboré de nombreuses et parfois hasardeuses théories sur la question de leur origine. Ce que l’on sait sans le moindre doute, c’est que les Aryens décident un jour de quitter leur territoire originel pour des contrées où les conditions de vie seraient meilleures. Ils migrent ainsi vers le sud quelque trois mille ans avant Jésus Christ. Arrivés sur le plateau iranien, ils se séparent en trois branches. L’une d’elles, les indo-européens, prennent le chemin de l’ouest et sont les ancêtres des actuels Européens. La seconde branche est celle des Indiens qui prennent le chemin de l’Inde, et la dernière branche, celle des indo-iraniens, décide de s’établir définitivement sur le plateau iranien.
Les Aryens étaient un peuple de cavaliers agressifs et conquérants. Ils usent de la force pour très vite dominer les peuples indigènes des pays où ils ont décidé de vivre.
Les Aryens vivaient en tribu, c’est-à-dire sur la base d’un ensemble de familles liées par des liens de sang très rigides. Chaque tribu est conduite par un chef doté d’un conseil formé des vieux sages de la famille. La structure tribale est patriarcale. L’éducation est simple mais sévère. Chaque nouveau membre de la tribu doit apprendre l’art de la guerre, savoir tirer, monter à cheval et être un bon éleveur de bétail.
Plus tard, ces Iraniens, éparpillés sur toute la Perse en grandes tribus, forment les premiers empires perses.
Les premières dynasties de Perse préservent en grande partie leur caractère tribal et les premiers rois vivent aussi simplement que leurs sujets. L’éducation princière reste aussi primitive que celle du peuple nomade.
Cependant, après Cyrus le Grand, fondateur de la dynastie achéménide, les choses changent. La dynastie achéménide est le meilleur exemple des dynasties orientales despotiques. La société iranienne de cette époque, déjà largement sédentarisée, est formée de castes très peu perméables les unes par rapport aux autres. Les plus indigents n’ont aucune chance de sortir de leur rang propre et d’accéder à un niveau de vie culturelle, sociale ou même économique plus élevé. La société se sépare en plusieurs couches : celle des nobles princiers, qui n’est formée que des sept familles les plus puissantes, celle des nobles ordinaires, celle du clergé zoroastre qui possède une influence énorme, celle des fonctionnaires, celle des citadins et des paysans libres et enfin celle des serfs et esclaves. Bien entendu l’éducation des enfants est celle donnée au sein de la caste à laquelle ils appartiennent de naissance. Malgré cela, l’éducation des nobles est encore une éducation assez primitive où la maîtrise des armes et l’éducation physique sont essentielles. C’est souvent le métier du père qui détermine le niveau d’éducation donnée aux enfants. L’enseignement le plus complet dans le sens moderne du terme est celui que reçoivent les enfants de fonctionnaires. Ils apprennent à lire, à écrire et à compter de manière assez suivie car ils suivront les traces de leur père et devront faire tourner l’immense machine administrative de l’empire.
Cet état de choses continue dans les siècles qui suivent avec peu de changements jusqu’à l’époque sassanide. A cette époque, les mages (prêtres zoroastriens) ont un pouvoir énorme et le zoroastrisme est la religion officielle.
Les règles sociales de l’Avesta (livre sacré zoroastre) sont détournées de leur sens propre et appliquées de manière à créer une barrière infranchissable entre les différentes couches sociales.
La société sassanide est divisée en quatre classes : le clergé, les militaires, les fonctionnaires, les paysans et les citadins. Chacune de ces classes se subdivisent hiérarchiquement et ont une fonction particulière.
L’enseignement est réservé au clergé. L’éducation se raffine et devient plus moderne.
Trois caractéristiques particulières marquent l’enseignement iranien avant l’islam :
- L’influence du zoroastrisme.
Les enseignements zoroastriens étaient, sous toutes les périodes de l’antiquité iranienne, la base de l’éducation classique et officielle. A l’époque sassanide, la religion est le fondement même de la société et de l’Etat. La culture religieuse et la culture étatique et sociale ne font qu’un, et par conséquent le but principal de l’éducation est d’enseigner aux jeunes les prescriptions religieuses de leurs ancêtres et leur inculquer le respect et l’obéissance envers l’Etat et les traditions sociales.
- L’influence de l’Etat.
Dans l’Iran antique, le gouvernement exerce une surveillance constante sur les sujets de l’empire et chacun doit se conformer à l’idéal qui est de servir l’Etat et de n’avancer que dans le sens des intérêts étatiques et collectifs. L’éducation est donc, en tant qu’obligation sociale, une arme aux mains des dirigeants.
- L’importance de l’éducation physique.
L’éducation physique a une place centrale dans l’éducation antique iranienne. Avant les Sassanides, l’éducation était parfaitement militarisée. Le but essentiel de l’enseignement était de transformer l’enfant en un citoyen guerrier, nationaliste pur et dur rejetant totalement toute culture extérieure. L’enfant apprenait à adapter ses désirs personnels à l’intérêt commun. Il se considérait donc très vite non comme un individu, mais comme l’un des membres d’une communauté dont la préservation était plus importante que tout. Les jeunes devaient être capables de maîtriser les réactions de leur corps dans les moments de souffrance et posséder une volonté de fer.
L’enseignement de l’époque est différent selon les rangs sociaux et se fait par petits groupes. L’enfant est simplement encadré et dirigé selon ses capacités. Le but n’est pas de lui enseigner de nouvelles choses mais simplement de lui apprendre à se servir de ce qu’il possède déjà. Dans ce système, l’enseignant à un rôle de guide absolu, c’est lui qui montre à l’enfant le chemin qu’il doit suivre sans discuter. En résumé, il s’agissait avant tout de transformer l’enfant en un serviteur de l’Etat, de sa famille et de sa caste sociale.
L’enseignement religieux pour sa part était basé sur les textes sacrés de l’Avesta que les mages traduisaient en langage clair et compréhensible pour les enfants.
L’enseignement dans son acception actuelle n’existait que pour l’aristocratie. Avec l’entrée des Grecs en Iran, l’éducation classique basée sur la religion et les traditions marque un net recul pendant près de deux siècles, mais reprend sa place avec les Ashks. Ces derniers, purs Persans zoroastriens, tentent de ressusciter l’éducation classique et portent un grand respect au clergé et au corps enseignant. Cette période est marquée par l’importance que l’on donne à la famille, qui remplace l’Etat au cœur de l’éducation.
Les progrès effectués à l’époque sassanide tels que le développement des industries du papier, l’accroissement du nombre des bibliothèques et de leur contenu, l’intérêt des gens pour la lecture et les besoins de la machine administrative sassanide se traduisent par un progrès scientifique rapide ayant une répercussion immédiate sur l’éducation. Le nombre des lettrés augmente non seulement parmi les aristocrates, mais aussi parmi des classes plus basses tels les commerçants et les paysans.
De nouvelles matières scientifiques voient le jour ainsi que de nouveaux métiers artisanaux nécessitant un enseignement spécifique.
L’enseignement se diversifie donc et les premières universités sont fondées.
La puissance de l’empire perse à l’époque sassanide, surtout après la victoire sur les Romains, le développement de ses relations internationales ainsi que la diversification nouvelle et inédite des sciences en vigueur font apparaître, vers la fin du règne de cette dynastie, de nouveaux corps d’enseignants non liés au clergé zoroastre.
Socialement, quatre types d’éducation spécifiques existent à l’époque, chacun étant réservé à une couche particulière de la nation :
- L’éducation nobiliaire et princière réservée à la haute aristocratie. En plus du programme obligatoire, elle inclut les sciences politiques et administratives, la science militaire et parfois les langues étrangères.
- L’éducation théologique réservée aux enfants des religieux et à ceux qui se destinaient à la religion. Elle est essentiellement basée sur les textes sacrés.
- L’éducation des enfants d’artisans qui consiste essentiellement à apprendre le métier du père.
- L’éducation des enfants des fonctionnaires qui, de la même façon, consiste en l’apprentissage du métier paternel.
L’éducation se déroulait en trois phases. L’enfant était éduqué par sa mère jusqu’à l’âge de 5 ans ; par son père, de 5 à 7 ans, puis il commençait sa scolarité à l’école.
Avant sa septième année, l’enfant apprenait par cœur les textes de l’Avesta, et plus particulièrement les Gatas. La quinzième année marquait la fin de son éducation physique et morale. A quinze ans, le jeune adolescent devait connaître sa religion et la philosophie de sa religion. A vingt ans, il passait l’examen final devant un jury de mages enseignants et commençait désormais sa vie d’adulte.
Les enfants des familles déshéritées n’avaient que trois choses à apprendre : monter à cheval, tirer à l’arc et toujours dire la vérité.
Certains devaient suivre des cursus spéciaux de sciences administratives ou théologiques qui duraient jusqu’à leur vingt-quatrième année.
Chaque temple possédait sa propre école mais, bien entendu, la plus grande partie de l’éducation était faite par la famille ou la tribu à laquelle appartenait l’enfant.
Le programme était assez varié. On apprenait à lire, à écrire et à compter. Les textes sacrés occupaient une place très importante. Les cours débutaient le matin et duraient jusqu’au soir. La matinée était réservée à l’étude et l’après midi à la culture physique. L’apprentissage était basé sur la mémorisation mais malgré cela, l’écriture avait une place particulière. On écrivait sur des tablettes de bois avec du charbon.
Les enseignants étaient surtout des mages et la tradition voulait que l’école ne soit pas bâtie près d’un bazar, lieu de mensonges et d’infamies, pour que l’enfant n’apprenne pas à mentir. Les élèves se levaient très tôt et après une longue gymnastique matinale, ils montaient à cheval et s’exerçaient une demi-heure. Quelques matières comme la grammaire, les mathématiques et les matières religieuses, étaient enseignées à tous. L’enseignement de la langue pahlavi était assuré par les grands mages. On enseignait également la langue araméenne. Les jeunes aristocrates apprenaient le polo, les échecs, l’escrime, l’équitation, le tir, la chasse et la lutte. Leurs maîtres étaient choisis parmi les meilleurs, les plus expérimentés et les plus pieux membres de la société.
Au départ, les Aryens ne portaient pas une grande attention à la religion. Ils étaient assez matérialistes et n’accordaient de l’importance qu’à ce qui leur procurait bénéfice.
Ce n’est qu’à l’époque des Achéménides qu’une religion naît, le zoroastrisme. On dit que le prophète Zoroastre convertit le père du grand Cyrus, Vishtassb et qu’ainsi le zoroastrisme se répandit peu à peu dans tout l’Iran.
Le zoroastrisme est basé sur la trilogie : "Bonne pensée, bonne parole, bonne action". Cette religion est très strictement encadrée par des règles définies et interprétées par les mages. Elle est contemporaine du bouddhisme qu’elle rejoint dans son message de tolérance. Mais la première est une religion réservée à l’aristocratie qui protège grâce à elle ses intérêts, tandis que la seconde est la cristallisation des souhaits et des désirs de tout un peuple.
Le clergé zoroastrien ressemblait au clergé catholique en ce sens qu’il était strictement hiérarchisé. Jusqu’au quatrième siècle, le clergé zoroastre possédait un pouvoir étatique très grand et cette position privilégiée lui avait permis d’établir une mainmise totale sur les caisses de l’Etat.
Le zoroastrisme a profondément marqué le système éducatif de l’époque car chaque zoroastrien devait connaître des passages de l’Avesta ainsi que les rites et célébrations de sa religion. Cette unité religieuse et par conséquent culturelle en Iran permit la mise en place d’un système éducatif uniforme sur l’ensemble du territoire perse.
La religion avait un rôle essentiel et constructif dans l’éducation. On y enseignait dès l’enfance le sens de la justice, le culte de la vérité, la maîtrise de soi, la bonté, le courage et la reconnaissance. Certains passages de l’Avesta consignent les paroles de Zoroastre qui conseillait à tout croyant de rechercher la science et la vérité en toutes choses et soulignait le rôle de l’éducation dans la vie d’un homme. Dans le cinquième livre de l’Avesta, on lit :
" Si un étranger ou une connaissance ou un frère ou un ami à la recherche de la science ou de l’art vient te voir, reçois-le et enseigne-lui ce qu’il veut savoir."
De même, dans Dinkard, l’un des autres livres sacrés zoroastre, on peut lire :
" Considère l’éducation comme aussi importante que ta vie. Chacun a le devoir d’atteindre à un rang élevé en étudiant, lisant, écrivant, et en respectant les règles religieuses. Chacun doit préserver la paix et l’ordre dans la société en s’aidant des livres de morale."
La famille antique perse était très grande et possédait de nombreuses ramifications. La polygamie était pratiquée parmi l’aristocratie mais la monogamie traditionnelle régnait parmi les familles moins aisées.
Malgré ce système éducatif souvent réservé à une élite, des écoles publiques accessibles à toutes les couches de la société existaient. Il est vrai que ces écoles n’étant pas gratuites d’une part et que d’autre part, les cours durant du matin au soir, beaucoup de gens n’y envoyaient pas leurs enfants.
A l’époque achéménide, les Perses pensaient plutôt à leurs besoins matériels immédiats comme la nourriture, le logis et la sécurité mais au fur et a mesure du développement des relations internationales de la Perse et suite à une hausse générale du niveau de vie, des besoins culturels se font jour et des sciences et des arts tels que l’architecture, la médecine, la musique, la sculpture et des métiers comme la gravure, la ciselure et verrerie font leur apparition. Ces sciences et métiers requièrent des enseignements spécifiques, non dispensés par les écoles.
On sait aujourd’hui qu’une certaine forme d’enseignement supérieur existait, mais seulement pour des matières telles que les sciences politiques, militaires ou économiques. Mais cela ne signifie pas que l’enseignement supérieur était organisé de façon spécifique.
L’administration de l’empire, les juridictions judiciaires et administratives, la connaissance des langues étrangères et les relations internationales surtout après les Achéménides ; les journaux et les articles, l’établissement de voies de communication permanentes entre l’est et l’ouest du pays et d’une réglementation stricte concernant les activités de production, une architecture et un design architectural en pleine expansion, l’existence des temples et des sciences religieuses et le progrès des arts picturaux, musicaux et décoratifs sont la preuve de l’existence d’un système d’enseignement supérieur assez élaboré.
L’un des plus importants centres d’enseignement supérieur en Iran et dans toute la région fut l’université de Gondi Shapour, qui continua d’exister jusqu’au troisième siècle après l’hégire. Toutes les matières et en particulier la médecine étaient enseignées dans cette université. Elle était célèbre dans toute la Perse et jusque dans l’Empire romain. Elle était située dans le sud ouest de l’Iran, près des villes de Dezfoul, Shoushtar et Shoush.
L’empereur Shapour Ier, fondateur de la ville de Gondi, construisit la ville avec les prisonniers de guerre romains selon la coutume de l’époque. Il ordonna également l’acquisition de toutes les œuvres classiques grecques traduites en pahlavi pour la bibliothèque de la ville. Au départ, cette ville n’était qu’un camp de prisonniers mais très vite elle se transforma en ville universitaire comme celles d’Antioche ou Alexandrie. Elle connut son âge d’or sous le règne d’Anoushiravan.
Conclusion
En étroite harmonie avec les conditions sociales, politiques, culturelles ou même géographiques de leur pays, les Iraniens laissèrent un grand héritage culturel. Les conditions historiques de chaque société exigeaient un système éducatif particulier répondant aux besoins et aux désirs multiples de la société.
Les Iraniens du premier millénaire
av. J.C possédaient une culture politique et traditionnelle uniforme et harmonisée. La dynastie achéménide qui régna de 550 av. J.C jusqu’en 330 av. J.C reflète en partie cette société. Pendant ses deux cent vingt ans de règne, la société, politiquement et culturellement unie, crée un système éducatif très perfectionné. Elle réussit ainsi parfaitement à éduquer son potentiel humain de façon à ce qu’il puisse servir à la société dans son ensemble.
Avec le règne des Séleucides, le progrès social marque un arrêt brutal. L’éducation traditionnelle n’est plus de mise et beaucoup d’écoles et de lieux religieux éducatifs sont détruits. Le rôle des mages dans l’éducation diminue. Par contre, on tente d’implanter le système éducatif grec sans succès.
Après les Séleucides grecs, c’est au tour des Ashks de régner. Ces derniers étant Perses, ils remettent en vigueur l’enseignement traditionnel tout en redonnant leur place aux mages et aux enseignants. La famille retrouve une place dominante, les temples sont reconstruits et l’instruction par les mages est reformulée sur des bases plus solides.
L’ère sassanide est l’époque du retour de l’influence de la religion en étroite collaboration avec l’Etat et les institutions politiques. L’enseignement théologique et l’interprétation des textes sacrés se généralisent.
L’enseignement supérieur atteint un niveau culturel inégalé jusqu’alors pendant l’époque sassanide et l’université de Gondi Shapour est une des meilleures illustrations de cet âge d’or.